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origine moins avantageuse ? Il y avoit aussi des Bardes dans l’île de la Grande-Bretagne. Ils étoient, à ce que prétend Larrey, ce qu’étoient les Druides dans les Gaules ; c’est-à-dire, les Prêtres & les Docteurs des Celtes qui s’y établirent. Bodin, dans sa méthode, p. 365, remarque aussi qu’ils étoient Prêtres dans les Gaules ; sa raison est qu’en allemand Barde signifie Prêtre. Cependant les Bardes paroissent fort différens des Druides. Ceux-ci étoient les Prêtres & les Docteurs de la nation, & ceux-là en étoient seulement les Poëtes & les Ecrivains. Jamais les Anciens, qui en ont parlé, ne leur donnent d’autre qualité. On peut voir Posidonius dans Athénée, Liv. VI. Diodore de Sicile, Liv. V. Ammien Marcellin, Liv. XV, ch. 9. Feltus & Hésychius sur ce mot. La raison de Bodin est très-foible ; car sans que les Bardes fussent Prêtres, on a pu dans la suite donner leur nom aux Prêtres, parce que sans être sacrificateurs, ils étoient cependant ministres de la religion. Larrey ajoute, en copiant à son ordinaire les histoires fabuleuses, que les Bardes étoient comme les Druides, la postérité de Samothès fils de Japheth. D’autres les font venir de Bardus, Druide, Ve Roi des Celtes, que quelques-uns font fils de Dyris, & non pas Denys, comme a mis Larrey. Voyez Picard dans sa Celtopédie, p. 72, 73, où il dit que ce Barde l’ancien (car il y en eut un autre qui ne fut que le VIIe Roi des Gaulois) institua une Académie de Poëtes, de Musiciens, de Rhéteurs. On prétend avec plus de fondement que Larrey, que Druide étoit un nom général, qui comprenoit les Vaceres, ou Prêtres, les Eubages ou Augures, les Sarronides, qui étoient les Juges du peuple, & les instructeurs de la jeunesse, & les Bardes ou Poëtes. On croit que les Bardes demeuroient sur une montagne de l’Aunois en Bourgogne, appelée Mont-Bart, ou Montbarri, & que c’est d’eux qu’elle a pris ce nom.

Pasquier, qui écrit Bardées, sans qu’on en voie la raison, dit que des Bardées & des Druides, qui manioient & la théologie & la philosophie des Gaulois, la philosophie avoir pris sa première source & origine ; & les autres, que les Grecs même avoient emprunté d’eux leurs caractères. Il ajoute qu’une chose lui déplaît en eux, c’est qu’ils n’aient rien écrit, donnant leurs secrets de main seulement, dont, dit-il, les Grecs & puis les Romains surent fort bien faire leur profit à nos dépens.

Cluvier, Germ. Ant. Lib. I, pag. 199, donne encore aux Bardes le titre d’Orateurs, & il prétend que les anciens Germains avoient aussi leurs Druides & leurs Bardes, quoique les anciens n’en disent rien. Il se fonde sur ce que Tacite, De Morib. Germ. & Annal. II, parle de leurs poësies, & des chansons qui contenoient leurs histoires,

Bochart dit que ce mot vient de l’hébreu parat, qui signifie chanter. Chorier souscrit à cette étymologie de Bochard. Cambden dit en son Britannia, p. 14, que Barde signifie Chantre, comme nous l’apprend Festus, & que c’est un ancien mot breton tout pur. Picard, dans sa Celtopédie, p. 72, 73, prétend que cette étymologie est suspecte à quelques gens, qui croient que ce mot est grec ; qu’il est certain dans César, que les Gaulois ont parlé grec ; que βραδὺς, & par métathèse βαρδὺς, signifioit originairement un homme ingénieux, un sage ; & que c’est de-là que s’est formé Bardus ; qu’à la vérité ce mot dans la suite a pris une signification toute contraire, & s’est dit pour pesant, stupide ; mais que c’est un changement qui est arrivé à bien d’autres mots, & qui ne prouve pas que la première signification de ce mot n’a point été celle que ces Auteurs soutiennent. Mais il paroît qu’il vaut mieux s’en tenir à ce que disent Festus, Strabon & Hésychius. Il conjecture encore, p. 169, que l’habit des Bardes étoit le Bardocucullus, que tout le monde convient être un mot gaulois, & que quelques-uns disent avoir été un habillement de tête, qui avoit beaucoup de poil ; & d’autres, une robe ou habit dont les soldats & les gens de la campagne se servoient pendant la pluie.

