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AVA

mairiens, une diphtongue ; mais c’est une diphtongue très-impropre, & seulement dans l’écriture. Car au vrai & dans la prononciation, c’est un son très-simple, qui ne diffère point de celui de l’o, comme il paroît dans ce mot aurore, où la première syllabe a le même son que la seconde.

Au. Article du datif singulier, dont on use devant les noms masculins qui commencent par des consonnes, & qui ne sont pas des noms propres. Au père & à la mère. Au bois. Au public. Au feu. Au grenier, &c. Assister au sermon. Obéir au Roi. Consacrer ses jours au Seigneur. Arn. Avocat au Parlement, Président au Parlement, & non pas en Parlement. Vaug. Mén.

C’est aussi une particule qui se met tantôt pour la préposition dans. Il est au lit. Bâton durci au feu. Vaug. Tantôt pour la préposition avec. Toucher au doigt. Tableau fait au pinceau. Tantôt au lieu de la préposition pour. Pot au lait. Tantôt au lieu de la préposition selon. Au sentiment de tout le monde. Au sentiment des Philosophes.

Il sert aussi à former une infinité d’adverbes, aussi bien que la particule à. Au prorata. Au fur & à mesure. Au pis aller. Au reste. Au-deçà, & au-delà. Au-devant. Au haut. Au bas. Au contraire. Au moins. C’est tout au plus. Au travers. Au partir de-là. Ils seront expliqué à leur ordre.

Ce qu’on vient de dire est le langage ordinaire de nos Grammairiens ; mais au vrai au n’est ni un article, ni une particule seulement ; mais plutôt une particule, ou, pour parler plus juste, une préposition & un article joints ensemble. Car au équivaut à à le, dont il est formé. Je vais au Palais, comme si je disois à le Palais. Au pluriel, aux, c’est comme si je disois, à les. D’abord on a dit al, que les Espagnols disent encore. Ensuite changeant le l en u, selon notre coutume, nous avons dit au pour al, comme nous disons aube de alba, chevaux pour chevals, &c. Et soit qu’il marque le datif, ou qu’il soit en quelque autre situation, c’est toujours la même chose ; même dans les adverbes qu’il forme, le mot qui suit est considéré comme nom, qui a un article, le pis aller, le reste, le devant, le haut, le bas, le plus, le moins. C’est pour cela que au a tous les sens de la préposition à, comme il les auroit, si à étoit séparé de l’article, & comme il les a devant l’article féminin la, auquel il ne se joint & ne s’incorpore point comme au masculin.

Au. Voyez Aou.

AVA.

AVA. Ava. Capitale du royaume d’Ava, dans la partie septentrionale de la presqu’ile de l’Inde, au-delà du Gange. Ava est aussi une ville de l’île de Niphon, la plus grande du Japon. Elle est dans la partie méridionale du pays d’Ochio, & elle donne son nom à un royaume dont elle est capitale. Il y a encore au Japon une autre Ava, qui est dans la partie orientale de l’île de Xicoco.

Ava, dans le Mogolistan. L’élévation du pôle y est de 210°, 0′, 0″ P. du Chatz.

AVACCARI. Nom d’un petit arbre des Indes, dont les feuilles, les fleurs, & les fruits, sont semblables au myrte, & plus astringens. Il croît sur les montagnes, dans la province de Malavar.

AVACHIR. Qui ne se dit qu’avec le pronom personnel, des personnes qui deviennent lâches, fainéantes, sans vigueur. S’avachir, v. récip. Flaccescere, mollescere, languescere, marcescere. Cet homme s’est avachi depuis quelque temps, est devenu paresseux, n’est plus bon à rien. Ce mot est populaire. Il vient du latin vacca, vache.

☞ On le dit plus ordinairement des femmes qui deviennent trop grasses. Cette femme a trop d’embonpoint ; elle commence à s’avachir. On veut qu’il soit du discours familier. Il n’est certainement pas noble.

On le dit aussi des étoffes, des garnitures de rubans, lorsqu’elles s’aplatissent, qu’elles ne bouffent plus.

s’Avachir, est proprement un terme de Corroyeur & de Cordonnier, qui se dit des cuirs quand ils s’amollissent trop, & qu’ils cessent d’avoir un certain degré de dureté qu’ils doivent avoir pour être bons. Ce cuir ne vaut rien, il s’avachit trop.

s’Avachir, est aussi un, terme de Jardinage, qui se dit des branches, quand au lieu de se soutenir droites, elles sont penchées par leur extrémité. Les branches de cet oranger s’avachissent.

