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Lycidas, Médon, Pisenor, Caumas, Mermeros & Pholus.

Pline, Liv. VII, c. 5, dit en avoir vu un qui avoit été envoyé d’Egypte à l’Empereur Claude, dans du miel, & que le même Empereur avoit écrit qu’il en étoit né un en Thessalie, qui mourut le même jour. C’étoit un monstre. S. Jérôme rapporte dans la vie de S. Paul, que S. Antoine en avoit vu un ; mais ce Père doute si ce n’étoit point un spectre, ou un prestige du Démon. voyez Vossius, De Idololat. Lib. I, cap. 15.

Ce mot vient du grec κενταύρος, composé de κίντεω, pungo, & de ταύρος, taurus. Il signifie littéralement pique-bœufs. Les centaures étoient vraisemblablement de certains bergers riches en bestiaux, & qui habitoient dans les montagnes d’Arcadie. De-là vient qu’on attribue aux bergers de ce pays-là l’invention des vers bucoliques, parce qu’ils chantoient en gardant les bœufs. Palæphate, dans son Livre des Choses incroyables, raconte que sous le regne d’Ixion Roi de Thessalie, un troupeau de taureaux, qui devinrent furieux sur le mont Pélion, ravageoit tout le pays, & rendoit la montagne inaccessible. Quelques jeunes gens qui s’étoient avisés de dresser des chevaux pour les monter, entreprirent de nettoyer la montagne de ces animaux. Pour en venir à bout, ils les poursuivoient à cheval, & les perçoient à coups de trait. C’est pourquoi on les nomma Centaures ; c’est-à-dire, perce-taureaux. Cet heureux succès les rendit insolens, en sorte qu’ils insultoient les peuples de la Thessalie, qu’on appeloit alors les Lapithes : & comme ils prenoient la fuite lorsqu’ils étoient attaqués, la rapidité avec laquelle ils se retiroient, fit juger qu’ils étoient demi-hommes, & demi-chevaux.

☞ D’Ablancourt s’est servi de ce mot au féminin, en parlant de la femme d’un Centaure. D’autres disent Centaurelle. Mots peu usités.

Centaure, est aussi le nom d’une constellation méridionale, qui comprend 37 étoiles, 6 de la 2e grandeur, 7 de la 3e, 16 de la 4e & 8 de la 5e. Ce qui rend le pied le plus oriental du centaure plus brillant que l’autre, c’est qu’il y a dans cette partie de cette constellation deux étoiles fort proches l’une de l’autre.

Centaure dans l’Histoire, est le nom d’un peuple de Thessalie. Les Centaures habitoient le pays qui est au pied du mont Pélius : c’étoit une nation grossière & féroce. On les représentoit demi-hommes & demi-chevaux, parce qu’ils furent les premiers parmi les Grecs qui domptèrent des chevaux, & qui apprirent aux Grecs à combattre à cheval.

CENTAURÉE. s. f. Centaurium, ou plurôt centaureum ou centaurea : Plante qui a pris son nom du Centaure Chiron, qui fut guéri, à ce que l’on prétend, d’une blessure qu’il avoit au pied, par l’usage de cette herbe. On distingue la grande & la petite Centaurée, non par rapport à leur grandeur seulement, mais encore par rapport à leur caractère, qui est bien différent dans l’une & dans l’autre.