Les chansons de ces Poëtes avoient aussi le nom de Bardes, comme les Poëtes mêmes, au rapport d’Athénée. Chorier. Selon le P. Pezron Barde est un mot pris des Celtes, qui disent bardd, pour signifier un Poëte : il veut dire aussi un devin. Barddoueg est chez eux la même chose que poesis, carmen, poësie, poëme.

Bardes, s’est dit aussi d’une compagnie de Banquiers Florentins établis autrefois en Dauphiné, sous le nom de la Compagnie des Bardes. Chorier, p. 815.

BARDESANITE, ou BARDESANISTE. s. m. Nom de secte, Bardesanistæ, Bardisanistæ. C’est le nom qu’on donne aux hérétiques sectateurs de Bardesanes. Cet hérétique étoit de Mésopotamie : d’abord il fut chrétien, & il se distingua par la connoissance qu’il avoit de la philosophie ; ensuite il renonça à la religion catholique, pour suivre les erreurs de Valentin, auxquelles il en ajouta quelques autres, comme de dire que les actions des hommes dépendent du destin. Voyez S. Augustin & S. Jean Damascène. Bardesanes laissa des Sectateurs qui s’appelèrent Bardesanistes, qui inventèrent de nouvelles rêveries. God.

☞ BADESEY, ou BARDSEY. Petite île d’Angleterre, sur la côte du pays de Galles & du Comté de Camarwan.

BARDEUR. s. m. Homme de journée qui sert dans les ateliers à porter le bar, ou la civière. Cratis bracchiatæ bajulus. Il faut dans un tel atelier tant de bardeurs, & tant de Halebardiers.

On appelle proprement bardeur l’ouvrier qui travaille dans les ateliers de maçonnerie, particulièrement quand les bâtimens se construisent avec de la pierre de taille. Les bardeurs sont employés à porter le bar, ou à traîner sur les binards les pierres, à mesure qu’elles sortent de la main du tailleur de pierre.

☞ BARDEWICK, BARDEMWIG, BARDONWIG & BARDENWICK. Bardorum vicus, Bardejucum & Barderopolis. Ancienne & fameuse ville d’Allemagne, dans la Basse-Saxe. Ce n’est plus aujourd’hui qu’un bourg à trois lieues de Lawenbourg.

☞ BARDI. Petite ville d’Italie, dans la Lombardie, au Duché de Parme.

BARDIN. Pomme de bardin ; c’est celle qu’on nomme autrement courpendu. Voyez ce mot.

BARDIS. s. m. Terme de Marine. Bâtardeau fait de planches qu’on éleve sur le bord du vaisseau, pour empêcher que l’eau n’entre sur le pont, lorsqu’on couche le vaisseau sur le côté pour caréner.

BARDIT. s. m. Chant des anciens Germains en allant au combat ; récit de certains vers. Barditus. Ils chantent en allant au combat. Ils ont encore parmi eux certains vers par le récit desquels (nommé bardit en leur langue) ils s’échauffent le courage, & de leur propre chant ils tirent un augure du succès du combat à venir. Harlay, dans Tacite, sur les mœurs des Germ. c. 3.

Il ne faut point douter que ce mot ne vienne de ce que ces vers étoient composés par les Bardes qui animoient & donnoient de l’émulation par le récit des belles actions de ceux de leur nation.

BARDOT. s. m. Petit mulet. Mulus pusillus. On dit, passer pour bardot ; c’est-à-dire, passer franc & sans payer, parce que le muletier ne paye rien pour le bardot qui le porte.

On appelle figurément bardot, dans une compagnie, celui sur qui les autres se déchargent de leur tâche.

Bardot, se dit en termes de Librairie, des exemplaires d’un livre qui restent incomplets, & auxquels on a recours pour changer ou prendre les feuilles dont on a besoin pour parfaire d’autres exemplaires moins défectueux. Il manque une feuille à ce livre, il faut voir si elle est dans les bardots, ou dans les deffets. Voyez Deffets.

☞ BARDT. Petite ville d’Allemagne, dans la Poméranie citérieure, au bord de la mer Baltique, qui y forme un port.

BAREDGES. La vallée de Baredges. Baredgina vallis. Vallée de Gascogne, dans les Pyrénées à la source de l’Adour. Baredges. Bourg dans cette vallée, célèbre par ses bains, & ses eaux minérales.

☞ BARENTIN. Bourg de France, en Normandie, au pays de Caux