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jugeoient des Astronômes par les faiseurs d’Almanachs, des Poëtes & des Musiciens par les Chanteurs du Pont-neuf : au lieu qu’on doit à la Chimie l’invention des choses les plus nécessaires à la vie, comme la préparation des métaux & de la plûpart des remèdes.

☞ Il faut pourtant convenir que la Chimie, malgré toutes les découvertes, est encore bien éloignée de la perfection, & qu’il est même impossible d’arriver à ce point là. Dans la décomposition, le feu change souvent les principes des choses : les végétaux par l’analyse donnent des résultats presque semblables, puisque les plantes les plus salutaires rendent à peu-près les mêmes principes que les plus vénimeuses. On sait d’ailleurs que le feu ne fait rien sur plusieurs espèces de pierres, de terres & de sables. Beaucoup de minéraux ne peuvent être analisés par cet élément, qui emporte & subtilise plutôt leurs corpuscules, qu’il ne les divise en leurs principes. Tels sont le mercure & le souffre, quand on ne les brûle pas à l’air libre. Il n’est pas moins difficile de détruire le gluten de certaines pierres, & les gangues sauvages sont indestructibles. Oryct.

☞ CHIN. Ville de la Chine dans la Province de Honan, au département de Caufung, par les 34d 48’ de lat.

☞ Il y a un fameux lac de même nom dans la Province de Junnan, à la place duquel il y avoit autrefois une grande ville qui fut abymée par un tremblement de terre.

CHINAGE ou CHEMAGE. Terme de Coutumes. Droit qui se paye à raison des charrettes qui passent dans les bois. Chinargium.

☞ CHINEA. Grande & agréable vallée, dans le Diocèse de Lima au Pérou, assez près de celle de Lunaguana.

☞ CHINCHEN. Ville de la Chine dans la Province de Huquang, sur les frontières de celle de Quanton.

☞ CHINCHIAN ou CHINKIANG. Ville de la Chine, cinquième métropole de la Province de Junnan, son département comprend vinq villes : sous le 24e degré 19’ de latitude, elle est de 14d 4’ plus occidentale que Peking.

Chinchian ou Chinkiang. Ville de la Chine, sicième métropole de la Province de Kianguan ou Nanquin, sous le 32d 49’ & de 2d 28’ plus orientale que Peking.

CHINCHILLA. s. m. Petit animal qui se trouve dans le Pérou. On estime fort son poil, qui est fin & poli. Il est de la grosseur d’un écureuil.

☞ CHINCHINTALAS. Province de la Tartarie entre celles de Camul & de Suchur. On trouve dans une montagne de cette Province un minéral singulier, qu’on appelle Salamandre, & dont on fait du linge qui se conserve dans le feu, comme le lézard appelé salamandre, suivant l’opinion mal fondée de quelques Naturalistes. Voyez Salamandre.

CHINE. Grand Royaume de l’Asie, qui occupe la région la plus orientale de notre continent. Sina, Sinarum regio, China. La Chine, selon le P. Le Comte, dans ses nouveaux Mémoires, T. I, p. 36, s’étend du Sud au Nord depuis le 23e degré jusqu’au 4e. C’est 18 degrés, qui font 450 lieues communes. Son étendue d’Orient en Occident n’est guère moindre. D’ailleurs la Chine est presque ronde, de sorte qu’elle a près de quatorze cens lieues de tour. Ces mesures sont justes, dit ce Pere, & fondées sur des observations exactes. Au reste, on ne comprend point dans ce que nous venons de dire plusieurs Îles de la Chine, qui seules feroient un grand Empire, ni le Leauton, qui est hors de la grande muraille. Pour la Corée, le Tunquin & Siam, ils doivent à la vérité un tribut réglé à l’Empereur, qui outre cela en nomme les Rois, ou les approuve, quand ils prennent possession de la couronne ; mais néanmoins tous ces Etats ont leur gouvernement particulier, & sont très-différens de la Chine. Abulpharage, dans sa première Dynastie, compte les Chinois parmi les six premières nations du monde. Il les appelle Sin, & dit qu’ils habitent le plus Oriental de la terre habitable, & qu’ils s’étendent depuis la ligne équinoctiale, jusqu’au dernier des sept climats vers le Septentrion ; il ajoute qu’ils surpassent toutes les autres nations dans les Arts méchaniques & la Peinture. Telle est l’idée qu’on en avoit en Orient dans le XIIIe siècle qu’Abulpharage écrivoit.

