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CAR

donne du lait. Elle fleurit en Juillet & Août, & elle croît dans les marécages du Canada. La cardinale couleur de feu a quelquefois ses fleurs panachées de quelques lignes blanches. La cardinale bleue est décrite dans les Mémoires de M. Dodart, & celle-ci devient quelquefois blanche. Il y a une espèce de cardinale auprès de Blois, & qui est fort commune en Normandie. Elle est extrêmement âcre. On la trouve aussi près de Fontainebleau. C’est le Rapuntium Soloniense urens.

CARDINALISER. v. a. Faire quelqu’un Cardinal, le créer Cardinal, lui donner le titre de Cardinal. Cardinalem facere, creare. Godeau s’est servi de ce mot dans son Histoire Eccles. L. IV. Cardinaliser quelqu’un, veut dire lui donner un titre, soit d’Evêque ou de Curé ; & de-là vient, continue-t-il, qu’encore aujourd’hui les Cardinaux ont des titres, c’est-à-dire, des Eglises dans Rome, & qu’il y a même des Evêchés dans la Métropole de Rome, qui leur sont affectés. Aujourd’hui ce mot ne pourroit paroître que dans le style burlesque. Il est entièrement hors d’usage.

☞ Rabelais s’est servi de ce mot pour dire, faire devenir rouge.

CARDINALISME. s. m. Cardinalismus. Dignité de Cardinal. C’est la même chose que Cardinalat.

Ce mot vient de l’italien Cardinalismo. Il n’est point en usage chez nous.

☞ CARDINAUX. s. m. pl. Chez les Drapiers & les Tondeurs, espèce de petites cardes de fer, remplies par le pied, & dont il n’y a que l’extrémité des pointes qui paroissent. On s’en sert pour ranger le poil & le coucher dans la tonte. Encyc.

CARDINÉE. s. f. Terme de Mythologie. Cardinea. La Déesse Cardinée étoit fille de Janus. Elle présidoit chez les Romains aux gonds des portes, cardinibus ; & c’est de-là que son nom avoit été pris. Elle s’appeloit aussi Carne. Voyez ce mot.

CARDIOGME. s. m. Picotement ou sensation mordicante à l’orifice de l’estomac, occasionnée par une humeur accrimonieuse qui incommode cette partie, ϰαρδιωγμός (kardiôgmos) ; du verbe ϰαρδιώσσω (kardiôssô), sentir une douleur rongeant à l’orifice de l’estomac. Dict. de James.

CARDON. s. m. Espèce d’artichaut, qui ne porte point de pommes, & dont la tige est bonne à manger. Tener cynaræ caulis. Des cardons d’Espagne. Les tiges des cardons sont bonnes à manger.

☞ On sème les cardons à la fin d’Avril, ou en Mai, sur couche, ou en plaine terre. On les transplante dans des trous terrotés à trois pieds l’un de l’autre. On les arrose souvent, & on leur donne deux ou trois labours par an. Quand ils sont hauts, on les lie avec de la paille, & on les butte à un pied de terre, pour les soutenir. On les fait ensuite blanchir. On peut les transporter en motte dans la serre, en les replantant dans une terre rapportée. Il y a des cardons de Tours & des cardons d’Espagne.

Cardon est aussi une espèce de crevette ou chrevette qui ne rougit point à la cuisson comme la crevette franche.

☞ CARDOUE. Ville d’Espagne dans la principauté de Catalogne, avec titre de Duché.

CARDONETTE. s. f. est le nom qu’on donne en Languedoc à la fleur d’une espèce d’artichaut qui croît à la campagne, & qui sert de presure pour cailler le lait. Voyez Artichaut.

CARDOUZILLE. s. f. Petite étoffe de laine sans soie.

CARDUEL. Pays de l’Asie. C’est une partie de la Géorgie propre : il confine avec les Tartares du Daghestan. Ce pays a eu titre de Royaume. Maty.

CARE ou CARRE. s. f. Vieux mot, qui signifioit autrefois visage, car on disoit, il a la câre vieille : il venoit du vieux mot espagnol cara, qui signifioit la même chose. Vultus. On dit même encore acarer & acaration, pour dire, confronter, & confrontation, en plusieurs Provinces, & sur-tout en celles au-delà de la Loire.

Care s’est dit aussi de la taille ou de la mesure qui est entre les deux épaules. Humeri. Cette femme a la care belle.

