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CHI

lions, &c. Molossus Britannicus. Les Espagnols doivent une partie des conquêtes de l’Amérique à des dogues d’Angleterre, comme on voit dans Herréra. Le mot de dogue est anglis, & signifie chien.

Mâtins, sont chiens de garde, qu’on laisse dans les basse-cours pour aboyer. Canis villaticus. Il y a aussi des mâtins dans le vautrait pour chasser au sanglier.

Chiens allans ou gentils, sont de gros chiens qui en allant détournent le gibier. On le dit aussi des chiens de Bouchers qui servent à conduire leurs troupeaux. Lanionus canis.

On appelle chiens trouveurs, des chiens qui vont requérir un renard, quand il y auroit vingt-quatre heures qu’il seroit passé.

Chien barreur, est le meilleur chien pour le chevreuil.

On appelle un chien secret, un limier qui pousse la voie sans appeler. Vestigator canis tacitus. On l’appelle aussi muet, & on dit qu’il ride.

Un chien babillard ou qui caquette, clamosus, est celui qui crie hors la voie, & le plus souvent d’ardeur, ou qui crie des matinées entières. On l’appelle en latin argutarius, dont il est parlé dans la Loi Salique.

Un chien menteur, est un chien qui cele la voie pour gagner le devant. Canis mendax.

Un chien vicieux, celui qui chasse tout ce qu’il rencontre, & qui s’écarte toujours de la meute. Canis vitiosus. Un chien de bonne créance, de bonne affaire, quand il est docile & obéissant, docilis, obsequens. Un chien qui chasse de forlonge, qui sent de loin le gibier, sagax ; un chien qui ne se rompt point au bruit. Canis usque prædam insequens.

Un chien sage, qui chasse bien, qui tourne juste. Venandi peritus. Un chien de tête, & un chien d’entreprise, qui est hardi & vigoureux, Strenuus, animosus.

On dit qu’un chien a le nez dur, lorsqu’il rentre malaisément dans la voie, & qu’il reprend lentement, obtusæ naris ; qu’il est de haut nez, lorsqu’il va requérir sur le haut du jour ; & qu’il a le nez fin, lorsqu’il chasse bien dans les chaleurs & dans la poussière, canis doctus, ou ductor, ou canis judex.

On appelle chien d’aiguail, celui qui chasse bien le matin, lorsque la rosée est sur la terre, & qui ne vaut rien au haut du jour, canis matutinus ; & au contraire un chien de haut jour, qui ne vaut rien dans l’aiguail. Canis serotinus.

On appelle chien estraffé, celui qui a une cuisse qui ne prend plus de nourriture, & qui est boiteux ; canis pede mutilus aloquo ; chien butté, celui à qui la jointure des jambes de devant grossit, canis instatas ossium commissuras habens ; chien épointé, celui qui a des os des cuisses rompus ; aliqua corporis parte fractus ; chien alongé, celui qui a les doigts du pied étendus par quelque blessure qui a touché les nerfs ; chiens courtauts, cauda mutilus, decurtatus.

On dit qu’un chien a belle gorge, lorsqu’il crie bien, & qu’il a la voix grosse & forte ; qu’un chien aboie, quand il sent le gibier ou quelque chose d’étrange ; qu’un chien jappe, lorsqu’il crie sans sujet, ou au moindre bruit de nuit ou de jour ; & qu’il hurle, lorsqu’il sent des loups, ou une chienne chaude qu’il ne peut joindre. On dit que le chien sonne ; pour dire, qu’il appelle au bon chemin, ayant trouvé la trace.

On appelle un chien armé, armatus, quand il est couvert pour attaquer un sanglier.

C’est une bonne qualité de chien, d’avoir le jarret droit & bien herpé.

A la chasse on dit, parler aux chiens ; pour dire, les réjouir, comme on fait à la chasse du cerf, canibus blandiri, canes voce mulcere, ou les exciter, ou menacer comme on fait à celle du sanglier avec des cris rudes & furieux, & avec la trompe. Increpare, minitari. On appelle titre de chiens, le lieu où l’on pose les chiens, afin que quand la bête passera, ils la courent bien à-propos. Opportunus locus. Ces chiens sont mis en un bon titre ; pour dire, sont postés en un bon relais.

