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ATO — ATR

À TORT ET A TRAVERS. adv. Inconsidérément, aveuglement, à l’étourdie. Temerè, inconsultè, inconsideratè. Parler à tort & à travers.

☞ ATOUR. s. m. Parure. Il se dit principalement de la parure des femmes, & il n’est guère en usage qu’au pluriel. Ornatus, mundus mulieris. Elle avoit ses plus beaux atours. Ac. Fr. Chez la Reine & chez les Princesses du Sang Royal, il y a une dame d’atour dont la charge est de coiffer, d’habiller la Reine, les Princesses.

Atour, en termes de Coutumes & de Droit, signifie Statut, ou Ordonnance faite par le Maire d’une ville, qu’on appelle en quelques lieux Atourné. Decretum, Edictum Prætoris urbani.

ATOURNARESSE. s. f. Vieux mot. Qualité qu’en donnoit aux femmes qui faisoient métier de coiffer, de parer & de louer des pierreries aux épousées, aux dames qui se voulaient parer pour le bal, pour une cérémonie. Cosmeta, ornatrix.

ATOURNÉ. s. m. C’est ainsi qu’en appeloit anciennement un Procureur, ou celui qui fait les affaires d’un autre en vertu de la procuration qu’il en a. Procurator. Autretois on écrivoit Atorné. M. du Cange nous apprend ce que c’étoit que l’Atorné, par ces paroles d’un vieux Coutumier manuscrit de Normandie. Li Atorné, est cil qui pardevant justice est atorné pour aucun en eschaquier, ou en aisise, où il aet recort, pour poursuivre & pour défendre sa droiture. Et si doit estre reçeu en autre tel estat de la querelle, comme cellui en est ali atorné. Et quant il l’a atorné, li atornez ne doit estre de rien oïs, fors de la querelle de quoi il est atorné.

On appelle aussi en quelques Coutumes Atournés, ceux qu’on appelle ailleurs Maires. Prætor urbanus.

ATOURNER. v. a. Vieux mot. Qui signitioit autretois, orner & parer une dame. Ornare, adornare, comere. Il est hors d’usage dans le sérieux.

Atourner, disent les Vocabulistes, est encore un de ces mots que le Dict. de Trévoux vieillit de sa propre autorité. Ne pourroit-on pas leur dire que c’est eux qui cherchent à le rajeunir ? Ils venoient de dire eux-mêmes que c’est un terme de plaisanterie & du style familier. Au reste nous le leur abandonnons volontiers, pour en faire l’usage qu’ils jugeront à propos. Pour nous nous ne l’emploirons que comme terme suranné, & bon tout au plus dans le style badin.

ATOURNÉ, ÉE. part. Ornatus, comptus. Vous voilà bien atournée.

☞ ATOURNEUSE. s. f. Coiffeuse. Ornatrix. Ch. Est. Dict. Il n’est plus en usage.

☞ ATOURNEUR. s. m. Baigneur. Ornator. Ch. Est. Dict. Il n’est plus en usage.

ATOUT. Façon de parler adverbiale, qui se dit à certains jeux de cartes de la couleur dont est la triomphe. Jouer atout. Ce mot devient s. m. quand on en fait un seul mot. Un atout. Carte qui emporte toutes les autres, ou plutôt, qui se peut jouer contre quelqu’autre carte que ce soit. Ce sont celles qui sont de même espèce que celles de quoi il tourne : par exemple, s’il tourne de pique, tous les piques sont des atous. Les règles du jeu veulent que quand celui qui joue le premier a joué une carte d’une espèce, par exemple un cœur, on joue contre cette carte une autre carte de même espèce, si l’on en a, c’est-à dire, un autre cœur, à moins qu’on ne lui oppose un atout, c’est à-dire, une qui sert de la même espèce que celle dont il tourne ; car celles-là sont privilégiées : on peut les jouer contre toutes les autres espèces, elles les emportent, & ne cèdent qu’à celles qui sont de leur même espèce, & plus considérables ; par exemple, le plus bas pique, s’il en tourne, l’emportera sur les rois même de toutes les autres sortes, de cœur, de trèfle, de carreau. C’est donc pour cela, parce qu’elles vont à tout, qu’on les joue à tout ; c’est à-dire, non-seulement contre celles de leur espèce, mais encore contre toutes les autres, c’est pour cela, dis je, qu’on les nomme atout. Ce mot ne devroit pas avoir de pluriel, cependant, à en juger par la prononciation qui alonge la dernière syllabe, quand on parle de plusieurs de ces sortes de cartes, il semble que l’usage lui en donne un, & que l’on dise ; j’ai perdu tous mes atous : tous mes atous s’en sont allés.

