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planche montée sur deux petites roues qui leur sert à assembler du cordage.

Chariot est aussi une constellation céleste, ainsi nommée par le peuple, à cause qu’elle ressemble en quelque façon à un chariot. Plaustrum. C’est celle qu’en Astronomie on appelle la petite Ourse, qui a sept étoiles, dont quatre font la ressemblance des quatre roues, & les trois autres en droite ligne paroissent en être l’attelage ou le timon. C’est la dernière & la plus voisine de notre pôle. Il y a le grand & le petit chariot. La grande Ourse est le grand chariot, ou le chariot de David. On appelle aussi chariot de mer, l’une des constellations méridionales, autrement nommées Navire d’Argo.

Chariot. C’est une mesure ou estimation, à laquelle on vend à Paris la pierre de taille ordinaire. Le chariot contient deux voies, & chaque voie cinq carreaux, c’est-à-dire, environ 15 piés cubes de pierre.

☞ Il y a aussi des chariots destinés uniquement à porter le corps d’une pièce de canon.

CHARISIES. s. f. Fêtes en l’honneur des Grâces, que les Grecs appellent Charites. ☞ On y donnoit pour prix au plus vigoureux danseur, des espèces de gâteaux, nommés charisia.

CHARISTICAIRE. s. m. Commendataire, Donataire. Celui à qui l’on a donné la jouissance des revenus d’un Monastère, Hôpital ou Bénéfice. Charisticarius ; Commendatarius ; bonorum sacromm, ou Ecclesiasticorum usufructuarius. Les Charisticaires étoient parmi les Grecs des espèces de donataires ou commendataires, qui jouissoient de tous les revenus des Monastères, ou des Hôpitaux, sans en rendre compte à personne. On rapporte le commencement de cet abus aux Iconoclastes, & particulièrement à Constantin Copronyme, le mortel ennemi des Moines, dont il donnoit les Monastères à des étrangers. Après l’extinction de cette hérésie, leurs biens leur furent rendus ; mais dans la suite les Empereurs & les Patriarches confièrent des Monastères & des Hôpitaux à des gens de qualité, non par manière de don, & pour en retirer aucun profit temporel, mais pour les réparer, ou les orner, & en être les protecteurs. Ensuite on alla plus loin ; l’avarice s’y mêla : on donna les Monastères & les Hôpitaux à ceux même qui étoient en bon état, & les plus riches ; Sisinnius, Patriarche de Constantinople, s’y opposa, mais en vain. Après lui le mal devint encore plus grand ; on donna toutes ces maisons grandes & petites, riches & pauvres ; celles des femmes comme celles des hommes ; & on les donna même à des Laïques & à des gens mariés ; que dis-je ? à des Gentils, & quelquefois deux à une seule personne. Jean d’Antioche, qui rapporte tout ceci dans un traité qu’il a fait contre cet abus, & que M. Coutelier a publié dans ses Ecclesiæ Græcæ Monumenta, T. I, p. 159, rapporte la formule de ces donations, par laquelle il paroît qu’on donnoit ces maisons à vie, & quelquefois pour deux personnes, c’est-à-dire, qu’on donnoit aussi quelquefois la survivance à l’héritier, ἐπὶ ὀ ξώης σου ἢ ἐπὶ δύοις προτώποις. Voyez ce discours de Jean, ch. VIII, IX, X.

CHARISTIES. s. f. pl. Fêtes que les Romains célébroient le 11e des kalendes de Mars, c’est-à-dire, le 19e Février. Voyez Caristies.

☞ CHARITABLE. adj. m. & f. C’est en général celui qui a de la charité pour son prochain. Voyez Charité ; & plus particulièrement celui qui est prompt à l’assister, soit par ses aumônes, soit autrement ; & en parlant des choses, il signifie ce qui part d’un principe de charité. Erga inopes liberalis, benignus, beneficus. On ne peut être bon Chrétien si on n’est fort charitable. Les hommes appellent charitables ceux qui flattent leurs défauts, parce qu’ils ne sauroient convenir qu’on les puisse découvrir avec justice. Port-R. On se fait un devoir extérieur de l’aumône, on la donne comme riche, & non pas comme charitable. Flech. Il ne faut pas s’autoriser dans l’indiscrétion d’un faux zèle, ou dans le plaisir malicieux de censurer son prochain, sous prétexte de donner un avis charitable & fraternel. De Vill. Je suppose qu’un Moine est toujours charitable. La Font. Il y a un livre du Médecin & de l’Apothicaire charitable, qui enseigne à faire les remèdes à la maison, en faveur des pauvres : il est du sieur Guibert.

