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BAR

dans la langue gothique, veulent dire homme, celui qui a quelque chose de mâle, & que c’est de-là qu’est venu le mot de Baron : & Baron, selon cet Auteur, veut dire l’homme du Roi, qui est obligé de le défendre, de le servir à la guerre, de garder ses châteaux. Parce qu’on trouve farro, ou faro, ou pharro dans Grégoire de Tours, Hist. Franc. Lib. II, cap. 42 ; & Burgundiæ farones dans la Chronique de Frédegaire n. 41, où un manuscrit de la Bibliothèque de M. Colbert, & quelques éditions mettent Barons. Dom Ruinart dérive le nom de baro de faro, & faro de fara, qui signifie, dit-il, génération, branche, ligne de famille, comme il paroît par les lois des Lombards, Liv. III, tit. 14 ; & Paul Diacre Hist. des Lombards, Liv. II, ch. 9. On pourroit ajouter que fara vient de l’hébreu פרה, pharâ, qui signifie porter du fruit, & engendrer des enfans, produire, laisser lignée. Dieu s’en sert, Gen. I, 28 & IX, i, quand il ordonne aux hommes de produire & de multiplier. Mais il n’y a pas de nécessité de le tirer de si loin.

On a appelé Barons Châtelains, ceux qui avoient des châteaux. On appelle aussi Barons en France, ceux qui étoient les Pairs dans les Justices. On appelle Barons en Arragon, ceux qui ont plusieurs vassaux, qu’on nomme autrement Ricos humbres. En Angleterre, on distingue aussi des Barons par écrit, ou par brevet, & des Barons par Patentes, ou par création, par érection. Cambden rapporte l’origine de ces Barons par brevet à Henri III. Les Barons par Patentes commencerent au temps de Richard. Quelques-uns ajoutent une troisième espèce de Barons, qu’ils appellent Baron by tenure. Ce sont les Evêques, qui tiennent à titre de Baronnie quelques terres annexées à leur Evêché, & qui leur donnent séance dans la Chambre haute. Ils sont appellés les Lords spirituels. Harris, Tom. II.

On a appelé aussi Barons, les premiers Bourgeois de la ville de Londres.

Barons d’un Comté, Barones Comitatûs, en Angleterre sont les premiers vassaux d’un comté. Les Barons Aumôniers, Barones Eleemosynarii, sont encore en Angleterre les Ecclésiastiques, comme Archevêques, Evêques, Abbés ou Prieurs qui tiennent du Roi des biens d’Eglise à titre de Baronnie. Les Barons des cinq Ports dans la même île sont les cinq Barons qui demeurent dans les cinq principaux ports d’Angleterre, du côté de France ; qui sont Hasting, Dover, Hih, Rumnen & Sandwic ; & dans les bourgs adjacens, surtout à Rye, & à Winchelsey. Les Barons du Roi sont les Seigneurs de la Cour, ou ceux qui tiennent des terres immédiatement du Roi. Les Barons de l’Echiquier, sont les Juges de l’Echiquier, dont le principal est appelé le Lord Chef Baron, & les trois autres ses Assistans. Les Barons Terriers, Barones Terrarii, dans Guillaume de Puits-Laurent, sont tous ceux qui ont de grandes terres & beaucoup de fiefs. Quelques anciennes Notices les appellent Barons des Châteaux, Barones Castellorum, ou Castellenses. Barons du Parlement, sont les Lords du Parlement, qui ont droit d’y assister.

On a appelé Hauts-Barons, ceux qui tenoient une des quatre notables Baronnies de France, qui sont Coucy, Craon, Sully & Beaujeu. Les Hauts-Barons de France tenoient les terres en la même franchise que font présentement les leurs les Princes de l’Empire. Ils avoient droit de battre monnoie ; & dans les premiers temps c’étoit toujours un Haut-Baron qui présidoit au Parlement. Le Gendre. Mais il n’entend pas par Hauts-Barons seulement les quatre qu’on vient de nommer, mais les Ducs, les Comtes, & même quelques Vicomtes privilégiés.

Du Chesne dit que les Seigneurs de Montmorenci ont été appelés les premiers Barons de France.

