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BAI

BAILLISEUR. s. m. Terme de Coutume. Bajulus. Dans l’ancienne Coutume d’Amiens bailliseur est un tuteur qui a la garde, la charge, & la tutèle des enfans nobles mineurs.

BAILLISTERIE. s. f. Terme de Coutume. Traditio, administratio. Ce mot se trouve dans la Coutume de Bourgogne, (Duché) & veut dire bail & administration. De Laurière.

BAILLISTRE. s. m. Vieux terme de Jurisprudence, qui signifioit autrefois tuteur, & celui qui avoit la garde-noble, ou bourgeoise de ses enfans. Tutor pupillorum. Il venoit de baillie, signifiant tutèle, garde & administration. Dans les vieux titres, & dans la plupart des Coutumes de France, on trouve souvent le mot de tuteurs, gardiens & baillistres.

Ménage dérive ces mots de baillivus, terme de la basse latinité, qui signifie juge, qui a été fait de bajulus, qu’on a dit d’abord d’un père nourricier qui porte son nourriçon, & qui a été étendu aux Pédagogues, & sur-tout à ceux des Princes, & ensuite à un tuteur & à un juge ; & même il a été dit des maris, comme étant tuteurs de leurs femmes. D’autres le dérivent du grec βουλευτήριον, qui signifie, curia, lieu ou l’on s’assemble.

Du Cange dit que dans la basse latinité on a dit bajulare’, pour dire, officium gerere ; & bajulus, pour dire, un tuteur ; bail, baillisire, & bailliseur, & bajula, pour dire, tutèle ou baillie ; & baliivius regni, pour dire, Prince Régent.

Baillistre. s. m. & f. Blanche de Navarre, veuve en 1201, de Thibaut Ve du nom. Comte de Champagne, fut ajournée comme bailistre de Thibaut VI, son fils, né posthume, pour répondre aux prétentions de Philippe de Chypre, sa cousine, & d’Erard de Brenne son mari. Le Roy, 2e Mem. pour le D. de Sully. Baillistre en cet endroit est comme Régente, & ayant l’administration du Comté pendant le bas âge de son fils. Id.

BAILLIVAGE. Voyez Balivage.

BAILLIVE. Voyez Baillie.

BAILLIVEAU. Voyez Baliveau.

BÂILLON. s. m. Pièce de bois ou de fer qu’on met dans la bouche d’un homme, ou dans la gueule d’un animal, pour l’empêcher de crier, ou de mordre. Lignum in os insertum, linguarium. ☞ Les voleurs mettent un bâillon à ceux qu’ils volent. Dans certains couvens on met le bâillon à ceux qui ont rompu le silence.

On dit figurément & populairement, qu’on met un bâillon dans la bouche de quelqu’un ; quand on le corrompt par argent, ou par quelque autre voie, pour l’empêcher de parler, de dire ce qu’il sait d’une affaire, dont on appréhende que le secret ne se découvre.

BÂILLONNER. v. a. Mettre un bâillon à une bête, à un animal, pour l’empêcher de mordre & de faire du bruit. Lignum in os animalis inserere. On le dit aussi des hommes à qui on met un bâillon pour les empêcher de parler. L’on m’avoit dit que tel Curé, tel Bailli de village, tel paysan avoient été ésaurillés, bâillonnés par les Polaques, lesquels j’ai su depuis se porter très-bien. Mascur.

Le Père Thomassin dérive ce mot de l’hébreu balam, claudere, obturare, constringere, c’est-à-dire, fermer, boucher, serrer ; ou de בעל, bahal aussi hébreu, qui veut dire, dominari, en françois, dominer, parce qu’on se rend maître de ceux qu’on bâillonne. Quelles étymologies !

☞ BÂILLONNÉ, ÉE. part. Homme bâillonné, chien bâillonné.

Bâillonné. Terme de Blason, se dit des animaux peints avec un bâton entre les dents, comme les lions, les chiens, les cochons, &c. Pictum animal inserto in os bacillo, ou insertum in os gerens baculum.

BAILLOQUES. s. f. pl. Plumes d’autruches, mêlées naturellement de brun obscur & de blanc.

☞ Le Dict. Encyc. dit bailloques, terme par lequel les Plumassiers désignent les plumes de couleurs mêlées, blanches & noires, par exemple.

