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CAR

☞ On le dit aussi, en termes de guerre, du mouvement de tous les Cavaliers d’un escadron qui tournent en même temps sur la droite ou sur la gauche. Equestris in gyrum procursio.

☞ Ce mouvement diffère de la conversion, en ce que celle-ci se fait par rang, & que la caracole se fait par file.

☞ C’est aussi le demi-tour que fait le Cavalier quand il a fait sa décharge pour passer de la tête de l’escadron à la queue.

Quelques-uns disent aussi Caracol au masculin, comme Vaugelas dans l’exemple suivant : Les Thessaliens faisant promptement le caracol, revinrent à la charge. Vaug. Il n’a pas été suivi en cela ; tout le monde fait Caracole féminin.

On le dit aussi des mouvemens qu’on fait dans les montres, quand on fait le demi-tour pour défiler ou pour se faire voir plusieurs fois aux Princes, ou aux Officiers.

Ce mot est pris de l’arabe, & l’arabe de l’hébreu carac, qui signifie involvere. Mén. Mais il nous vient immédiatement de l’espagnol, où il signifie au propre un limaçon ; & au figuré, les mouvemens militaires qui viennent d’être expliqués.

CARACOLER, v. n. Faire des caracoles, ou des demi-tours en marchant. Equos in gyrum, in orbem agere. Dans un combat singulier à cheval, on a un grand avantage de se battre en caracolant. Les Cavaliers caracolaient autour, des carrosses des Dames.

CARACOLI. s. m. Métal qui vient de la terre-ferme, & dont les Indiens se font de certains ornemens qui portent le même nom. On prétend que ce métal est un composé d’or, d’argent & de cuivre, & que les Indiens ayant ces métaux très-purs, le mélange qui en résulte, est si parfait, que quelque long temps qu’il demeure dans la mer ou dans la terre, la couleur ne s’en ternit jamais. Le P. Labat n’est pas de ce sentiment : il croit que c’est un métal simple. Il dit qu’il est aigre, gréneux & cassant, & que ceux qui veulent l’employer, sont obligés de le mélanger avec un peu d’or, pour le rendre plus doux & plus traitable. Les Orfèvres François & Anglois qui sont aux îles, ont fait un grand nombre d’expériences pour imiter ce métal ; mais ils n’ont jamais pu atteindre à ce degré de beauté & de perfection. C’est presque la même chose que le tombac. Voyez Tombac.

Caracoli. s. m. Ornement que portent les Insulaires, principalement les Caraïbes. Il est fait comme un croissant qui a les pointes en haut, & porte le nom du métal dont il est composé. Les caracolis sont de différentes grandeurs, selon le lieu où ils doivent servir ; car ils en portent aux oreilles, au nez & à la lèvre inférieure ; mais le plus grand de tous, qui a six à sept pouces d’ouverture, leur pend sur l’estomac. Voyez le second tome des Voyages du P. Labat.

CARACOLLE. s. f. Plante légumineuse, étrangère, qui a pris son nom des entortillemens de sa tige & de ses branches, ou de sa fleur, qui est tournée en spirale comme un limaçon. On la met au nombre des phaséoles : elle est vivace, & on la nomme Phaseolus Indicus, Cochleato flore. Sa racine est charnue, assez grosse, en navet, & qui donne plusieurs tubercules charnus. Elle est blanchâtre au-dedans, d’un goût d’herbe, & pousse plusieurs tiges ou sarmens fouples, verdâtres, de la grosseur du doigt lorsqu’elle est vieille, & qui grimpent & s’attachent aux corps voisins. Ces tiges donnent plusieurs branches qui s’entortillent pareillement, & poussent d’espace en espace des feuilles qui sont au nombre de trois, portées à l’extrémité d’une queue verdâtre. Elles sont d’un vert foncé, plus petites que celles de nos haricots, mais à peu-près de la même figure & dans le même ordre. Ses fleurs sont légumineuses, en grappe, & beaucoup plus grandes que celles de nos phaséoles ; elles sont blanches d’abord, purpurines dans leur centre, & d’une odeur douce & fort agréable. Leur pistil devient, après que les fleurs sont passées, une gousse longue de deux pouces, arrondie, & qui renferme des semences taillées en rein. Cette plante craint l’hiver, & ne fleurit en France que sur la fin de l’été. Elle est vivace, & se peut multiplier par ses sarmens.

