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BRU

grandeur, ou couleur de leurs fleurs. La Brunelle est vulnérable, fort vantée pour l’esquinancie & les autres maladies de la gorge, & pour celles du poumon.

Brunella vient du mot allemand Die braune, qui signifie certaines maladies de la gorge pour la guérison desquelles on se sert avec succès de la brunelle commune.

BRUNET, ETTE. s. Diminutif de brun. Qui est un peu brun. Subniger, subaquilus. C’est une beau brunet. Il aime une petite brunette. Il est aussi adj. On trouve dans une vieux Poëte :

Bergères brunettes font rage,
Et laissent aller de courage,
Bien souvent le chat au fromage.

Brunette, étoit aussi autrefois une étoffe fine, de couleur presque noire, dont les gens de qualité s’habilloient. Pannus subniger, & dont on a conservé la mémoire dans ce vieux proverbe :

Aussi bien sont amourettes
Sous bureau, que sous brunettes.

Cette étoffe étoit belle & précieuse. Le bon Roi, (saint Louis, depuis qu’il eut pris la croix,) ne voulut plus dès-lors vêtir d’écarlate, ni de brunette, ni de vert, (l. vair) ni couleur qui fût de grandes apparence, & vêtoit robes de camelin, de brun, ou de pers. Anonyme, Vie de S. Louis.

Brunette. s. f. Terme de Musique. Petit air champêtre, naturel, joli, d’un goût délicat. Agrestis cantiuncula. Il y a des recueils de Brunettes. Et toutes ces brunettes, tous ces jolis airs champêtres qu’on appelle des brunettes, combien sont-ils naturels ? Anon. Hist. de la Musiq.Ces branles, ces brunettes sont doublement à estimer dans notre Musique, parce que cela n’est ni de la connoissance, ni du goût des Italiens, & que les tons aimables & gracieux, si finement proportionnés aux paroles, en sont d’un extrême prix. Car sur des paroles champêtres, comme sur des paroles héroïques, en petit, tout comme en grand, la justesse d’expression a son mérite. Id. M. Dandrieu, dans ses principes de l’accompagnement du clavessin, a donné des brunettes bien choisies, & gravées sur dix-huit planches. Il a préféré les brunettes à toute autre sorte de Musique, parce qu’elles conviennent parfaitement à son dessin. Ce sont de petits airs auxquels la naïveté & la délicatesse tiennent lieu des graces de la nouveauté.

La brunette est une petite chanson amoureuse, qui est ordinairement à plusieurs couplets, dont l’air est familier, & qui a souvent un refrin. Les brunettes ont beaucoup de rapport aux vaudevilles, mais elles sont plus sages. On voit des brunettes dans les Opéra. L’Auteur d’une lettre sur la Musique de Lully, dit que les paroles d’une brunette sont pleines de sentiment ; que ce sentiment est soutenu par l’expression du chant, que ce chant a un caractère d’ingénuité, de naturel, qui charme encore quelques personnes, bien plus que tout l’art & tous les apprêts des chants nouveaux.

Brunette. Terme de Conchyliologie. C’est le terme vulgaire dont se servent les Hollandois, pour désigner un cylindre ou rouleau, imitant le drap d’or. C’est un fort beau rouleau marqué de taches brunes. Traité de Lithologie & Conchyliologie.

BRUNIR. v. a. Rendre brun. Obscurare, fuscare. Il faut brunir davantage le fond de ce tableau. On mêle les couleurs vives avec les sombres pour les brunir. Brunir est aussi neutre, & signifie devenir brun. Ce garçon étoit fort blond autrefois, mais avec l’âge il a bien bruni.

Ce verbe est quelquefois réciproque. Les cheveux de cet enfant étoient blonds ; mais ils commencent à se brunir. Acad. Fr.

Brunir, se dit aussi, en termes de Chasse, lorsque les cerfs, après avoir frayé, vont teindre leurs bois aux charbonnières, ou aux terres rougeâtres, afin de leur donner de la couleur. Tingere. Salnove dit la même chose des daims & des chevreuils. Et selon lui, brunir, c’est quand le cerf, le daim ou le chevreuil, fait changer de couleur à sa tête, qui de blanche qu’elle étoit, après avoir ôté la peau velue qui la couvroit, la fait venir rouge, grise, ou de couleur brune, selon les terres où il la frotte.