Care se dit en ce sens, en parlant des habits qui couvrent cette partie du corps, d’un corps-de-jupe, d’un pour-point ; & signifie la coupe & la taille derrière le dos. Il faut retailler la care de ce corps-de-jupe. Tout cela est vieux.

CARE ou CARUS. s. m. Terme de Médecine. C’est une espèce d’affection soporeuse, qui n’est pas si forte que l’apoplexie, mais qui l’est plus que la léthargie. Le care dégénère souvent en aploplexie.

CARÉLIE. Province de Suède dans la Finlande. Carelia. La Carélie est entre le golfe de Finlande, & les Provinces de Nynlande, de Tavasthie, de Savolanie, & de Kexhomie. La capitale de Carélie est Wiborg. Maty.

☞ CARELL, CAREILL, CRAOL ou CRAIL. Petite ville d’Ecosse, dans la province de Fife, sur la côte, fameuse par la bataille qui s’y donna en 874 entre le Ecossois & les Danois.

☞ CARELSCROON ou CARLSCROON. Ville de Suède, dans la Belkingie, sur la côte de la mer Baltique.

☞ CAREMBOULE. Contrée de l’Afrique, dans l’Île de Madagascar, dont elle est la Province la plus méridionale.

CARÊME. s. m. Quadragésime ; temps de pénitence pendant lequel on jeûne quarante jours pour se préparer à célébrer la Fête de Pâque. Quadragesima, quadraginta dierum jejunium. Anciennement dans l’Eglise Latine le Carême n’étoit que de trente-six jours, & ne commençoit qu’au Dimanche de la sixième semaine avant Pâque, qu’on appelle Quadragésime. Dans le IXe siècle, pour imiter plus précisément le jeûne de quarante jours que Jésus-Crhsit souffrit au désert, quelques-uns ajoutèrent quatre jours avant la Quadragésime, & cet usage a été suivi dans l’Occident ; car en ôtant les six Dimanches où l’on ne jeûne point, il reste précisément quarante jours de jeûne, à l’imitation de Jésus-Christ. Il en faut excepter l’Eglise de Milan, qui ne commence le Carême que le Dimanche de la Quadragésime.

Le Carême a été institué par les Apôtres S. Jérôme, dans son Epître à Marcella, & S. Léon, au Sermon sixième de Quadragesima, le disent expressément ; & la Règle de S. Augustin, Ep. 118, ad Januarium, & Lib. 4 de Bapt. cap. 24, a lieu en cette matière. Tout ce que l’on trouve établi généralement dans toute l’Eglise, sans en avoir l’institution dans aucun Concile, doit passer pour un établissement fait par les Apôtres. Or tel est le jeûne du Carême. On n’en trouve l’institution dans aucun Concile. Au contraire, le I Concile de Nicée, can. 5 ; celui de Laodicée, can. 49, & suivant ; le VIe Concile, can. 29, & en Occident le I d’Orléans, can. 11 ; le IVe de la même ville, can. 2 ; celui d’Agde, can. 8 ; celui d’Auxerre, can. 3, le VIIIe de Tolede, can. 9 ; le IIe de Brague, can. 9, parlent du Carême comme d’une chose générale & très-ancienne, aussi-bien que tous les Peres Grecs & Latins. Tertullien, qui vivoit sur la fin du IIe siècle & au commencement du IIIe, dans son Livre De Jejuniis, cap. 2 & 13, semble indiquer non-seulement qu’il y avoit une loi pour le jeûne d’avant Pâque, mais encore qu’elle étoit regardée par ceux même qu’il fait passer pour ennemis du jeûne, comme une institution Apostolique ; & qui plus est, comme une institution Apostolique fondée sur l’Evangile & sur la parole de Jésus-Christ en S. Matthieu IX, 15 ; en S. Marc II, 19 ; & en S. Luc V, 34. Calvin, Chemnitius & les Protestans prétendent que le jeûne du Carême s’est institué d’abord par une espèce de superstition, par des gens simples qui voulurent imiter le jeûne de Jésus-Christ. Ils prouvent ce fait par un mot de S. Irenée, cité par Eusebe Liv. V, ch. 24 ; mais Bellarmin a très-bien montré qu’il ne s’agit point là du jeûne même, mais de quelques circonstances du