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mon que vient de faire le P. le Comte ! Il se bourdalise beaucoup. En voilà deux de suite de la même force. Abbé de Choisy.

BOURDALOUE. s. f. Mot qui signifie une étoffe modeste dont les femmes s’habillerent pendant quelque temps, depuis que le P. Bourdaloue eut prêché fortement contre le luxe, & la magnificence des habits.

Ce mot signifie aussi une sorte de tresse, ou d’or, ou d’argent, ou de soie, large d’environ un doigt, qui sert de cordon au chapeau, & qui s’attache avec une petite boucle de métal.

☞ On a aussi donné ce nom à une sorte de pot-de-chambre oblong ; dans ce sens il est masculin.

BOURDE. s. f. Mensonge dont on se sert pour s’excuser, ou pour se divertir de la crédulité des autres. Commentum, nugæ. Cet homme m’a fait accroire qu’il avoit sollicité pour moi, mais il m’a donné une bourde. C’est un homme qui se plaît à donner des bourdes, des baies. Tu n’es pas homme à te repaître de bourdes & de coccigrues. Masc. Il est populaire.

☞ Voltaire dans ses remarques sur le Menteur de Corneille observe que cette expression, grand donneur de bourdes, qui y est employée, est aujourd’hui un peu basse : elle vient de l’ancien mot bourdeler, bordeler, qui se signifioit que se réjouir.

☞ Les Vocabulistes, qui se piquent d’une si grande exactitude, disent que le mot de bourde signifie mensonge, défaite. Ils n’en ont pas trouvé davantage dans le Dictionnaire de l’Académie. Ce qu’on appelle bourde est une chose controuvée pour s’excuser ou pour rire de la crédulité des autres.

Ce mot vient de l’Italien burla. Ménage. Autrefois il signifioit aussi un bâton gros par le bout sur lequel on s’appuie ; une sorte de potence dont se servent les infirmes.

Bourde, est aussi un terme de Marine, qui signifie la voile que l’on met quand le temps est tempéré.

Bourde. Sorte de soude qui est très-mauvaise.

BOURDEAUX. Nos peres écrivoient plus communément Bordeaux. Mézerau l’écrit ainsi, & quelques-uns le font encore ; mais Bourdeaux est mieux aujourd’hui, & il faut toujours le prononcer ainsi, quoique communément ceux du pays prononcent Bordeaux. Burdigala, Burdegala. Ville de France, capitale de la Guyenne. Bourdeaux, situé sur la Garonne, est une des plus grandes, des plus riches, & des plus belles villes de France.

Isidore de Séville écrit que Bourdeaux prend son nom de ceux qui l’ont peuplé, & qu’il nomme Burgos Gallos, c’est-à-dire, Bourg Gaulois, ou Ville Gauloise. J’aimerois mieux le dériver à Burgo Galatico, c’est-à-dire, Bourg Faulois, ou Ville Gauloise, le nom de Bourg étant assez ancien, & dérivé de la langue grecque, & par conséquent à l’usage des Gaulois, pour signifier une forteresse, comme l’on peut voir dans Végéce, Orose, & le Glossaire de Philoxène, Burgus, Turris, πύργος De Marca, Hist. de Béarn, L. I. p. 5. Favin, en son Hist. de Navarre, L. II. p .63, croit que Bourdeaux est ainsi appelé à cause de l’assemblage des eaux tant du reflux de la mer qui remonte jusqu’à sept lieues au-dessus, que la Garonne, Gironde, Dordogne, & autres qui s’assemblent près de-là pour se jeter dans la mer ; & que c’est Burgum aquarum.

Les Berruyers, c’est-à-dire, ceux de Berry, étant trop serrés prirent le large, & laissant la rive de la Loire & leur ville capitale de Bourges, aux plus vieux, vinrent s’établir sur la Garonne, où ils bâtirent Bourdeaux, laquelle ils appelerent Bourges, Bituriges, comme la ville capitale de leur pays qu’ils voient laissée. J’ai vu une ancienne inscription dans le château Trompette qui portoit, Augusto sacrum & Genio Civitatis Biturigum viviscorum. Favyn, Hist. de Nav. p. 63. 64.

L’Archevêque de Bourdeaux dispute à celui de Bourges le titre de Primat d’Aquitaine. Bourdeaux a Parlement, Sénéchaussée, Amirauté, Bureau des Finances, Généralité, Cour des Aydes, Hôtel des Monnoies, & Université. Les vins de Bourdeaux sont estimés : on fait cas sur-tout de ceux de Grave.