La grande Centaurée, Centaureum majus, est de la famille des plantes dont les fleurs sont des fleurons réguliers, soutenus chacun par une semence aigretée, & ramassés plusieurs ensemble en une tête ou bouquet arrondi ou écailleux. On ne distingue la jacée d’avec cette plants, que par les têtes, qui sont plus grosses dans celle-ci, & plus petites dans celle-là. Les espèces de grande Centaurée sont pour la plupart de grandes plantes : les plus connues sont celles qui portent des fleurs purpurines, des feuilles découpées en segmens fort larges, dentelées, & qu’on compare aux feuilles du noyer. Centaureum majus, folio in plures lacinias diviso. C. B. Pin. ou Centaureum majus, juglandis folio J. B. Ses racines sont assez grosses, & marbrées comme celles du rhapontic. Aussi l’a-t-on fait passer, de même que les espèces suivantes, pour le rhapontic. La seconde espèce a ses feuilles découpées en segmens plus menus & plus étroits : & ses fleurs sont jaunâtres. Centaureum Alpinum, luteum. C. B. Pin. Ces deux espèces viennent en Italie sur le mont Baldo, & dans les Alpes. On cultive dans les jardins des curieux une troisième espèce semblable à la seconde par la couleur des fleurs, & par les découpures profondes des feuilles ; mais celle-ci qui vient d’Afrique a une odeur douce, & ses feuilles sont plus amples, découpées en segmens plus menus & plus arrondis. Centaureum majus, laciniatum, Africanum. 5, R. Par. App. La quatrième espèce vient dans les Pyrénées : ses feuilles ressemblent à celles de l’artichaut, mais elles sont plus vertes en dessus ; ses têtes sont fort grosses, & ses fleurs sont purpurines, Centaureum foliis Cinaræ. Corn. La cinquième a ses feuilles entières, longues, blanches en dessous, & verdâtres en dessus, & pareilles à celles de l’aunée. Ses tiges ne sont point branchues, ni si hautes que dans les précédentes : elles sont cependant garnies d’un plus grand nombre de feuilles à proportion, & leurs têtes sont aussi beaucoup plus grosses, écailleuses, & leurs fleurs sont purpurines. Ses racines sont plus charnues, & marbrées comme dans les premières espèces ; ce qui les fait prendre pour du rhapontic. On trouve cette dernière espèce à feuilles larges & à feuilles étroites, dans les Alpes. Centaureum majus, folio helenii incano, Centaurium majus, folio helenii angustiore. Inst. R. Herb.

La petite Centaurée, Centaureum minus, C. B. Pin. Elle a des fleurs en forme de tuyau évasé en devant, & découpé profondément en plusieurs parties. Son fruit est ovale, ou cylindrique, divisé en deux cellules remplies de semences menues. L’espèce la plus commune & la plus usitée, a sa racine petite, blanchâtre, ligneuse & insipide. Elle donne d’abord quelques feuilles couchées sur terre, qui sont vertes, arrondies, & longues d’un pouce environ. Du milieu de ses feuilles s’élève une tige branchue, anguleuse, haute d’un pied ou environ, garnie de feuilles lisses, vertes, opposées, plus petites que celles du bas, chargées de trois nervures qui parcourent toute leur longueur ; les extrémités des branches sont terminées par des bouquets de fleurs purpurines, dont les pédicules sont courts, & les calices verts, étroits, à cinq découpures fort aiguës. Chaque fleur est un tuyau étroit, évasé & découpé en cinq quartiers ordinairement. Ses étamines sont au nombre de cinq, & leurs sommets sont jaunes. Les fruits qui succèdent à ses fleurs sont cylindriques, grêles, divisés en deux cellules, qui renferment des graines menues comme du sable. Toute la plante est extrêmement amère ; d’où vient aussi que Pline & d’autres Anciens l’on nommée Fel terræ, Fiel de terre. Sa qualité fébrifuge lui a fait encore attribuer le nom de Fébrifuge par excellence.

Les Médecins emploient la petite Centaurée dans presque toutes les occasions où ils reconnoissent que les amers seront utiles, & lorsqu’ils veulent chasser la fièvre. Ils ordonnent par pincées les semences bien fleuries de cette plante, dans les infusions purgatives, apéritives, fébrifuges & altérantes. Le sel de petite Centaurée est pareillement fébrifuge. La petite Centaurée entre dans la thériaque. Galien faisoit tant de cas de cette plante, qu’il a compose un livre entier, où il a ramassé toutes les propriétés que les Anciens lui avoient attribuées, & tout ce qu’il en avoit observé lui-même.

Il y a quelques autres espèces de petite Centaurée qui pourroient être employées comme celles-ci : telles sont la petite Centaurée à fleurs disposées en épi, Centaureum minus, spicatum, C. B. Pin, qu’on trouve en Languedoc ; & la petite Centaurée à fleurs jaunes, plante différente des précédentes par ses feuilles qui sont glauques, arrondies, & jointes ensemble de telle manière, qu’il semble que les tiges & les branches les enfilent, Centaureum luteum, perfoliatum. C. B. Pin. On trouve cette plante assez fréquemment à la campagne dans des endroits humides. Ses fleurs ne sont point si alongées en tuyau, & sont découpées en huit quartiers : leurs fruits sont