AVAGE. s. m. se dit d’un certain droit que lève le Bourreau certains jours de marché, sur plusieurs sortes de marchandises. Prendre le droit d’avage. Ce droit n’est connu que dans quelques provinces.

AVAL. adv. Terme de Batelier, ☞ qui signifie, en descendant, suivant le cours de l’eau. C’est l’opposé d’amont. Secundo amni, fluvio. Un bateau qui va sur la rivière, va aval, celui qui va en montant, va amont. Adverso Flumine.

☞ On dit aussi le pays d’aval, par opposition au pays d’amont. Rouen, relativement a Paris, est le pays d’aval ; & Paris relativement à Rouen, est le pays d’amont.

☞ On appelle aussi vent d’aval, le vent du couchant. Favonius. Le vent d’aval est pluvieux.

☞ On dit aussi avau-l’eau, dans le même sens, suivant le courant de l’eau. Aller avau-l’eau, sans ramer.

☞ On dit figurément & familièrement, qu’une affaire, une entreprise est allée avau-l’eau, pour dire, qu’elle a manqué, qu’elle n’a pas réussi.

Aval. s. m. Terme de Commerce, est une souscription qu’on met au bas d’une lettre, ou billet de change, par laquelle on s’oblige d’en payer le contenu, en cas qu’ils ne soient pas acquittés par les personnes sur lesquelles ils sont tirés : c’est proprement une caution pour faire valoir une lettre de change. Cautio, vas. Si un tel marchand a donné son aval, cette lettre est bonne. Et on appelle ces cautions, donneur d’aval, qu’on peut contraindre par corps, de même que les tireurs de lettres de change.

AVALAGE. s. m. Terme de Tonnelier. Action d’avaler. Action par laquelle les Tonneliers descendent les vins dans les caves des particuliers. Demissio. On doit tant au Tonnelier pour l’avalage de tant de muids dans la cave.

AVALAISON, ou AVALASSE. s. f. Chute d’eau impétueuse qui vient des grosses pluies qui le forment en torrens. Præceps aquarum lapsus. Ce moulin a été ruiné par les avalaisons, par les chutes d’eau. Voilà un rat, un canal qui s’est fait depuis peu par les avalaisons de cette montagne.

On dit encore avalaison, ou avaleson, en parlant des poissons qui suivent le cours de l’eau, ou qui étant emportés par la rapidité, tombent dans les nasses que l’on prépare pour cela.

AVALANGES. s. f. Chute de neiges détachées des hautes montagnes dans les vallées : ce n’est quelquefois qu’un peloton de neige, qui en roulant devient d’une grosseur prodigieuse. Nivium lapsus. Les avalanges sont fort dangereuses quand on voyage dans les vallées durant le dégel.

Ce mot qui a vieilli, vient de tomber en aval. Le peuple dit les lavanges, & quelques-uns avalanches. On dit plus communément lavanches dans le Dauphiné, & avalanges vers Briancon & Pignesol.

AVALANT, ANTE. adj. Terme de Batelier, c’est-à dire, qui descend, qui va en aval. On ne mettra aucun empêchement au passage des bateaux montans, ou avalans. Ord. de Louis XIV. Il se prend aussi substantivement. Le montant doit céder à l’avalant. Ibid.

AVALE-DRU. s. m. Terme populaire, qui se dit d’un homme qui mange vite, dans la bouche de qui un morceau n’attend pas l’autre. C’est un avale dru, Il avale-dru comme mouches. Dict. Com.

AVALLÉE. s. f. Terme de Manufacture. C’est la même chose que levée ; c’est-à-dire, ce que l’Ouvrier peut travailler sur son métier, sans être obligé de rouler & dérouler ses ensuples, pour mettre sur l’une son ouvrage, & pour lâcher de l’autre, de la chaîne.

Avalée de chardon, se dit chez les Ouvriers Laineurs de draps, de chaque espèce d’étoffe qu’ils lainent sur la perche avec le chardon, à prendre cet espace depuis la perche, qui est le haut, jusqu’au faudet, qui est le bas.