La Chine est si bien cultivée par l’industrie & le travail de ses habitans, qui ont applani toutes les campagnes, converti des montagnes mêmes en plaines, par les terrasses qu’ils t ont faites jusqu’au haut, comme en amphithéâtre, par les canaux qu’ils ont conduit dans toutes les Provinces ; qu’il n’y a presque pas un pouce de terre inutile, & que les campagnes ressemblent à des jardins. D’ailleurs, outre que la Chine produit tous nos fruits d’Europe, à la réserve des amandes, elle e a beaucoup d’autres que nous ne connoissons point en ce pays-ci. Malgré tout cela, la terre suffit à peine à la nourriture de ses habitans, tant elle est peupéle, & les peres & meres exposent tous les jours une infinité d’enfans, après qu’ils sont venus au monde, parce qu’ils ne pourroient les nourrir.

Les Provinces de la Chine sont au Nord, le Pekeli, le Xansi, le Xenzi, Xatung ou Xanton, le Honan & le Suchuen ; & au Sud le Huquang ou Huquam, le Kiangsi, celle de Nankin, le Chekiang, le Fokien, le Quantung, le Quandsi, le Queicheu & Junnan ou Yunnan. Les fleuves de la Chine les plus considérables sont le Hoangs, ou la rivière jaune, le Kiang, ou la rivière bleue, & le Canton, ou le Ta. Les villes de la Chine sont ou villes de guerre, ou villes de police. Chaque espèce de ces villes est distinguée en plusieurs ordres. Il y a plus de mille villes de guerre du premier ordre, & beaucoup plus du second & du troisième. Pour les villes du premier ordre, il y en a plusieurs plus grandes, ou aussi grandes que Pekin. Le P. Le Comte dit qu’il en a vû lui seul plus de sept ou huit. Il y en a plus de quatre-vingt du premier ordre, qui sont comme Lyon & Bourdeaux. Parmi deux cens du second ordre, il y en a plus de cent, comme Orléans ; entre douze cens du troisième, on en trouve plus de six cens aussi considérables que la Rocemme & Angoulême ; sans parler d’un nombre prodigieux de villages, qui surpassent en grandeur & en nombre d’habitans les villages de Marene & S. Jean de Luz.

L’Empereur de la Chine est absolu, & les loix lui donnent une autorité presque sans bornes. Il a deux Conseils, l’un ordinaire, composé des Colaos, qui sont les Ministres d’Etat ; l’autre extraordinaire, composé des Princes du sang. Il y a six Tribunaux souverains à Pekin ; le Lipou, pour ce qui regarde les Officiers de l’Etat, que nous nommons Mandarins, le Houpou, pour les finances ; le Lipou, pour la religion, les anciennes coutumes, les sciences, les arts, les affaires étrangères ; le Pinpou, pour la guerre ; le Himpou, pour les affaires criminelles ; le Compou, pour les ouvrages publics. Les Mandarins sont tous Docteurs. Il y en a 13647 de neuf ordres différens.

Il y a quatre principales religions à la Chine. L’ancienne qui est celle de l’Etat, & qui ne reconnoît qu’un dieu, souverain maître du ciel & de la terre, sans idoles, ni statues. L’Idolâtrie est la seconde. Elle y fut apportée par Fohe, ou Fohi, Philosophe Indien, 32 ans avant la naissance de Jesus-Christ. Il y a aussi un fort grand nombre d’Athées. Enfin, la Religion Chrétienne y a pénétré. S. Xavier dit dans la 3e Epitre du Livre II de ses Lettres, que bien des gens croient que saint Thomas y avoit prêché l’Evangile, qu’avant que les Portugais connussent les Indes, l’Eglise Grecque y