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AVE

14 Novembre ; ce qui revient à l’ancienne pratique de le commencer à la S. Martin.

En parlant du temps de l’Avent, on dit aussi au pluriel, les Avents, la saison des Avents, les Avents de Noël. Ainsi la Quintinie dit ; les chasselas se maintiennent pour la plûpart au-delà de la saison des Avents. Il faut planter aux Avents.

☞ Toutes ces façons de parler me paroissent mauvaises, & je les crois plus en usage parmi le peuple, que parmi les honnêtes gens.

☞ Prêcher l’Avent, c’est prêcher pendant l’Avent. C’est un tel prédicateur qui prêche l’Avent. On dit de même jeûner l’Avent.

Avent, signifie aussi les Sermons qu’un prédicateur prêcher pendant l’Avent, & le livre qui contient ces Sermons, soit manuscrits, soit imprimés. L’Avent du P. Bourdaloue m’a coûté tant. L’Avent du P. Texier est intitulé, l’Impie malheureux : celui de Biroat, la condamnation du monde. C’étoit assez la coutume au commencement du dernier siècle, de faire tous les Sermons de l’Avent sous une seule idée, telle que les deux que l’on vient d’indiquer ; des les rapporter tous à cette idée, desorte qu’ils fissent un corps de sermons suivis & tendans tous au même but. Cette coutume a passé.

ADVENTICE. adj. Voyez Adventif.

AVENTIERS. adj. m. pl. on appelle en termes de Jurisprudences, biens aventiers, les biens qui procèdent de succession autre que celle des ascendans ; c’est la même chose qu’adventif, ou adventice.

AVENTIN. s. ou adj. m. Le mont Aventin. C’est une des sept montagnes de la ville de Rome. Mons Aventinus. C’est sur le mont Aventin que Romulus & Rémus prirent l’augure qui décida lequel des deux seroit le fondateur de Rome, & lui donneroit son nom. L’Aventin s’appelle aujourd’hui le Mont de Sainte Sabine, du nom d’une église qu’on y a bâtie.

☞ AVENTURE. Tout ce qui arrive aux personnes, soit que les choses viennent inopinément, soit qu’elles soient la suite d’une intrigue. Casus, fortuna.

Ce mot, dit M. l’Abbé Girarg, marque quelque chose qui tient plus du bonheur que du malheur. Il semble aussi que le hasard a plus de part dans l’idée d’aventure & d’accident, que dans celle d’événement. Il est peu de gens qui aient vécu dans le monde sans avoir eû quelque aventure bizarre. Les bonnes fortunes des jeunes gens sont des aventures. Voyez Événement, Accident.

Accident, se dit aussi de ces accidens surprenans & extraordinaires, qui sont souvent de pures imaginations, ou des entreprises hasardeuses, extraordinaires, merveilleuses, mêlées de magie ou d’enchantements, comme celles des Romans de Chevalerie. Il y a des gens qui sont sujets à trouver des aventures, & certains esprits romanesques qui courent après les aventures. Dom Quichote a voulu imiter les anciens Paladins, qui alloient chercher les aventures. L’Amadis est tout plein d’aventures périlleuses, surprenantes.

Dans ce sens on dit d’un homme qui aime les entreprises extraordinaires, qu’il aime les aventures, qu’il court après les aventures.

On dit d’une femme qui a fait parler d’elle par ses galanteries, que c’est une femme à aventures.

On fait de cent beautés les tristes aventures ;
Et l’empire amoureux est tout plein de parjures.

M. de la Suze.

Une aventure galante ne le touche point, à moins qu’elle ne soit assaisonnée de danger & de crainte. S. Evr. Les Portugais sont si superstitieux, qu’ils couvrent toutes les images de leurs chambres avant que d’achever une aventure amoureuse. Inq. de Goa. Il arrive souvent qu’à la lecture d’un roman, les filles se passionnent pour des intrigues, & des aventures chimériques. Fenel.

On dit, mettre de l’argent à la grosse aventure ; pour dire, le mettre à profit sur le négoce de mer, & sur la quille du vaisseau, au hasard de le perdre, si le vaisseau est pris ou fait naufrage. Le bureau des assurances répond de la grosse aventure. Voy. Assurance. (chambre d’).