Baron, se disoit autrefois des grands du Royaume de France. Quand le Roi tenoit les Etats, ou des Conseils d’importance, il assembloit ses Barons, qui ont changé souvent de degrés & de qualités, selon le temps & les lieux. Il falloit autrefois pour être Baron, avoir sous soi trois ou quatre Châtellenies, & trois Maladreries. La Coutume de Tours dit en l’article 71, avant qu’aucun se puisse dire Seigneur Baron, il convient qu’il ait sous lui plusieurs Châtellenies, ou deux pour le moins. Henri III, par son Ordonnance de 1579, veut que la Baronnie soit composée de trois Châtellenies pour le moins, qui seront unies & incorporées ensemble, pour être tenues à un seul hommage du Roi. On disoit autrefois par manière de proverbe, nul ne doit seoir à la table du Baron, s’il n’est Chevalier. Cela fait connoître combien les Barons étoient distingués. Voyez de S. Julien, Antiq. des Bourguign. ch. 34, & la Somme rurale de Boutillier.

On appelle communément en Espagne Baron, un homme illustre, mâle, ou vigoureux ; & quelquefois c’est un nom qu’on donne à un mari.

BARONAGE. s. m. Etat, qualité de Baron. Baronis conditio, dignitas. Ce mot ne se diroit que dans le style familier, burlesque, ou comique, & marque du mépris. Que veut ce fanfaron, avec son baronage ? en parlant d’un homme qui diroit qu’il est Baron, & qui prendroit des airs de qualité. Le Baronage d’Angleterre est une histoire de la Noblesse d’Angleterre, écrite en anglois par Guill. Dugdale.

BARONET. s. m. Diminutif de Baron. Baronettus. On appelle en Angleterre Baronet, celui que nous nommons en France Banneret. On lit dans un statut de Richard II, Roi d’Angleterre, soit-il Archevêque, Evêque, Abbé, Prior, Duc, Comte, Baron, Baronet, Chivaler de Countée, Cittizen de Citté, &c.

Chevaliers Baronets. C’est une Classe de Nobles entre les Barons & les simples Chevaliers. Jacques I, Roi d’Angleterre, institua l’Ordre des Chevaliers Baronets en 1611, & les substitua aux anciens Volvasseurs, les plaçant entre les Chevaliers & les Barons. Il ordonna qu’ils précéderoient tous les Chevaliers, excepté ceux de la Jarretière, & qu’ils auroient le privilége de charger leurs écus sous des armes d’Ulster, qui sont d’argent à une main de gueulles, à condition qu’ils défendroient la Province d’Ulster en Irlande, l’une des plus exposées aux rebelles, & d’entretenir pour cela trente soldats trois ans durant. Leur nombre fut réglé d’abord à deux cens ; mais dans la suite il augmenta. Larrey, Tom. II. p. 696. Il paroît par le statut de Richard II, que les Baronets sont plus anciens en Angleterre que Jacques I.

D’Argentré blâme ceux qui disent Baronets ; il prétend qu’il faut dire Bannerets : cela est bon pour la France, mais non pour l’Angleterre.

BARONNIE. s. f. Terme qui donne la qualité de Baron à celui qui la possède. Baronatus, Baronia. La Baronnie de Beaujollois a quatre villes & quatre-vingts villages. La Baronnie de Gentilly n’est que d’un seul village.

Baronnie a signifié quelquefois la première Seigneurie après la souveraine, ayant toute Justice, & droits mouvans de la Couronne : ce qu’on appeloit Fiefchevel ou tenu à chef. Voyez Du Tillet. Aujourd’hui c’est une dignité moindre que celle de Comte, & plus grande que celle de Seigneur Châtelain. Suivant l’ancienne définition, Baronnie est une terre où il y a toute justice, marché, Châtellenie, péage & lige ostage, meurtre, rapt, & encis. Voyez les Etablissemens de France, Liv. I. Pour ce qui est du droit de tenir Baronnie, le même Auteur dit, nus ne tient de Baronnie se il ne part de Baronnie par partte ou par frerage, ou se il n’a le don dou Roi sans rien retenir que fors le ressort & qui a marché, &c.

En Angleterre une Baronnie doit comprendre treize fiefs & un tiers de fief d’un Gentilhomme. Par le Registre de Philippe-Auguste publié par M. d’Hérouval, il semble qu’en Normandie il suffisoit de cinq fiefs pour une Baronnie. On a aussi donné ce nom à des terres que des Prélats tenoient du Roi. C’est à ce titre que les Evêques en Angleterre ont séance au Parlement. On trouve aussi que sous Edouard I. les maisons qu’occupoient les principaux Bourgeois de Londres, sont appelées Baronnies.

Le P. Ménestrier, Hist. de Lyon, pag. 284, prétend que Baronnie est aussi un terme général pour toutes

Tome I.
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