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BON

les Minimes de Vincennes. Quelques-uns disent que les Minimes en général ont été appelés Bons-Hommes, à cause que le Roi Louis XI appeloit S. François de Paule leur fondateur le bon homme. Voyez l’Hist. de Sablé de Ménage.

Les Hérétiques Albigeois se faisoient aussi appeler Bons-Hommes ; ou du moins des Hérétiques qui étoient dans la Province de Toulouse, lesquelles furent condamnés par un Concile, ou plutôt Sentence arbitrale donnée en l’an 1176, entre les Catholiques & les gens de guerre qui les soutenoient, & qui étoient dans Lombers, ville aujourd’hui détruite, à cause de la rébellion de ses habitans. C’est tout ce qu’en dit Catel, Hist. de Langued. Liv. II, pag. 350. Homines boni. Ces prétendus Bons-Hommes, interrogés par Gaucelin, Evêque de Lodève, l’un des Juges qui avoient été choisis, répondirent qu’ils ne recevoient point la loi de Moyse, ni les autres livres de l’ancien Testament, mais seulement le nouveau ; qu’ils n’exposeroient point leur foi, s’ils n’étoient forcés, mais qu’on ne devoit point y être contraints. Ils refuserent de répondre sur le Baptême des enfans, & sur l’état du mariage. Ils dirent que tout homme de bien, tant clerc que laïque, consacroit le Corps de Notre Seigneur ; qu’il suffisoit aux malades de se confesser à qui ils voudroient ; que la confession seule suffisoit ; que S. Jacques ne parloit que de cela, & nullement de contrition du cœur, ni de satisfaction & d’œuvres de pénitence ; qu’ils ne vouloient pas être meilleurs que cet Apôtre, ni rien ajouter du leur ; qu’on ne doit jamais faire aucun serment ; que si les Evêques & les Prêtres semblables à ceux qui livrerent Jésus-Christ à la mort ; & qu’il ne faut point leur obéir. Tous ces points montrent que c’étoit des Albigeois, c’est-à-dire, des vrais Manichéens. Les Conciles donnerent à ces hérétiques différens noms. Ils les appelerent les hérétiques Toulousains, les Ariens, les nouveaux manichéens de Toulouse, les hérétiques provinciaux, les Bulgares, & en langue gascone, vulgaris. Mais ayant comparu dans le Concile d’Albi en 1176, après y avoir soutenu les dogmes dont parle S. Bernard, & quelques-autres, ils y prirent eux-mêmes le nom de Bons-Hommes, & depuis la sentence que l’on prononça contre eux dans cette assemblée, ils furent nommés Albigeois. P. Benoît. Ils continuerent à donner le nom de Bons-Hommes aux plus parfaits d’entr’eux. Voyez le mot Parfait; Les autres s’appelerent Croyans. Voyez ce mot.

Les Bons-Hommes de Caria. C’est le nom que l’on donne aux Religieux du Tiers Ordre de S. François, établis en 1443 à Caria, bourg du diocèse de Laméga, en Portugal. P. Hélyot, T. VII. C. 36.

Les Bons-Hommes de Villar de Fradez, sont des Chanoines séculiers fondés en Portugal par Jean de Vicenze, célèbre Médecin, & Professeur des Belles-Lettres à Lisbonne. Ils furent mis en possession du Monastère de Saint Sauveur de Villar de Fradez en 1425. Ils prirent les Constitutions de S. Georges in Alga de Venise, & furent approuvés par Martin V, sous le titre de Bons-Hommes de Villar de Fradez. On les appela aussi du nom de leur Monastère, les Bons-Hommes de Villar de Fradez. Isabelles, femme du Roi Alfonse V, leur a bâti un Monastère hors des murs de Lisbonne, sous le titre de Saint Jean l’Evangéliste ; & cette Princesse, qui avoit beaucoup de dévotion à ce saint Apôtre, obtint d’Eugène IV, que cette Congrégation ne s’appelleroit plus à l’avenir du nom de Saint Sauveur de Villar de Fradez, mais de Saint Jean l’Evangéliste. Ils ne font point de vœux en Portugal. Pie V les y a obligés en Italie. Il y a aussi des Chanoinesses de cet Institut.