☞ BAIN. s. m. Eau ou autre liqueur dans laquelle on se baigne, c’est-à-dire, dans laquelle on se met ordinairement nu, pendant un temps convenable, soit pour le plaisir & la propreté, soit pour la santé. Lavatio. Les Médecins ordonnent souvent le bain à leurs malades. Prendre le bain dans la rivière. Se mettre dans le bain. Demeurer dans le bain pendant long-temps.

L’usage du bain a passé d’Orient en Occident : on l’a même permis aux Moines. Le Père Martène, Bénédictin, rapporte dans son Traité des anciens rits des Moines, quelques statuts que S. Lanfranc fit sur le sujet des bains qu’on permettoit aux Moines. Suivant ces règlemens, un ancien Moine devoit avoir soin que tout fût prêt au lieu où l’on devoit prendre le bain, & qu’il y eût des valets pour le servir ; ensuite il avertissoit les Moines que tout étoit prêt : ils ne pouvoient y aller que depuis prime jusqu’à complies : lorsqu’ils étoient arrivés au bain, après s’être fait raser, ils se retiroient chacun dans un petit réduit fermé d’un rideau : ils y trouvoient une cuve, qu’il appeloient tine, tina, dans laquelle ils prenoient le bain en silence. Voyez encore Acta SS. Benedict. Sæc. I, p. 612 & Sæc. IV. Part. II, Præf. p. XCVII. Dans une assemblée des principaux. Abbés de France, tenue à Aix-la-Chapelle, dans le Palais de Louis le Débonnaire, le 10 Juillet 817, il fut résolu que l’usage des bains dans les Monastères dependroit des Prieurs. Chor. Saint Grégoire, Liv. XI, ép. 3, dit qu’il y avoit de son temps des gens qui prétendoient que le bain n’étoit pas permis le dimanche ; & il répond que si on le prend par volupté, il n’est jamais permis en aucun jour, mais que si c’est par nécessité, il n’est pas défendu même le dimanche. Saint Théodore Siceote reprenoit ceux qui alloient au bain après la sainte Communion. Fleur. ☞ L’usage des bains, sans rien établir contre l’honnête bienséance, permet tous les plaisirs que la vertu ne défend point.

Ce mot bain s’est formé du latin balneum, ou balineum, que Guichard dérive de l’hébreu, tabal טבל, tingere, intingere, mergere, immergere, lavare, c’est-à-dire, plonger, enfoncer dans l’eau, laver, en retranchant la première syllabe ט ta.

Bains, au pl. se dit par excellence des eaux chaudes & minérales qu’on ordonne pour la santé. Thermæ. Les bains de Bourbon, de Vichi, &c. Aux bains d’Hiesberg en Silésie, les eaux sont sulfurées, bleuâtres, & fort puantes.

Bain, se dit encore des bâtimens destinés pour se baigner. C’étoit chez les anciens, de grands édifices qui avoient plusieurs cours, & appartemens, dont les principales pièces étoient les salles du bain, l’une pour les hommes, l’autre pour les femmes, & au milieu de chaque salle il y avoit un bassin entouré de sièges & de portiques. A côté de chaque bain étoient des cuves d’où l’on tiroit de l’eau chaude, & de l’eau froide, pour composer la tiède. Ces bains servoient plus pour la volupté, que pour la santé. C’est de ceux-là principalement qu’est vrai ce que dit Rochefort : les bains sont de l’équipage de l’amour & de la volupté. Alexandre Sev. disoit en colère, Milites Romani amant, potant, lavant. On fait marcher en même rang balnea, vina, venus.

Les plus magnifiques, & dont il reste encore quelques débris, sont ceux de Titus, de Paul Emile & de Dioclétien. On prétend qu’à Rome il y avoit 856 bains, tant publics que particuliers. Il y a eu de beaux restes de bains antiques en plusieurs villes de France, comme à Nismes & à Orange. C’étoit une grosse tout ronde, soutenue sur de grands arcs ouverts du Septentrion au Midi, y en ayant deux de chaque côté, & bâtie de grosses pierres de taille ; & plus bas à droite & à gauche, on y voyoit de longues grottes voûtées de menues pierres, avec les lieux où étoient les bains. D. l. Pise. Ces bains artificiels sont encore fort en usage dans l’Orient. Il y a un appartement au Louvre qu’on nomme les bains de la Reine.

☞ Les bains publics s’appeloient Balineæ, balneæ, balnearia. Le bain de maison particulière. Balnearium, balneum.

Bain, est aussi la cuve, ou baignoire où on se baigne. Solium, labrum. On dit en ce sens, remplir, vider