De la Brousse, dans son livre sur la Primatie d’Aquitaine ; a ramassé les étymologies du nom de Bourdeaux. Selon lui Bourdeaux n’est point une colonie des Bituriges, mais des Phéniciens. Ainsi il ne peut souffrir Isidore, qui dut que Burdegalis vient de Burgi & Galli Burdegalim appellatam ferunt, quòd Burgos Gallos prumùm colonos habuerit ; quibus antea cultoribus impleta est. Cependant il conjecture qu’on pourroit changer Burgos en Brigos, ou Briges, qui sont des mots phéniciens. Car, dit-il, pourquoi plutôt Burgigala, que Brigigala ? Ensuite, parce que Riges en phénicien, selon lui, signifie Hommes braves, gens de cœur ; il soupçonne que l’Hercule Gaulois, sur-nommé Ogmius, auroit bien pu venir à Bourdeaux en allant en Espagne ; & donner son nom de brave & de courageux à cette ville ; mais, continue-t-il, les Phéniciens donnoient aux lieux les noms des fruits qui y naissoient : il se pourroit bien faire que Bourdeaux vînt de Ibura ; (il vouloit dire עבורא ibburah, chaldéen) qui signifie abondance, fertilité & de dagan, דגן qui signifie blé ; car encore aujourd’hui le pays de Médoc & celui d’entre les deux mers portent beaucoup de blé. Mais, ajoute-t-il, ne seroit-il point mieux de dire que, comme les habitans de Saintonge portoient un habit nommé bardus, les Bourdelois le prirent aussi à cause du voisinage, & de-là furent appelés Bardigalli ; comme une partie de la Gaule fut appelée Gallia Braccata, à cause des braies qu’elle portoit ? Il croit encore qu’il faut tirer ce mot Bardus de l’hébreu bardes, ou de l’arabe bord. Peut-être aussi furent-ils appelés bord, à cause de leur habileté dans la Poësie & la Musique Gauloise, ainsi que les fameux Bardes. Vinet a dit que Burdigala étoit un mot celtique. S. Jérôme, deuxième Préf. sur l’Ep. aux Galates, dit que l’Aquitaine tiroit de Gréce l’origine du nom Burdigala. Enfin, il conclut que les Romains pourtant pourroient bien être les auteurs de ce nom ; car c’étoit leur coutume de donner des mots de leur façon à tous les lieux qu’ils conquéroient, ou dans lesquels ils établissoient des colonies. Tout cela ne nous avance guère ; mais au moins c’est tout ce qu’on dut de l’étymologie de Bourdeaux.

Le même Auteur prétend que c’est Bourdeaux, & non pas Bourges, qui a eu la Primatie d’Aquitaine. Voici quelques-unes de ses raisons. Le droit de visite qu’a prétendu l’Archevêque de Bourges, n’est point un droit de Primat, mais de Métropolitain. Hincmar égale l’Archevêque de Bourges & celui de Bourdeaux, les appelant tous deux Primatum Sedium Regni Aquitanici. L’Evêque de Reims a eu le titre de Primat de sa Province avant Bourges. Le changement de Frotaire ne prouve rien : on peut passer d’un Siége à un autre qui est égal. Le Concile de Tulle a donné le nom de Primat à l’Archevêque de Bourdeaux ; cette ville étoit la capitale de la Novempopulanie ; des Evêques de Bourdeaux ont présidé à des Conciles où étoit l’Archevêque de Bourges ; savoir, au Concile d’Agde, au premier d’Orléans ; & au second de Mâcon, qui se tint en 588. Il s’ensuit que Bourges n’avoit point encore de Primatie. Voyez Bourges. Mrs de Sainte-Marthe ne sont point du sentiment de M. de la Brousse. Nous avons des antiquités de Bourdeaux par un Anonyme à Poitiers 1565. Selon MM. de l’Acad. des Sciences la longitude de Bourdeaux est 17°. 8’. & sa latitude de 44°. 50’.

Selon Picard & de la Hire,. Bourdeaux est à 16°. 46’. 33”. de longitude, & à 44°. 5’. 3”. de latitude. Voyez sur Bourdeaux, Notitia utriqûe Vasconiæ ; auct. Arn. oihenarto, De Hautesersse, Rer. Aqui M. Valio, Notitia Gall. De Sainte-Marthe, Gall. Chr. T. I. p. 195.

Bourdeaux. Bourg en France ou Dauphiné, au pied des Monts, à sept lieues de Valence.

BOURDELAGE, ou BORDELAGE. s. m. Terme de Coutume, est une redevance qu’on doit au Seigneur en argent, blé, plume ou volaille, ou de deux de ces trois choses, selon la Coutume de Nivernois. Jus exi-