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BUF

Lixiviam sacere. Elles filent & buent, & ont la cure de tout l’Hôtel. Villon s’est servi du verbe buer. La pluie nous a bués & lavés. C’est dans la Ballade de lui & de ses compagnons pendus. Ménage, Dict. Etym. au mot Buée, lessive. Ce vieux mot est encore en usage dans quelques Provinces. A Dijon, un homme maubué, est un homme en linge sale, dont on ne blanchit le linge que rarement. La langue françoise n’a point d’adjectifs qui puissent représenter celui-là. Glossaire bourguignon au mot Maubué, où l’on dit que buer est un vieux mot qui signifie mettre à la lessive. Il y a à Paris dans le Quartier de Saint Martin une rue qui s’appelle Maubuée. Ce mot est aussi dans Nicod.

BUF.

BUFFE. s. f. Vieux mot, qui signifie, Soufflet. Alapa. On le trouve dans les Pseaumes de Marot.

Qui de buffes renverses
Mes ennemis mordans.

BUFFET. s. m. Meuble qui sert pour mettre les pots & les verres, la vaisselle & autres choses nécessaires pour le service de la table. Armarium. Autrefois c’étoit un meuble de bois orné de menues colonnes, & séparé par un plancher, au-dessous duquel se mettoient les brocs & les bouteilles, & au-dessus les verres & la vaisselle. Depuis on a mis au milieu une petite armoire pour y serrer le linge, ou le couvert d’un bourgeois ; & enfin on en a fait une grande armoire avec plusieurs tiroirs & volets, l’on enferme ce qu’on a de plus précieux, & qu’on appelle aussi cabinet. Un buffet ou cabinet d’ébène, de bois de cedre, d’écaille de tortue, &c.

On a appelé autrefois un buffet, dressoir. En la Salle où il mangeoit (le Duc Philippe de Bourgogne) étoit un buffet, ou dressoir, à quatre degrés ou pans, tout meublé de vaisselle d’or ou d’argent doré, riche sur riche, aux deux coins duquel étoient deux précieuses licornes de prix indicible. Parad. p. 853.

Buffet, maintenant se dit seulement d’une table longue où l’on met la vaisselle d’argent, les verres & les bouteilles, pour le service de la table. Supellex argentaria. Il faut aller boire au buffet ; se rincer la bouche au buffet. On étale sur les buffets non-seulement les choses nécessaires pour la table ; mais aussi tout ce qui peut servir à faire paroître la magnificence de ceux qui les ont. Pourquoi faut-il que vos buffets gémissent sous le poids de tant de vases précieux que vous étalez, & qui ne servent qu’à étaler votre vanité, & à irriter celle des autres. Flech. Les Italiens le nomment crédence ; il est placé chez eux dans le grand salon, & enfermé d’une balustrade à hauteur d’appui. Les buffets des Princes & des Cardinaux sont sous un dai d’étoffe.

Buffet, se dit aussi des Officiers ou Valets qui servent au buffet. Supellectili argentariæ præpositi. Quand on croit avoir bû trente bouteilles, le buffet en a bû la moitié.

Buffet, se dit aussi de la vaisselle d’argent qu’on met sur le buffet pour le service de la table, ou seulement par parade & par ostentation. Argentim expositum. Cet Ambassadeur a un buffet de vermeil doré qui vaut cinquante mille écus.

Buffet, se dit aussi de la menuiserie d’un jeu d’orgues, & de celle qui contient chaque jeu en particulier. Le buffet du grand jeu, qu’on appelle le grand corps. Le buffet du positif ou du petit jeu. On le dit aussi de l’orgue entiére ; c’est-à-dire, le buffet & tout ce qu’il contient, tuyaux, soufflet, clavier. Quand elle est dans des maisons particuliéres, on l’appelle cabinet. Je vien d’acheter un joli buffet d’orgues.

Buffet d’eau. C’est une demi-pyramide d’eau adossée contre un mur, ou placée dans le fond d’une niche, avec plusieurs coupes & bassins qui forment des nappes.

