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& parce qu’on ne peut pas toujours le recevoir, il étoit de la bonté de Dieu de suppléer par quelque chose à l’impossibilité de recevoir un Sacrement si nécessaire ; ce qui se fait par le Baptême de sang, & par le Baptême de feu.

Cette distinction de ces trois Baptêmes, le Baptême d’eau, le Baptême de feu, & le Baptême de sang, s’est toujours faite dans l’Eglise. Il y a parmi les ouvrages de S. Cyprien, un Traité De baptismo hæreticorum, dont nous ne connoissons point l’Auteur ; c’est peut-être S. Etienne, ou quelqu’un des Papes suivans. Cet Auteur distingue d’abord le Baptême du S. Esprit, & le Baptême d’eau. Le Baptême du S. Esprit se trouve séparé, dit-il, du Baptême d’eau dans le Centenier Corneille, qui reçut le Saint-Esprit, avant que d’avoir reçu le Baptême d’eau. Le Baptême d’eau, continue-t-il, se trouve séparé dans les Apôtres, qui avoient été baptisés long-temps avant que de recevoir le S. Esprit ; ce qui n’empêche pas que l’un & l’autre ne doivent ordinairement être joints ; le Baptême d’eau ne serviroit de rien sans celui du S. Esprit. Ensuite il explique le Baptême de sang. Il supplée au Baptême d’eau pour les Catéchumènes, & remplit ce qui manquoit au Baptême des hérétiques convertis ; c’est-à-dire, la charité, la grâce. Ce ne sont pas, dit-il, deux Baptêmes différens, mais deux matières qui concourent à donner le même salut : on peut se passer de l’un des deux. Les Catéchumènes Martyrs se passent d’eau ; néanmoins s’ils ont quelque relâche, on leur donne le Baptême d’eau. Les Fideles baptisés régulièrement se passent du Baptême de sang, &c. voilà la Doctrine de l’Eglise expliquée dès les premiers siècles, comme on le fait encore aujourd’hui. Fleury.

Le Baptême confère la grâce, & efface le péché originel, & même les péchés actuels des Adultes qui les détestent ; & ils leur sont entièrement remit, & quant à la tâche, & quant à la peine ; outre cela il imprime un caractère, &nous fait enfans de Dieu & membres de l’Eglise, en nous donnant, par les mérites de Jésus-Christ, droit au ciel, qui est l’héritage du Pere céleste. Le caractère qu’il imprime, fait qu’il ne peut pas se réitérer, quand il est valide : quand il est douteux, on le réitère sous condition.

Le Baptême ne s’administroit autrefois dans l’Eglise qu’à Pâques & à la Pentecôte, hors les cas de nécessité, d’où vient qu’on ne fait encore la bénédiction solennelle de l’eau qu’en ces deux temps-là, & qu’on parle des nouveaux baptisés dans la prière du Canon de la Messe qui commence par ces paroles, hanc igitur oblationem, propre de ce temps-là. De Launoy a fait une dissertation sur l’ancienne manière de baptiser les Juifs & les Infidelles, où il montre que la discipline ancienne n’a pas été sur cela la même dans toutes les Eglises. Il en a fait une autre sur les temps de conférer le Baptême, dans laquelle il montre qu’à Rome, & d’abord en Afrique & en Gaule, on ne baptisoit qu’à Pâques & à la Pentecôte. Les Grecs, & dans la suite les Eglises d’Afrique & d’Espagne, baptisoient aussi le jour de l’Epiphanie. En Gaule on ajouta aussi le jour de S. Jean-Baptiste, excepté en quelques Eglises, où l’on ne baptisoit qu’à Pâques. En Angleterre & en Hibernie on administroit aussi le Baptême à Pâques, à la Pentecote, le jour de Noël, & celui de l’Epiphanie.

Dans l’ancienne Eglise les Catéchumènes ne s’empressoient point de recevoir le Baptême. S. Ambroise n’étoit pas même encore baptisé lorsqu’il fut élu Evêque de Milan. Les différens motifs étoient, pour les consciences tendres, qu’on ne pouvoit employer trop de temps pour s’y préparer : & pour les autres qui ne pouvoient se dégager du monde, ils se flattoient que les eaux salutaires du Baptême effaceroient toutes leurs fautes passées ; ainsi ils entassoient tous leurs péchés, dans l’espérance d’en être purgés à l’extrémité de leur vie dans les eaux du Baptême. Les Peres déclamèrent contre cette pieuse finesse, ensotre même qu’on passa dans un autre excès, & que par un zèle ridicule & mal instruit, on administra le Baptême pour le mort.

