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CHE

tient la cendre du grand Pompée, présente à l’esprit un contracte attendrissant. Mais une flamme n’est point chétive. Dans ce vers, l’expression autant comme est un barbarisme. Il faut dire autant que.

☞ Le mot chétif, dit M. l’Abbé Girard, commence à vieillir : il n’est pas néanmoins tout-à-fait suranné, & il se trouve encore des places où il figure assez bien. Il le compare ensuite avec méchant, dans ce qu’il a de synonyme, c’est-à-dire, autant que ce dernier marque une certaine incapacité à être avantageusement placé ou mis en usage. Sous ce point de vue, l’inutilité ou le peu de valeur rendent une chose chétive. Les défauts & la perte de son mérite la rendent mauvaise. Un chétif sujet, est celui qui n’étant propre à rien, ne peut rendre aucun service dans la République. Un mauvais sujet est celui qui, se laissant aller à un penchant vicieux, ne veut pas travailler au bien ; qui est chétif, est méprisable, & devient le rebut de tout le monde ; qui est mauvais, est condamnable, & s’attire la haine des honnêtes gens.

☞ En fait de choses d’usage, le terme de chétif enchérit sur celui de mauvais. Ce qui est usé, mais qui peut encore servir au besoin, est mauvais. Ce qui ne peut plus servir, & ne sauroit mis honnêtement, est chétif. Un mauvais habit n’est pas toujours la marque du peu de bien. Il y a quelquefois sous un chétif haillon plus d’orgueil, que sous l’or & sous la pourpre.

CHÉTIFVOISON. s. f. Vieux mot, Captivité. On l’a dit aussi pour misère.

CHÉTIVEMENT. adv. D’une manière chétive. Miserabiliter. Les Pédans nourrissent leurs écoliers fort chétivement. Parcè.

CHÉTOLIER. s. m. Terme de Coutume. Celui qui prend des bestiaux à chetel.

CHÉTRON. s. m. C’est une petite layette en forme de tiroir, qu’on fait au haut des côtés d’un coffre, pour y mettre à part les choses qu’on veut trouver sous sa main en l’ouvrant, & les séparer du reste de ce qu’on y serre. Capsula arcæ intestina.

CHEVAGE. s. m. Droit, subside qui se levoit autrefois sur les étrangers pour leur séjour dans le Royaume. Vectigal à peregrinis exigi solitum. Payer le chevage. Bacquet.

chevage, est aussi un droit de douze deniers parisis, qui se paye sous peine d’amende tous les ans au Roi, en quelques Provinces, par les bâtards & aubains mariés, qui s’y sont établis. Ce droit s’appelle chevage, parce que chaque chef marié veuf le doit, au cas qu’il soit bâtard ou aubain.

CHEVAGIER. s. m. On appelle ainsi dans les Ordonnances ceux qui doivent le droit de chevage.

CHEVAL. s. m. Animal à quatre piés, qui hennit, & qui rend de grands services à l’homme, dont la cavalle est la femelle. Equus, equa. Il sert à la chasse, à la guerre, au labour & aux voitures. Un cheval, pour être bon, doit avoir trois parties correspondantes à trois de la femme, la poitrine, le fessier & les crins ; c’est-à-dire, poitrine large, croupe remplie, & les crins longs : trois du lion, le maintien, la hardiesse & la fureur : trois du bœuf, l’œil, la narine, la jointure : trois du mouton, le nez, la douceur, la patience : trois du mulet, la force, la constance au travail, & le pié : trois du cerf, la tête, la jambe, & le poil court : trois du loup, la gorge, le cou & l’ouie : trois du renard, l’oreille, la queue, le trot : trois du serpent, la mémoire, la vue, le contournement : trois du lièvre ou du chat, la course, le pas, la souplesse. Les chevaux ont du jugement, dit Solin ; ils connoissent leurs maîtres & leurs ennemis. Quelques-uns n’ont pas souffert que d’autres les montassent. Quelques-uns ont pleuré la mort de leurs maîtres, & d’autres se sont laissé mourir de faim après les avoir perdus. Alexandre fit faire de magnifiques funérailles à son cheval ; il fit bâtir une ville en son honneur, qu’il nomma Bucéphalie. Caligula voulut faire nommer son cheval Consul. Les Tartares & les Turcs portent pour enseigne, à la guerre, une queue de cheval attachée au bout d’une pique.

