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BEN

BÉNÉDICTINES. s. f. Religieuses habillées de noir, qui suivent la règle de saint Benoît. Ordinis santi Benedicti Moniales. Elles ont un voile noir, une guimpe de toile blanche, & une grande robe de même serge que leur voiles. Il y a de simples Congrégations, il y a aussi des Prieurés & des Abbayes de Bénédictines. Le Roi nomme à leurs Prieurés & à leurs Abbayes, & leurs Prieures & leurs Abbesses sont perpétuelles. Voyez la Préface du premier siècle des Acta. SS. Ben. §. 3. p. XX. & du IIe siècle, §. 3. p. XXIII.

Les Bénédictines de Bourbourg, d’Estrun, de Messine, dans l’évêché d’Ypres, & autres en Flandre & en Italie, sont nobles. Il y a à Venise trois Monastères de Bénédictines, où l’on ne reçoit que des filles de Sénateurs & des premières maisons de la République. On les appelle Gentildonne ; en leur parlant on leur donne le titre d’Illustrissime. Saint Zacharie est le premier de ces Monastères, fondé en 819 par Ange & Justinien Patticipace. Les autres sont celui de saint Laurent, & celui de saint Côme & de saint Damien. P. Helyot, T. VI. C. 40. Les Bénédictines de l’Adoration perpétuelle furent instituées par la Mere Mectilde du S. Sacrement, touchée du récit des effroyables sacrilèges commis par les Hérétiques, contre le Saint Sacrement, dans les guerres commencées en Allemande, en 1629. Id. C. 47.

Bénédictine. s. f. Nom qui se donne à une Bulle de Benoît XII de l’an 1336, par laquelle ce souverain Pontife réforme l’Ordre de saint Benoît, & lui prescrit des réglemens.

☞ BÉNÉDICTION. s. f. En général, action de bénir, c’est-à-dire, de souhaiter quelque chose d’heureux. Fausta prædicatio. On le dit dans ce sens des prières & des vœux que font les peres & les meres en faveur de leurs enfans, sur-tout à l’article de la mort. Jacob reçut la bénédiction de son pere au lieu d’Esaü.

☞ On le dit de même des prières qu’on fait pour les Princes, pour les bienfaiteurs, & des souhaits qu’on fait pour leur prospérité. Ce Prince attire par ses bienfaits les bénédictions de tout son peuple. Le nom de Bourbon est en bénédiction à tout le monde ; c’est un nom pour lequel tout le monde fait des vœux.

Bénédiction, signifie aussi abondance, les faveurs, les grâces que le Ciel accorde. Divinum beneficium, cœleste munus, donum. Celui qui seme avec bénédiction, moissonnera avec bénédiction, avec abondance. Vous remplirer tout animal de bénédiction, de l’abondance de vos biens. Jacob après avoir été éprouvé, reçut mille bénédictions de Dieu. L’abondance des fruits est une bénédiction céleste.

Bénédiction, signifie aussi louange à Dieu, remerciment de ses grâces. Laus, gratiarum actio. Les Martyrs donnoient à Dieu mille bénédictions dans leurs souffrances.

☞ Les Hébreux entendent aussi souvent par le nom de bénédiction, les présens que se font les amis, sans doute parce qu’ils sont accompagnés de bénédictions, c’est-à-dire, de vœux & de complimens de la part de ceux qui les donnent, & de remerciment de la part de ceux qui les reçoivent. Voyez Gen. XXXIII, 2. Josué, XV, 19, &c.

Bénédiction, est aussi une cérémonie ecclésiastique qui se fait pour rendre une chose sacrée ou vénérable. Consecratio.

L’esprit de piété a introduit dans l’Eglise Catholique des bénédictions pour rpesque toutes sortes de choses. On trouve des bénédictions dans le Pontifical Romain, dans le Missel Romain, dans le livre des cérémonies ecclésiastiques, imprimé du temps de Léon X, & dans les Rituels & les Cérémoniaux de différentes Eglises, que l’on trouve ramassés dans l’ouvrage du P. Martène sur les rits & la discipline de l’Eglise. Il y en a pour les cierges, pour les rameaux, pour les cendre, pour les vases & les ornemens sacrés, pour les drapeaux, pour les armes, pour l’Agneau pascal, pour les fruits & les biens de la terre, pour une maison, pour un navire, pour les œufs à la fête de Pâques, pour une Abesse, pour des nouveaux mariés, pour des fonts, pour des cloches, pour l’eau bénite, pour le pain bénit, pour le cilice de ceux qui font la pénitence publique, pour un cimetière, &c. Autrefois on faisoit la bénédiction des fruits nouveaux durant la Messe après la consécration, & après cette bénédiction qui finissoit par les paroles ordinaires per Christum Dominum nostrum, on ajoutoit la prière qui commence par ces paroles : Per quem omnia, Domine, semper bona creas, &c. Voyez le Cardinal Bona, & Dom Luc d’Acheri, le Glossaire de M. du Cange, où l’on trouve toutes les espèces de bénédictions qui ont été en usage, & celui des Macri.

