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aux parties charnues. Le cancer vient cependant aussi en d’autres parties du corps molles & baveuses, & l’on a vu des cancers aux dents, au ventre, dans la partie intérieure du cou de la matrice, dans l’urètre, aux lèvres, aux narines, aux joues, à l’abdomen, aux cuisses, & même à l’épaule, comme Stolterfoth le prouve par différentes observations tirées des médecins. Le cancer se divise en cancer caché, occultus, & cancer ulcéré, ulceratus. Le premier vient, comme on l’a décrit ci-dessus. Voyez sur cela & sur toutes les circonstances, Etmuller, Chirurg. Medic. art. 4. & Carol. Musitanus Trutina Chirurgio-Physica, L. XI, c. 23. Le cancer ulcéré se connoît en ce qu’il est inégal, raboteux, plein de trous ; qu’il en sort une matière sordide, puante, gluante, & quelquefois jaune ; par la douleur insupportable qu’il cause au malade, en ce qu’il est noirâtre, horrible à voir, dur au toucher, quelquefois cependant mou ; en ce que les lèvres de l’ulcère sont grosses, enflées, rongées, rabattues en dehors ; que les veines voisines sont gonflées, variqueuses, noirâtres, & représentant en quelque sorte les pieds du cancer ; quelquefois les extrémités des veines & des petites artères sont rongées, & il en sort beaucoup de sang. Au cancer des mammelles les chairs voisines se consument tellement quelquefois, qu’on peut voir dans la cavité du thorax. Il cause une fièvre lente, un grand dégoût, & souvent des foiblesses ; quelquefois l’hydropisie suit, & enfin la mort. La cause prochaine de ce mal est un acide volatil trop corrosif, qui approche de la nature de l’arsenic, & qui se forme par le croupissement des humeurs, &c. Stolterfoth rapporte que lui & d’autres ont guéri ce mal avec du mercure, & par le moyen de la salivation. On trouve comment il s’y faut prendre dans Georg. Tromp, Disput. de Salivatione Mercuriali habita, Ienœ. Georg. Cour. Albin. Disp. habita Francof. 1689, Mich. Pantelius, De Mercurio & ejus usu medico, &c. Regiom. 1698. Etmul. Oper. tom. I. fol. 387 & seqq. & fol. 467. M. Alliot Médecin du Roi, a fait un fort bon Traité du cancer, imprimé à Paris en 1698.

Le cancer, quand il vient aux jambes s’appelle loup ; & quand il vient au visage, on l’appelle, noli me tangere. Le cancer ulcéré cause de très-grandes douleurs. Il y en a qui croient que le cancer ulcéré n’est autre chose qu’une multitude prodigieuse de petits vers qui dévorent, & qui consument peu à peu toute la chair de la partie. Dionis. Le cancer est d’un consentement unanime le plus horrible de tous les maux qui attaquent l’homme. On guérit le cancer par extirpation, quand il n’est point ouvert, & qu’il n’est encore qu’une tumeur de la grosseur d’une noix, ou tout au plus d’un petit œuf. L’amputation se fait quand le cancer occupe toute la mammelle, ou qu’il est ulcéré. Idem. Voyez Degori, dans le Trésor de la pratique de Médecine, où il rapporte, d’après différens Auteurs, quantité de remèdes pour le cancer.

CANCER de Galien. C’est un bandage à huit chefs, que Galien, Livre des Bandages, ch. 10. décrit pour bander la tête ; mais ceux qui s’en servent, ne le font qu’à six chefs. Voyez le Dictionnaire de M. Col de Villars.

Cancer, est aussi un des signes du Zodiaque, où quand le soleil est parvenu vers le 21 Juin, il est au Solstice d’Eté. C’est une constellation qui a 13 étoiles, selon Ptolomée, selon Kepler 17, & selon Bayer 35, qui sont de la nature de Mars & de la Lune : aussi le cancer est-il la maison de la Lune. Il a été ainsi nommé, à cause qu’il représente un cancre, ou écrevisse, ou que le soleil commence à reculer ou à retourner vers l’Equateur quand il y est arrivé, à la manière des écrevisses. On l’appelle aussi écrevisse, signe de l’écrevisse. Les Poëtes ont feint que c’est l’écreviffe que Junon envoya contre Hercule, lorsqu’il combattoit l’Hydre de Lerne. Hercule tua l’écrevisse, & Junon la transporta au ciel, & la mit au nombre des constellations. Le symbole du cancer est une figure composée de deux traits presque semblables au chiffre soixante neuf.