Bon-Hommes. Ce nom est aussi donné aux Grandmontains, ou Religieux de l’Ordre de Grandmont. P. Hélyot, T. VII. p. 414.

Bon Jour, est une fête solennelle. Dies solemnis. Faire son bon jour, c’est recevoir le S. Sacrement de l’Eucharistie. Sacro Christi corpore refici. Donner le bon jour, c’est faire un compliment à une personne pour lui souhaiter une heureuse journée. Salutem dicere. Et on dit absolument, bonjour ; pour dire, Dieu vous garde. On dit aussi, bon jour & bon an, le premier jour de l’année. Faustum diem & annim apprecari.

Quand on parle de quelque action mauvaise faite en un jour solennel, on dit, bon jour, bonne œuvre.

Bonne-heure. Dans le sens dont nous avons parlé, on dit, il y a une bonne-heure.

☞ On dit adverbialement de bonne-heure, tôt. Venez de bonne-heure. Il est de bonne-heure, par apposition à tard. Vous arrivez à la bonne-heure, à propos.

☞ On dit aussi à la bonne-heure, pour marquer une espèce d’approbation. Cela est fait, à la bonne-heure.

Bonne maison. Famille noble. Clara, illustris domus. Être de bonne maison, être d’une ancienne famille.

Faire bonne maison, en parlant de quelqu’un qui a famille, c’est mettre ses affaires en bon état. On l’a traité en enfant de bonne maison ; pour dire, on l’a bien châtié. On dit, un bon logis, en parlant d’une hôtellerie où on est bien traité.

Bonne de nage. Terme de Marine. On dit qu’une chaloupe est bonne de nage, lorsqu’elle est facile à manier, & qu’elle passe ou avance bien à l’aide des seuls avirons.

Bonne-voglie. Terme emprunté de l’italien, buona voglia, bonne volonté. On prononce comme dans olle, en mouillant les ll. Galérien volontaire ; celui qui se loue volontairement pour ramer sur une gaère, & qu’on appelle communément Marinier de rame. Ramex voluntarius. Il y avoit vingt bonnes-voglies sur cette galère.

☞ On dit adverbialement, de bonne-voglie, faire quelque chose de bonne-voglie ; pour dire, de bonne volonté. Ménage a tort d’écrire bonne vouille.

Bon mot, se dit de quelque trait sententieux, ou plaisant, d’une bonne rencontre. Acutè, ingeniosè dictum. Il y a des gens qui se piquent d’être diseurs de bons mots. M. Pascal dit que le caractère de diseurs de bons mots est un mauvais caractère. Un bon mot, dit un Auteur récent, est un sentiment vivement & finement exprimé sur les choses qui se présentent, ou une repartie prompte & ingénieuse sur ce qui a été dit auparavant. Un bon mot ne doit point rouler sur un jeu de mots, ou sur une équivoque, il faut qu’un bon mot puisse être traduit en toutes sortes de langues sans rien perdre de sa justesse. Bon mot, selon le P. Bouhours, est ce que les Anciens nommoient apophthegme, ce que les Italiens appellent motto, & les Espagnols agudeza : c’est un mot spirituel à quoi on ne s’attendoit pas, & qui renferme d’ordinaire une raillerie fine ; par exemple, une Dame Espagnole se confessant à un Prêtre qui voulut savoir qui elle étoit, & qui lui demanda son nom, elle lui répondit, Padre, mi nombre no es pecado ; c’est-à-dire, mon Pere, mon nom n’est pas un péché. L’auteur du Traité des bons mots, croit que le bon mot est différent de l’apophthegme, parce que l’apophthegme est d’ordinaire grave & instructif, & le propre du bon mot est de réjouir en instruisant, comme ce que dit Vespasien en mourant à ses courtisans, je sens bien que je deviens Dieu.

Et Martial est-il un sot ?
Non, & ses traits ont de quoi plaire ;
Mais il court après un bon mot :
Horace attend tout au contraire
Que le bon mot vienne s’offrir,
Et sans qu’il s’en fasse une affaire,
Il sait l’attirer sans courir. P. du Cerc.

Bon succès. Nom d’un faux Dieu. Voyez Bon événement.

Bon visage, signifie nom seulement un visage sain, mais