CHARITABLEMENT. adv. D’une manière charitable. Amicè, benevolè, amanter, studiosè. Dans cette Abbaye, en cet Hôpital, on reçoit charitablement tous les passans. Il faut corriger charitablement son prochain. Arn.

CHARITATIF. adj. m. Terme du Droit Canonique, qu’on joint toujours avec don ou subside. On appelle subside charitatif, un secours modéré que le Concile accorde à l’Evêque lorsqu’il se trouve dans quelque urgente nécessité. Impensum Episcopo egenti subsidium. Par exemple, quand ses revenus ne suffisent pas pour se trouver à un Concile, &c.

CHARITÉ, s. f. L’une des trois vertus théologales, & celle qui est principalement recommandée aux Chrétiens. Charitas. ☞ Les Théologiens la définissent, une vertu Théologale par laquelle nous aimons Dieu de tout notre cœur, & notre prochain comme nous-mêmes. Ainsi la charité a deux objets matériels, comme on parle dans l’école, sur lesquels elle s’exerce, Dieu & le prochain. On doit aimer Dieu par dessus toutes choses ; on doit tout faire, tout sacrifier, tout entreprendre, tout souffrir pour Dieu, & être prêt à cela. La charité, nous met habituellement dans cette disposition. La charité nous fait aimer Dieu pour lui-même, & le prochain pour Dieu. La charité nous fait aimer le prochain comme nous-mêmes, c’est-à-dire, qu’elle nous le fait aimer véritablement & sincèrement comme nous nous aimons nous-mêmes, mais ce n’est pas à dire qu’on soit toujours obligé à faire pour le prochain tout ce qu’on fait pour soi-même ; ainsi dans un naufrage on n’est point obligé de donner une planche sur laquelle on se sauve, à un autre qui perira infailliblement si on ne la lui donne. Mais elle nous oblige à faire pour le prochain tout ce que nous voudrions raisonnablement qu’on fît pour nous ; & à ne lui point faire ce que nous ne voudrions pas qu’on nous fît. La charité est la plus excellente de toutes les vertus ; elle n’est pas la première, c’est la foi qui est le principe & le fondement de notre justification : mais la charité est plus parfaite, elle subsistera toujours. Dans le ciel la foi cessera par la claire vision de Dieu, l’espérance par la possession des biens que Dieu nous promet, mais la charité sera encore plus parfaite qu’elle n’étoit sur la terre.

Il y a beaucoup d’endroits dans S. Augustin qui semblent demander la charité actuelle dans toutes nos œuvres. Voici ce que le P. Amelot a remarqué sur cette question dans son Abrégé de Théologie, p. 547. Les plus éclairés d’entre les Docteurs & les plus ardens pour la doctrine de Saint Augustin, comme Estius, Sylvius, Sinnichius, Bannès & tous les Disciples de Saint Thomas, ne croient pas que l’amour actuel de Dieu soit toujours commandé ; & quelque zélés qu’ils soient pour la charité, ils se règlent par Saint Thomas, qui n’a pas craint de dire dans sa Somme, que nous ne péchions point contre le précepte qui nous oblige de rapporter toutes nos œuvres à la gloire de Dieu, en ne les y rapportant pas actuellement, & qu’il suffit de rapporter habituellement à Dieu notre personne, & ce qui en dépend. Non facit contra hoc præceptum quicumque non actu refert in gloriam Dei omne quod facit, sufficit ut habitualiter referat se & omnia sua in Deum. Tom. II, quæst. 88, à 1, ad 2. Le même Saint Docteur s’étoit contenté de dire que le rapport de tout ce qui est en nous à la gloire de Dieu, se devoit entendre, ou du rapport actuel, ou de l’aptitude à y être rapporté, vel in actu, in aptitudine referendi. Ce qu’Estius dit sans le reprendre, que le Cardinal Cajetan a étendu aux