BUFFETER. v. a. Terme de fauconnerie, qui exprime l’action de l’oiseau, quand il donne de la tête en passant contre la tête du plus fort, par exemple contre le duc ou contre l’aigle, ou contre la tête du lièvre, quand on le fait battre aux oiseaux. Le faucon a buffeté la proie.

Buffeter. Signifie encore boire au tonneau. Apposito ad dolium ore vinum sugere. Ce qui se dit des Voituriers qui percent les tonneaux avec un forêt, & appliquent la bouche contre le tonneau pour y boire.

Buffeter, est aussi un vieux mot qui signifioit, exciter quelqu’un, le tourmenter. Vexare, exagitare, colaphos impingere, incutere. De-là vient que l’on trouve encore dans les vieilles Traductions du nouveau Testament ces paroles de S. Paul : j’avois un Ange de Satan qui me buffetoit. Ce mot est venu de ce qu’autrefois on disoit buffe pour soufflet. On disoit aussi buffier & buffoier.

BUFFETEUR. s. m. Voiturier qui boit au tonneau sur les grands chemins. L’Ordonnance enjoint aux Juges de punir ces Voituriers buffeteurs, & de les condamner aux Galères.

Tous ces mots, selon du Cange, viennent de buffetagium, qui signifioit un impôt mis sur le vin bu en taverne, par corruption de buvetage.

BUFFETIN. s. m. Juste-au-corps fait de cuir d’un jeune buffle. Thorax è bubulo corio.

BUFFLE. s. m. Animal sauvage ressemblant au bœuf, mais plus long & plus haut. Bubalus. Il a la corne fort noire, & devient furieux en voyant de l’écarlate. Son corps est fort gros, & sa peau dure. Il est du reste fort maigre. Il a le poil fort court & très-noir. Il n’en a presque point à la queue, mais il en a beaucoup sur le devant de la tête, laquelle est fort petite en comparaison du corps. Ses cornes sont fort larges, son cou fort gros, & long à proportion, sa queue fort petite, & ses cuisses grosses & courtes. Le buffle aime l’eau jusques à y demeurer long-temps couché, de manière qu’il ne fait paroître que la tête hors de l’eau ; c’est de-là que les Turcs lui ont donné le nom de bœuf, ou vache d’eau, sousighit en leur langue.

Il se trouve force buffles dans le Royaume de Congo. Ils ont la peau rouge, & les cornes noires comme de la poix. C’est une bête fort dangereuse, quand quelque blessure l’a mise en furie ; sa chair est grossière ; les Portugais la coupent en tranches, la font sécher, & en nourrissent leurs esclaves. Dapper.

Le buffle n’est point le bubalus des Anciens, puisque le bubalus est un animal d’Afrique, & fort petit en comparaison de celui-ci. Ce qui a donné occasion à l’erreur de quelques-uns est la ressemblance des noms. Martial néanmoins, ou quiconque est l’Auteur du livre de l’Amphithéâtre, ou des spectacles, se sert de ce mot, pour signifier celui de buffle. Les Allemands l’appellent buffel, d’ est venu notre mot françois & l’espagnol bufano. Il y a beaucoup de buffles en Italie & en Allemagne ; ils y servent à l’agriculture, l’on en mange la chair ; mais elle est dure & mauvaise. De la Mare.

En termes de Blâson, on appelle les ’buffles bouclés, parce qu’on les représente avec une boucle. En vieux gaulois bugle signifioit un bœuf.

Buffle, se dit aussi d’un juste-au-corps fait de la peau d’un buffle, qui est fort épaisse, & qui étant bien préparée, sert d’une arme defensive. Thorax è bubulo corio. Tous ces Gendarmes avoient de beaux buffles, des colletins de buffle. ☞ On donne le nom de buffle à la peau de cet animal quand elle a été passée à l’huile comme le Chamois. Les peaux d’Elans, de bœufs & autres animaux de la même espèce, préparées comme celles du buffle, prennent le même nom.

On dit figurément, qu’un homme est un vrai buffle ; pour dire, qu’il est un stupide ; & qu’il se laisse mener par le nez comme un buffle ; pour dire, qu’il est aisé à tromper, qu’on le mène comme on veut : parce qu’on a coutume de passer un cercle de fer, ou d’autre matière, au travers des narines de cet animal, pour le mener où l’on veut