☞ CARACORAM. Ville d’Asie, bâtie dans le Catay par Octay-Kan, fils de Gengis Kan, après qu’il s’en fût rendu maître. Quelques-uns la prennent pour la Combala de Marco paolo, qui est Peking.

CARACORE. s. f. Galère qui est en usage dans les Iles des Moluques : elle est fort étroite par rapport à sa longueur ; & vogue avec beaucoup de vitesse. Triremis angustior. Les caracores baissent à l’avant & à l’arrière : lorsqu’il y a du vent, on y met des voiles de cuir : il y a autour du bâtiment un pont de roseaux, par le moyen duquel il flotte & vogue sur l’eau. C’est sur l’élancement de ce pont que les rameurs sont placés, comme sur une galerie ; sans ce pont, un vaisseau qui est fort étroit & aigu ne manqueroit pas de se renverser. Le navire qui portoit le Pere Xavier, étoit un de ces vaisseaux qu’on appelle dans le pays Caracores, longs & étroits comme des galères, & qui se conduisent à voiles & à rames. Bouh. Xav. L. III. La Caracore de Xavier, après avoir été sur le point d’être submergée plusieurs fois, se sauva enfin, & gagna le port de Ternate par une espèce de miracle. Id.

CARACOULER. v. n. Terme d’oiselerie, dont on se sert pour exprimer la manière de crier du pigeon. La colombe roucoule, & le mâle caracoule. Faultrier.

CARACTÈRE. s. m. Certaine figure qu’on trace sur le papier, sur l’airain, sur le marbre, ou sur d’autres matières avec la plume, le burin, le ciseau, ou autres instrumens, pour signifier ou marquer quelque chose. Caracter, nota, signum.

Caractère. Lettre de l’alphabet. Littera. Les lettres sont des caractères qui servent à marquer nos pensées. Les Egyptiens avoient des caractères hiéroglyphiques. Les Chinois ont quatre-vingt mille caractères différens. Le caractère hébreu n’a subsisté dans l’usage ordinaire, que jusqu’à la captivité de Babylone. Après le retour de la captivité, le peuple n’écrivit plus que le caractère assyrien, dont l’usage s’étoit introduit pendant la captivité. C’est l’hébreu carré, dont on se sert encore aujourd’hui. L’ancien caractère hébreu est celui qui se voit sur les médailles hébraïques, appelées communément médailles samaritaines. Plusieurs Protestans ne sauroient souffrir ce changement de caractère dans l’écriture, malgré le témoignage de toute l’antiquité ; mais ils ne disent rien de solide pour le réfuter. Voyez la Dissertation du P. E. Souciet, sur les médailles hébraïques, &c. Le caractère dont on se sert aujourd’hui communément en Europe, est le caractère latin des Anciens. Le caractère latin venoit du grec ; le grec s’étoit formé du phénicien, que Cadmus apporta en Grèce. Le phénicien étoit le même que l’ancien & le vrai caractère hébreu. Le caractère chaldéen, le syriaque & l’arabe, ont aussi été formés de l’hébreu, comme plusieurs Savans l’ont démontré, & entr’autres Postel dans son Alphabet de douze langues, & Bibliander, De Ratione Cornmuni Ling. &c. mais on peut le prouver encore mieux qu’ils n’ont fait. Grégoire de Tours, Hist. Franc. L. V. c. 44. écrit que Chilperic Roi de Soissons ajouta quatre caractères à l’alphabet françois, Ο, ψ, Ζ & Π. Les François furent les premiers qui, avec le chant Romain & l’Office Latin de S. Grégoire, reçurent la forme des caractères latins. Favyn. L’an 1091 dans un Concile provincial tenu en la ville de Léon, où présida Régnier, Moine de Cluni, Prêtre Cardinal, & Légat du Pape Urbain II en Espagne, l’usage des caractères gothiques inventés par Ulfilas fut aboli, avec défenses aux Notaires d’en user à l’avenir dans leurs écritures & actes publics ; & il fut ordonné qu’on écriroit en caractères françois. Voyez Rodrigue Xi-