Trait de chien se dit des longes de crin & des colliers qui servent à coupler les chiens. Lorum. Ainsi on dit, qu’un cerf ou une autre bête a senti le vent du trait ; pour dire, des chiens.

Rompre les chiens, se dit de la faute d’un Picqueur & chasseur, lorsqu’ils passent à travers des chiens pendant qu’ils courent, & ainsi rompent leur course. C’est aussi les rappeller pour les empêcher de continuer la chasse. Cursum canum avertere. Il faut quelquefois rompre les chiens, les menacer, les recoupler & sapper à route, afin de suivre & relancer le cerf, qui leur a donner le change, & les a fait tomber en défaut.

On dit figurément en ce sens, rompre les chiens, quand on interrompt quelqu’un dans son discours, pour empêcher qu’il ne dise quelque chose de désavantageux, ou qu’il n’entreprenne quelque affaire. Interpellare.

Le droit des chiens est ce qu’on leur donne à la curée, comme la langue, le muffle, les oreilles d’un cerf. Pars prædæ canibus debita.

Il y a enfin des chiens de chambre pour le divertissement des Dames, qu’on nourrit pour leur petitesse, leur beauté, & qu’on appelle chiens de manchons, comme les chiens de Boulogne, d’Artois, épagneuls, bichons, barbets, levrons, chiens eas ou des Barbarie, &c. Catellus. Chien de Boulogne. C’est un petit Chien de manchon. Canis Boloniensis. Ils sont ainsi appelés, parce qu’ils viennent de Boulogne, où, pour les empêcher de croître, on les frotte pendant plusieurs jours en toutes les jointures du corps, avec de bon esprit de vin, immédiatement après qu’ils sont nés.

Doguin, est un petit dogue ; il y a quelque temps qu’on en voyoit par tout, aujourd’hui la mode en est passée.

Les Seigneurs levoient autrefois un droit qu’ils appeloient la nourriture des chiens, & en latin dans les Actes. Cibus canum. Voyez Lobineau, Hist. de Bret. T. II, p. 293. ☞ Le past de chiens étoit une charge que les Seigneurs imposoient à leurs ténanciers de nourrir leurs chiens de chasse.

Chien se dit figurément des choses & des personnes par mépris & par injure. Les Turcs nous appellent chiens, nous traitent comme des chiens. On dit un chien de valet, un chien de Procureur, un chien de fripon. Il leur faut des vases d’or pour mettre leur chien de museau. Mademoiselle l’Heritier.

Qui tantôt est venu me parler
D’un chien de mariage à me faire sifler ? R.

Voilà de beaux chiens de vers ! Voilà un beau logement de chien, un beau présent de chien ! Tout cela est du style familier. Cette injure s’exprime en latin par des adjectifs propres de la personne ou de la chose à laquelle on attribue ce mot de chien. Le Maire, dans son Histoire d’Orléans, rapporte après Mathieu Paris, en la vie d’Henri III Roi d’Angleterre, que l’on appelle populairement & proverbialement les Orléannois, chiens d’Orléans, pour dire, des chiens qui n’aboient point, ou des gens muets, qui ne s’opposent point au mal ; parce que les Pastoureaux, brigands qui s’élevèrent en France durant la captivité de S. Louis, & pillèrent plusieurs villes sous prétexte d’aller délivrer le Roi ; les Pastoureaux, dis-je, étant venus à Orléans, & les Ecoliers & le Clergé les ayant insultés & voulu les chasser, & ces brigands ayant dans cette émeute tué & jeté dans la Loire beaucoup d’Ecoliers & d’Ecclésiastiques, l’Evêque d’Orléans mit la ville en interdit, parce que les habitans avoient dissimulé ou même consenti à ces violences des Pastoureaux, ce qui leur fit donner ce nom de chiens d’Orléans. Mais le Maire conjecture que c’est plutôt à cause de