A-Tout. Vieille préposition. Avec. Cum. L’Empereur de Perse se combattra à toi à tout trois cens mille Chevaliers & hommes d’armes & plus. Joinville.

ATR

ATRABILAIRE. adj. m. & f. Mélancolique, qui est d’un tempérament où la bile noire domine, celui qu’une bile noire & aduste rend triste & chagrin. Atrà bile affectus. Il est aussi substantif. C’est un atrabilaire.

ATRABILE. s. f. Terme de l’ancienne Médecine. Il signifie Bile noire. Atrabilis. L’atrabile domine dans le lion.

☞ M. de la Chambre a employé ce mot dans l’art de connoitre les hommes. Atrabilaire est de ma connoissance, dit le P. Bouhours ; mais atrabile n’en est point : & j’ai été surpris de rencontrer l’atrabile, au lieu de la bile noire. Au reste M. de la Chambre parloit son jargon, & ce mot, qui seroit très-mauvais dans la conversation ordinaire, peut trouver place dans un traite de Médecine, où il s’agit du tempérament des hommes.

ATRACTYLIS. s. m. N’est point le chardon bénit. Cette plante jette une tige ferme & blanche dont on fait des fuseaux dits ἄτρακτος dont les Anciens se servoient.

☞ Ses feuilles sont nerveuses, épineuses & piquantes. Ses fleurs de couleur jaune naissent au sommet des branches, sur des têtes armées de pointes très-piquantes. Il leur succède des semences aigrettées, d’un goût amer.

À TRAVERS. Préposition. Voyez travers.

ÂTRE. s. m. Le sol, ou le bas d’une cheminée, entre les jambages, qui est garni de carreau, de brique, de pavé ou de fer ; le lieu où l’on fait le feu. Focus. La réparation des âtres, est une des menues réparations dont sont tenus les locataires. Oter les ordures de l’âtre, nettoyer l’âtre. On dit aussi l’âtre d’un four. ☞ En verrerie c’est une pierre de grès qui couvre la surface du fond du four pour recevoir & conserver les matières vitrifiées qui tombent des pots, lorsqu’ils cassent ou qu’on les a trop remplis.

Ce mot vient, selon quelques-uns, de atrium, qui signifie cour. Ménage dit qu’il vient de atrum, parce qu’il est noir par la fumée. Mais du Cange soutient qu’il vient du mot astrum, qui signifioit autrefois une maison toute entière, & que c’est un mot Saxon qui signifioit un foyer, ou une fournaise. Il ajoute que ce nom a été étendu à tout le logis, comme nous avons appelé un feu toute la famille. Il dit aussi, que tous les foyers s’appeloient autrefois âtre & aitre, dont on voyoit encore une marque en cette phrase, savoir les aîtres du logis ; pour dire, en reconnoître les chambres & les foyers.

On dit proverbialement, qu’en telle maison il n’y a rien si froid que l’âtre ; pour dire, qu’on y fait mauvaise chère, qu’il n’y a point d’ordinaire.

ATRÉBATES. s. m. plur. Nom qu’on donnoit anciennement aux peuples & habitans de l’Artois, & qu’on leur donne encore lorsqu’on parle de l’ancien temps. Ces mêmes peuples s’appellent aujourd’hui Artésiens ; mais quand il est question des siècles reculés, on les nomme encore Atrébates : c’est pourquoi M. de Cordemoy dit que les Atrébates envoyèrent 15000 hommes contre César.

ATRI. Ville du royaume de Naples. Atria, Adria, Hadria. Elle est dans l’Abruzze ultérieure, sur une montagne fort haute & très-rude, à une grande lieue du golfe de Venise, ☞ auquel Aurélius Victor croit qu’elle a donné le nom de mer Adriatique. Il se trompe ; & l’on sait que cette dénomination vient d’une autre ville nommée Adria. Atri fut la patrie de l’Empereur Adrien ; c’est pour cela qu’on l’appela Adria, ou Hadria, parce que le nom de cet Empereur s’écrivoit avec un h ; & c’est ainsi qu’on le voit encore sur les médailles.

ATRICES. s. f. pl. Petits tubercules autour de l’anus, qui disparoissent & reviennent ensuite, sur-tout au commencement. Valesius de Tarente les met au nombre des condylomes & des ficus. Castelli cité par James.