Brunir, est aussi un terme de Relieur. Il signifie, éclaircir, polir la tête, la queue & la tranche d’un livre, à force de froter dessus avec la dent de loup. Polire, expolire, lævigare, lævare. Brunir un livre sur tranche.

Brunir, signifie aussi polir un corps, non pas en l’usant, mais en abattant les petites éminences qui sont sur sa surface par le moyen du brunissoir. On le dit de l’or & de l’argent ; cela se fait avec la dent de loup, la dent de chien, ou la pierre sanguine, le tripoli, le bâton de bois blanc, & la potée d’émeri. On dit de l’or bruni, de l’argent bruni, pour l’opposer à l’or & à l’argent mat : c’est celui qu’on a extrêmement poli pour lui donner de l’éclat. Aurum, argentum politum, lævatum, lævigatum. Les bordure d’or bruni paroissent plus que les autres. Les Serruriers disent aussi brunir le fer, quand ils le polissent avec leurs brunissoirs.

BRUNI, IE, part. & adj. Politus, lævatus, lævigatus, levatus, ou levigatus.

BRUNICHILDE. voyez Brunehaut.

BRUNISSAGE. s. m. Ouvrage de Brunisseur. Politura. Il faut tant pour le brunissage de la vaisselle.

BRUNISSEUR. s. m. Artisan qui brunit la vaisselle d’argent. Politor.

BRUNISSOIR. s. m. ☞ Outil dont se servent presque tous les ouvriers qui emploient le fer, l’or, l’argent, l’acier, l’étain, pour donner de l’éclat à leurs ouvrages. Il y en a de différentes façons & de différentes matières suivant les ouvrages. Pour les métaux, ils sont ordinairement d’acier. Ferrum metallis poliendis comparatum. On passe le brunissoir tant pour souder l’argent, que pour le brunir. Boiz. Il sert aux Graveurs d’un côté à brunir & polir, de l’autre à racler. Il y a aussi des brunissoirs qui ont un bout garni de sanguine. Les Serruriers ont aussi des brunissoirs pour polir le fer. Les uns sont droits, les autres crochus, pour polir les anneaux des clefs ; il y en a d’autres qui sont demi-ronds, pour étamer avec l’étain.

☞ Le brunissoir passe fortement sur les endroits de la surface de l’ouvrage qu’on veut rendre plus brillant que les autres, produit cet effet en achevant d’enlever les petites inégalités qui s’y trouvent. ainsi de quelque matière que l’on fasse le brunissoir, cet outil n’emporte rien de la pièce, & doit être plus dur qu’elle.

BRUNISSURE. s. f. Terme de Chasse, qui se dit de la pollissure des têtes de cerfs, de daims, de chevreuils. Cervini cornu nitor, lævor.

☞ BRUNITURE. s. f. Se dit, en Teinture, de la manière d’éteindre l’éclat d’une couleur, afin de la réduire à la nuance qu’on veut, sans toutefois la faire changer d’espèce. Encyc.

BRUNO, BRUNON. s. m. Nom d’homme. Bruno. Ce mot peut passer pour irrégulier dans notre langue ; car l’usage est que les noms qui en latin se terminent en o, se terminent en françois en on, comme Caton, Varron, Cicéron, Corbulon, Strabon, Labéon, Othon, Parménion, Didon. C’est la remarque de M. de Vaugelas, p. 72 de l’édit. in-4o. Néanmoins dans ce nom ci on dit plus souvent Bruno que Brunon. Bruno ou Brunon, frere de witikind, Roi des Saxons. Bruno ou Brunon, Bénédictin du onzième siècle, Auteur de l’histoire de la guerre que l’Empereur Henri IV fit à Magnus & Herman, Ducs de Saxe. S. Bruno ou S. Brunon, Evêque de Segni. Brunon, Evêque d’Angers, on dit aussi quelquefois Brun pour Brunon. Bruno