En général ces bénédictions se font par des aspersions d’eau bénite, des signes de Croix, & des prières conformes au sujet de la cérémonie. Quand il y a onction, cela s’appelle Consécration : ainsi on consacre le calice, & on bénit le ciboire, parce qu’on emploie l’onction pour le calice : dans l’usage ces mots se confondent quelquefois. M. Fléchier, Evêque de Nimes, en faisant la bénédiction des drapeaux d’un Régiment Suisse, prononça un fort beau discours par rapport à cet usage de l’Eglise, & à la destination de ce Régiment, que le Roi envoyoit combattre les Fanatiques des Cévènes.

Bénédiction, se dit plus particulièrement du signe de la Croix que font les Prélats & autres Supérieurs en plusieurs occasions. Sublatâ manu figuras Crucis exprimere, & bene precari. Les Evêques en passant dans les rues, dans l’Eglise donnent leur bénédiction au peuple. Autrefois quand les Evêques alloient par la ville, & lorsqu’ils passoient par les bourgs & villages, on sonnoit une petite cloche pour avertir le pleuple de venir recevoir leur bénédiction. Quand ils alloient à la Cour, ils ne s’en retournoient point qu’ils n’eussent donné la bénédiction au Roi. Voyez le P. Thomassin, Discip. de l’Egl.. Il est fait mention de cette bénédiction des Evêques dans Théodoret, Hist. Eccl. L. IV. C. 5, & dans Evagrius, L. IV, C. 34, comme M. de Valois l’a montré. On donne la bénédiction à la fin de la Messe. La bénédiction du S. Sacrement se donne au Salut quand on le resserre. Ipso Christi corpore figuram Crucis effingere.

L’usage de donner la bénédiction au peuple en étendant les mains, & en prononçant des paroles qui expriment les souhaits que l’on fait, est très-ancien. Il en est parlé dans S. Ambrois, de Pœnit. L. I, C. 7, & S. Jérôme Ep. ad. Eust. Dans les anciennes liturgies grecques, dans les Conciles d’Agde, d’Orléans, dans le quatrième de Toléde. Walfridus, Bernon, Burchard, en font mention. Jean-Bap. Scortia Jésuite, croit avec S. Isidore, Jansénius de Gand, & plusieurs savans interprètes de l’Ecriture, que cette coutume est venue des Juifs. Jansénius dit, dans son commentaire sur l’Ecclésiastique, que les Prêtres chez les Juifs donnoient la bénédiction en élevant les mains, & en les portant en forme de croix vers les quatre parties du monde ; & Galatinus prétend que la bénédiction se faisoit avec le nom ineffable יהוה, Jehova, à quoi répond dans la religion Catholique l’invocation d’un seul Dieu en trois personnes, le Pere, le Fils, & le saint Esprit. On peut voir Levit. IX, 22, au Liv. des Nomb. VI, 23, 24, 25, 26. Exod. VIII, 9, Luc XXIV, 50.

La bénédiction de la table, des viandes, & des choses que l’on boit, en faisant le signe de la Croix dessus, est une très-ancienne coutume, comme il paroît par S. Grégoire, dans la vie de S. Benoît, au L. II de ses dialogues. Le premier Traité du premier Ordre du Thalmud des Juifs est intitulé ברכות, les bénédictions, & l’on y traite des prières que les Juifs font en différentes occasions, le matin en se levant, le soir avant que de se coucher, avant, après & pendant le repas, &c. C’est là ce qu’ils appellent bénédiction.

Bénédiction Apostolique, est le salut que donne le Pape au commencement de toutes ses Bulles, en ces termes : Salutem, & Apostolicam benedictionem.

Bénédiction, est aussi une rubrique du Bréviaire, où il y a un titre des bénédictions & absolutions. Elle se fait au commencement des Leçons des Matine, en ces termes, Jube, Domne, benedicere.

On dit proverbialement, donner sa bénédiction ; pour dire, congédier, conduire quelqu’un. On appelle un pays, une maison de bénédiction, un lieu où toute richesse & prospérité abonde, une maison de bonne chère. Donner à quelqu’un des bénédictions de