Ce mot vient de caballus, qui signifioit autrefois cheval de bagage ou petit cheval, qui servoit au moulin & aux voitures. Nicod, Isidore & Papias dérivent celui ci ex eo quod ungulà terram cavet.

Les Latins disoient en proverbe, le cheval de Sejus, quand ils vouloient donner à entendre une chose qu’il est dangereux de posséder. C. Sejus avoit un des plus beaux chevaux qu’on puisse voir ; mais il n’en fut pas long-temps le maître, Marc-Antoine l’ayant fait mourir. dolabella ayant acheté ce cheval, mourut bientôt après de mort violente. Cassius, qui en fut ensuite le maître, périt d’une façon tragique. Marc-Antoine, qui le posséda aussi, est connu par sa fin déplorable. Nigidius, Chevalier d’Asie, l’acheta après la mort de Marc Antoine, & le cheval & l’homme se noyèrent dans le fleuve Marathon. Ce proverbe revenoit à un autre qu’ils avoient, qui étoit l’or de Toulouse, dont l’on verra l’explication au mot Or.

Le cheval se nomme diversement, suivant son poil, sa taille, son usage, ses vices ou maladies.

On dit un cheval blanc, candidus ; gris, laucophæus ; pommelé, equus coliris cinerei scutulis distinctus ; roux, rufi coloris, rufus ; bai-brun, coloris phœnicei saturioris, pressioris ; bai-clair, coloris phœnicei dilutioris ; bai-doré, aurei coloris ; alezan ou alezan rouge sore ou saure, equus russeus, ruber ; alezan brûlé, alezan fort brun, rubidus ; alezan chargé, russei coloris, sed saturi ; alezan lavé, coloris russei sed dilutioris. Cheval-bai d’une sorte de rouge éclatant en divers degrés, equus badius ; brûlé, rufus atrore, nigrore multo mustus ; aubère, grisâtre, ayant de grandes taches noires, equus leucophæus grandibus maculis iisque nigris distinctus ; cheval pie, nigro & alto picarum in morem distinctus ; soupe de lait, equus aldibus ; isabele, coloris melini subalbidi ; roan ou tête de Maure, equus atro capite, toto corpore niger, sed capite nigriori ; mirouette, equus pilis quibusdam in partibus magis quam in aliis nitentibus, speculorum instar distinctus, maculis nitentibus variegatus ; zain, equus unicolor, unius coloris ; balzan, equus quatuor pedibus albis, &c. Tous les mots & les suivans sont expliqués à leur ordre alphabétique. On a donné aux chevaux des noms propres, comme à celui d’Alexandre, Bucephale. Roland appeloit son cheval, Mellendis ; & Renault, l’un des quatre fils Aymond, appeloit le sien Bayard.

A l’égard de la taille on dit un cheval nain, pumilus ; ragot, brevi densoque corpore ; haut-jointé, altis articulis ; court-jointé, depressis articulis ; cheval entier, equus non castratus, non exsectus ; hongre, canterius ; courtaut, equus quadratæ sed brevioris corporaturæ. Par courtaux on peut encore entendre qui n’a point de queue, caudis mutilus ; coureur, cursor ; roussin, caballus. Cheval d’Espagne, iberus ; barbe, Numidicus ; guilledin d’Angleterre, asturco Britannicus. Les chevaux Irlandois passoient autrefois pour être des meilleurs qu’il y eût en europe ; aussi étoient-ils fort chers : & l’histoire d’Irlande fait mention d’un de leurs Seigneurs, qui combattant pour Richard II Roi d’Angleterre, montoit un cheval qu’il avoit acheté 400 bœufs. Larrey. Cheval Persan, Persicus, cheval Turc, Turcicus. Vigenere dans ses Illustrations sur l’Hist. de Chalcond. p. 343 & suiv. parle fort en détail des chevaux Turcs, & de la manière dont on les nourrit & on les panse. Cheval de manège, tractabilis, frænis parens, exercitotus ; cheval de pas, gradarius equus ; cheval de selle, equus sessilis, idem & carrucarius ; cheval de charrette, de trait, d’attelage, equus jugatorius ; limonier, temonem utrumque sustinens ; cheval de charrue, arator equus ; cheval d’amble ou haquenée, asturco ; cheval de poste, veredus ; cheval de louage, conductitius,