☞ On dit, dire la bonne aventure, prédire par la chiromancie, ou de quelque façon que ce soit, ce qui doit arriver à quelqu’un.

☞ Quelquefois par aventure, on entend simplement hasard. C’est une grande aventure, si je n’en viens pas à bout.

A l’Aventure, au hasard, sans réflexion, sans dessein. Temerè, inconsultò, inconsideratè.

Errer à l’aventure, c’est marcher sans dessin, & sans savoir où l’on veut aller. C’est être imprudent, que de mettre tout à l’aventure, de faire tout à l’aventure ; c’est-à-dire, sans réflexion. Chacun a la liberté de dire à l’aventure tout ce qu’il pense. Pasc. Combien a-t-on vu de Ministres étourdis gouverner des Etats à l’aventure ? Balz. La plûpart des gens n’ont point de principes & vivent à l’aventure. La Bruy. Un baiser bien souvent se donne à l’aventure. La Sabl. d’aventure, par aventure ; phrases adverbiales, qui signifient par hasard. Fortè, fortuitò. Si d’aventure, ou par aventure il arrivoit ; c’est--à-dire, si le hasard vouloit que cela arrivât. Ces deux derniers sont du style badin & burlesque. Réfl.

On appelle aussi, mal d’aventure, un mal qui vient au bout des doigts, avec une inflammation & abcès, lorsqu’on s’est piqué. Paronychia. Il est fort différent du panaris, quoiqu’il vienne au même endroit. Voyez Panaris.

AVENTURER. v. a. Risquer, mettre au hasard, à l’aventure. Fortune committere, objicere. Il a aventuré sa fortune dans cette affaire. Cet argent est bien aventuré. On le dit souvent avec le pronom personnel, vous vous aventurez trop. Ce Capitaine s’est bien aventuré, d’entrer si avant dans le pays ennemi. Il n’est pas du style noble.

AVENTURÉ, ÉE. Qui est en danger d’être perdu. Quod in periculo est. Le diamant est bien aventuré. R. Caff. Coméd. Affaire aventurée.

Une dame aventurée au jeu de trictrac, est une dame qu’on avance d’abord beaucoup, sans être assuré de pouvoir la couvrir promptement. L. S.

AVENTUREUX, EUSE. adj. Qui s’aventure, qui s’expose témérairement au péril. Ad audendum projectus. Qui temerè fortune se committit. Je craint les guides aventureux. Le P. Tournemine. Ce soldat est fort aventureux. ☞ Ce terme vieillit, dit l’Académie. On peut bien le regarder comme vieux & suranné.

☞ AVENTURIER. s. m. Qui cherche les aventures, les occasions de la guerre, sans être attaché à aucun corps. On donnoit ce nom sous Louis XII & François I, à une sorte d’infanterie françoise fort mal habillée ; mais qui pour cela n’en étoit pas moins brave. elle fut soumise par François I, au Colonel général de l’infanterie. D’abord elle n’avoit point de solde, mais on lui fournissoit les étapes dans le royaume, & vivoit en pays ennemi du butin qu’elle y pouvoit faire. On la soumit enfin à la discipline militaire. On en voyoit encore sous Henri IV, mais il n’en a point paru depuis. Note sur Cl. Marot.

☞ Dans le discours familier, on le dit parmi nous d’un jeune homme qui cherche à plaire à toutes les femmes, sans s’attacher à aucune. C’est un jeune aventurier qui ne s’attache à rien, & qui se donne à tout. Vagus, circumforaneus amator.

Aventurier, signifie plus ordinairement parmi nous, un homme sans fortune, qui vit d’intrigues. C’est ce qu’on appelle autrement chevalier d’industrie. Alienâ vivere quadrâ peritus.

☞ Dans le commerce, ce terme désigne des gens sans qualité, qui s’intriguent dans les affaires. Défiez-vous de lui, c’est un aventurier. Se immiscere.

☞ On donne encore le nom d’aventurier à certains coureurs de mer, qui piratent sur les mers de l’Amérique, & qu’on appelle autrement, Flubustiers & Boucaniers. Voyez ces mots.

☞ En Angleterre on appelle aventuriers, les action-