☞ TROPIQUE du Cancer. Voyez Tropique.

☞ CANCEREUX, EUSE. adj. Qui tient de la nature du cancer. Tumeur cancereuse.

CANCHE. Terme de Coutume. C’est ainsi qu’en quelques endroits on appelle un ban à vin, c’est-à-dire, le droit de vendre du vin en quelque lieu, à l’exclusion de toute autre personne.

Canche. Rivière de France, en Picardie. Elle a sa source en Artois, passe au vieux Hédin à Beaurainville & à Montreuil, puis à Etaples où elle forme un port.

☞ CANCHES. Sauvages de l’Amérique Méridionale, dans une contrée voisine de Cusco dans le Pérou.

☞ CANCHEU. Voyez Cantcheou.

CANCIONAIRE. s. m. Vieux mot. Livre des cantiques ou des chansons. Canticorum, cantilenarum Liber. Ce mot est formé du latin canticum, chanson. Il a bien l’air d’être de l’invention de Marot, qui l’a forgé, à l’imitation d’Antiphonaire, Lectionaire, &c.

CANÇON. s. f. Vieux mot, formé de deux mots latins, cantus, sonus. Chanson. Gloss. de poës. du Roi de Nav.

CANCRE. s. m. Ecrevisse de mer, d’étang ou de rivière, couverte d’une coque dure, & qui va à reculons. Cancer. Le cancre a le corps rond. Il y en a de terrestres & de marins. Ceux-ci s’appellent granci à l’égard des mâles ; & les femelles macinettes. Il y en a que Rondelet appelle mages, qu’on nomme en Italie grancevoles ; d’autres squaranchon ou granciporto, qui sont divers animaux aquatiques de même espèce, aussi-bien que les langoustes, les squilles & les écrevisses, qui ont pourtant quelque différence. La cendre des cancres de rivière, prise en breuvage avec de la racine de gentiane, & autres semblables, est un singulier remède pour les morsures des chiens enragés. Les cancres marins n’ont pas le même efficace. Le cancre, quoiqu’il vive dans l’eau, ne nage point, non plus que l’hippopotame.

Dans la guerre des rats & des grenouilles, Homère feint que Jupiter envoya des cancres au secours des grenouilles, & voici la description qu’il en fait, traduite en vieux François, par le Traducteur de sa Batrachomyomachie.

Soudain vient un renfort d’épouvantables bêtes ;
D’animaux contrefaits, de monstres à deux têtes ;
Leur échine reluit, leur dur & large dos,
Leur corps est revêtu de solides écailles ;
Leurs dents sont des ciseaux, & leurs pieds des tenailles.
Ils ont deux bras nerveux, ils ont huit pieds fourchus,
Leurs bras, leurs mains, leurs doigts & leurs pieds sont crochus.
Ils marchent de travers, & souvent en arrière.
Leur œil voit & dessous, & devant & derrière.

Voyez sur les cancres. Voss. de Idolol. L. IV, Ch. 3, 12, 17, 18, 19, 33, 37.

Il y a une espèce de petit cancre qu’on appelle Bernard l’hermite, qui est roux de couleur, qui se prend en menuisaille avec les autres poissons, & qui ressemble aux araignées. Il a deux petites cornes déliées, & deux gros yeux au-dessus, & plus bas un os environné de petits poils qui lui servent de moustaches. Il a par-devant deux pieds fourchés qui lui servent de mains, & deux derrière de chaque côté, & un tiers au milieu. Aristote & Elien disent qu’il naît tout nu ; mais qu’il se loge dans l’écaille d’un autre poisson qu’il trouve vide, & quand il grossit, il en cherche une plus grande.

Quelques-uns disent le signe du cancre, le tropi-