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d’un bataillon. Aller à-travers les bois, à-travers les champs. Ils marchent à-travers la bataille des Grecs. Abl. Il donne à-travers les purgations & les saignées. Mol.

AUTRE. Pronom relatif m. & f. qui marque distinction, différence entre deux choses, ou une & plusieurs. Alius, alter. Les corps célestes sont d’une autre nature que les corps sublunaires. C’est tout autre chose que ce que vous pensez.

Nicod dérive ce mot du latin alter, ou du grec ἕτερος. Le P. Pezron, Ant. des Celtes, dit que ἄλλος, altus, autre, vient des Celtes qui disent all. Mais all en Celtique signifie tout, & non pas autre.

Autre, signifie différent. Autre, est la certitude que nous avons dans les connoissances humaines ; autre est celle de la foi. Pelis. En ce sens il faut toujours le répéter deux fois, comme en cet exemple.

Autre, se dit aussi pour signifier deux choses qui vont ensemble. Sa réputation s’étend de l’un à autre pôle. Ils s’en sont allés l’un & l’autre. Dans les défilés on marche l’un après l’autre.

Autre, se dit aussi par exclusion. On a raison de ne parler d’autre chose que de son salut. Pour être savant, il ne faut faire autre chose qu’étudier.

Autre, se dit quelquefois en parlant d’une personne indéterminée. J’aime mieux que vous appreniez cela d’un autre que de moi. Tout autre que moi seroit mécontent de ce procédé.

☞ On dit dans ce sens, l’autre jour ; pour dire, un des jours précédens, sans désigner lequel.

Autre, signifie quelquefois supérieur, plus excellent. L’homme dont vous me parliez est habile, mais celui que je vous recommande, est bien un autre homme. Ce vin est bon ; mais celui qui est dans ma cave est bien d’autre vin, est tout un autre vin.

☞ Quelquefois il signifie de plus grande conséquence. Gravioris momenti. Il n’avoit qu’une fièvre légère ; le voilà attaqué d’une paralysie, c’est bien une autre affaire.

☞ On s’en sert aussi pour marquer la conformité qu’il y a entre deux personnes. C’est un autre moi-même. Alter ego. C’est un autre César, un autre Alexandre.

☞ En parlant d’un homme qui a changé de mal en bien, ou de bien en mal, on dit c’est un autre homme, tout autre homme, il est devenu tout autre. On le dit ordinairement en bonne part.

Autre, se dit en plusieurs phrases ordinaires. L’un vaut autre ; pour dire, qu’il n’y a point à choisir entre deux choses. Il y en a d’un & d’autre ; pour dire, il y a du bon & du mauvais. Je ne connois autre ; pour dire, c’est l’homme que je connois le mieux. Comme dit l’autre, c’est une citation populaire, quand on ne nomme point d’auteur. Il en fait bien d’autres ; pour dire, il a d’autres détours, finesses, malices. A d’autres ; pour dire, allez chercher ailleurs votre dupe. En voici d’une autre ; pour dire, voici un nouveau détour qu’on nous apporte, une nouvelle affaire qu’on nous fait. C’est bien un autre homme ; pour dire, c’est un homme qui est bien plus considérable. On dit que des gens sont nés l’un pour l’autre, pour dire, qu’ils sont de même humeur, qu’ils s’accordent bien. Prendre l’un pour l’autre ; pour dire, se méprendre. Je regarde cela d’un autre œil ; pour dire, d’un autre biais ; je le vois d’une autre manière. On dit qu’un homme dit d’un, & fait d’autre, quand ses actions sont contraires à ses discours ; qu’il va de côté & d’autre ; pour dire, que c’est un coureur.

☞ M. de Voltaire, dans ses Commentaires sur Corneille, en examinant ce vers des Horaces,

Autre n’a mieux que toi … fait cette remarque.

☞ Ces autres ne seroient plus soufferts, même dans le style comique. Telle est la tyrannie de l’usage : nul autre donne peut-être moins de rapidité & de force au discours.

Autre-part. adv. Ailleurs. Vous dites que vous n’avez été que là : je vous ai vû autre part, Alibi.

D’autre-part. D’ailleurs, de plus. D’autre-part on doit considérer que, &c. Prætereà.

AUTREFOIS. adv. Anciennement, ou ci-devant. Aliàs, olim. Le luxe étoit bien moindre autrefois qu’à présent. Vous m’avez dit autrefois que, &c. Ce mot se disoit autrefois, mais on ne le dit plus.

Vous cet Antiochus, son amant autrefois,
Vous que l’Orient compte entre ses plus grands Rois.

Racin.

Autrefois, signifie aussi, un autre temps. Je ne puis faire cela maintenant, ce sera pour une autrefois.

☞ Dans cette phrase, autrefois n’est pas un seul mot, comme l’adverbe dont nous parlons. Ce sera pour une autre fois. Voyez Fois.

Autrefois. s. m. Un temps passé. Tempus præteritum. On fait cet adverbe substantif, comme quelques autres.

Je vous crus autrefois, cet autrefois n’est plus.

P. le M.

AUTREHIER. s. m. Vieux mot. Avant-hier. Nudius tertius.

Ha ! quand j’oui l’autrehier, il me souvient,
Si fort crier la corneille en son chêne,
C’est un grand cas, dis-je lors, s’il n’advient
Quelque malheur bientôt en cetui règne. Marot.

AUTREMENT. adv. D’une autre manière. Aliter, alio modo, alià ratione. Il ne faut point être bourru, ni vivre autrement que les autres.

N’ayez pour vos avis aucun entêtement ;
Laissez la liberté de penser autrement. S. Evr.

Autrement, se met quelquefois pour servir de condition, ou de menace. On résigne des Bénéfices avec réserve d’une telle pension, & non autrement, ni d’une autre manière. Il faut vivre dans l’ordre, autrement on s’en repent. A l’égard des vérités chrétiennes & des promesses générales de Dieu, il faut avoir une certitude entière, parfaite, être infailliblement assuré qu’on est dans la voie du salut ; autrement ce ne seroit plus religion & foi divine, mais opinion & connoissance humaine. Peliss.

Autrement, se dit aussi pour marquer de la médiocrité. Jusqu’ici pour obtenir des licences, il ne falloit pas être autrement savant en Droit. Il n’est pas fort en usage en ce sens, si ce n’est dans le discours familier. ☞ Dans cette acception il est toujours précédé de la négative pas. Il n’est pas autrement malade, il n’est pas autrement content. Il n’est guère content.

AUTRESI. adv. Vieux mot. Semblablement, pareillement.

AUTRETANT. adj. Vieux mot. Autant.

AUTRETEL. Vieux mot. De même.

A tous disoit que sa fille erre,
Autretel disoit la Bregière.

AUTRICE. s. f. Mot que l’usage n’admet pas, pour signifier celle qui a composé un ouvrage d’esprit. J’avois déjà lu plus d’une fois, Mademoiselle, la lettre sur les bons mots, insérée dans le Mercure du mois d’Avril dernier, lorsque Madame la Marquise de la S. ** me dit que vous en êtes l’autrice. Mercur. Juin 1726. Il falloit dire l’auteur, suivant le bon usage & la décision de l’Académie Françoise.

AUTRICHE. Austria. Province d’Allemagne. Les Allemans l’appellent Oesterrich, ou Osterrich. Elle doit son nom à sa situation, car elle est la partie d’Allemagne la plus orientale, & ost signifie orient. Voyez ce que nous avons dit au mot Austrasie. Les bornes de l’Autriche sont au levant la Hongrie, au nord la Moravie & la Bohème, au couchant le Duché de Bavière,