C’est une coutume en Allemagne de faire des présens d’argent, de vaisselle d’argent, & quelquefois même de fiefs, aux enfans qu’on leve dans le Baptême. Le droit d’Allemagne est qu’on garde ces présens pour les enfans, & que les peres n’ont ont que l’usage, jusqu’à ce que les enfans soient en âge d’en disposer. On a fait un petit traité sur cela, intitulé, de pecuniâ lustricâ.

Baptême, se dit aussi d’une cérémonie ecclésiastique qu’on fait sur les cloches, lorsqu’on leur impose un nom en les consacrant au service divin. On les lave dehors & dedans avec plusieurs bénédictions & prières. Cette cérémonie est fort ancienne, parce qu’Alcuin, disciple de Bede & Précepteur de Charlemagne, qui vivoit en l’an 770, en parle comme d’un chose qui étoit en usage il y avoit long-temps. Letaldus, Moine du Xe siècle, en parle aussi comme d’une coutume ancienne, mais qui n’étoit pas encore universelle.

Baptême, se dit quelquefois pour Christianisme, Religion chrétienne en général, parce qu’il en est la porte. Ainsi, oublier son baptême, c’est oublier la religion chrétienne, oublier qu’on est Chrétien, parce que c’est le baptême qui nous fait Chrétiens. Plusieurs Indiens nouvellement convertis, n’étant ni cultivés par des instructions salutaires, ni édifiés par de bons exemples, oublierent insensiblement leur baptême, & retournerent à leurs anciennes superstitions. Bouh. Vie de Saint Xavier, L. II, p. 73.

Ce mot est grec : Βάπτισμα, lotion, ablution, du verbe βάπτιζω, je lave.

Baptême, en termes de Marine, est une cérémonie profane dont usent tous les matelots envers ceux qui passent la première fois sous le Tropique, ou sous la Ligne, ou le Détroit. Lotio, lavatio. Il y en a quelques-uns qu’on baigne dans la mer, d’autres sur le vaisseau, d’autres à qui on fait essuer quantité de sceaux d’eau que jettent sur eux les matelots, quand ils traversent leurs rangs en allant d’un bout du vaisseau à l’autre. On les fait en même temps jurer de faire la même chose à ceux qui viendront après eux.

☞ Les Officiers & les passagers se rachetent d’une si ridicule cérémonie, en donnant quelque argent à l’équipage.

☞ Un vaisseau qui n’a point encore passé en Ligne y est soumis. Le Capitaine le rechete par quelques rafraîchissemens qu’il donne aux gens de l’équipage.

BAPTEURE. s. f. Terme de Coutume. En Bresse on appelle bapreures les droits & les salaires de ceux qui battent le blé. Merces frumenta terentium, ou frumenti tritorum, ou debita pro frumenti tritura merces. Ces salaires se payent en blé, & se prennent sur le monceau, avant que le Propriétaire & le Granger, ou le Métayer, partagent. Voyez M. De Lauriere sur Ragueau.

BAPTISER. v. a. Prononcez batiser. Conférer le Baptême. Baptisare, Sacro Baptismi fonte aliquem tingere. Notre-Seigneur fut baptisé par S. Jean avec les eaux du Jourdain. On baptise aujourd’hui les enfans dès qu’ils sont nés. On baptise au nom du Pere, & du Fils & du Saint-Esprit.

Baptiser, se dit aussi de certaines ecclésiastiques qui ne sont que des bénédictions. Ainsi on dit, baptiser des cloches. Un Capitulaire de Charlemagne de l’an 789, défend de baptiser les cloches. Cependant on continua encore après de les baptiser, & le Roi Robert faisant faire en 1029, la dédicace de l’Eglise de S. Agnan d’Orléans, avec plusieurs autres présens magnifiques, y donna cinq cloches, qu’il avoit fait baptiser, & dont la plus grosse fut nommée Robert comme lui ; ce qui montre que le Capitulaire de Charlemagne n’eut pas de suite, & que la bénédiction des cloches s’appeloit Baptême ; & le Moine Helgand, qui rapporte ceci, remarque qu’on y employoit l’huile & le chrême.

☞ On dit aussi, baptiser un enfant ; pour dire, faire les seules cérémonies ordinaires du Baptême, quand l’enfant n’a été qu’ondoyé. Cet enfant n’est qu’ondoyé, il faut le porter à l’Eglise pour le baptiser.

Baptiser, signifie dans l’Ecriture, affliger, plonger dans la douleur. Les eaux sont dans le langage des Ecrivains