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AME

ou des cartes. Ces dés sont pipés, ils amenent toujours gros jeu. Amener rafle, amener chance. Lorsqu’en jetant les dés, il vient gros jeu, rafle, chance. Je n’avois qu’un coup contre moi, je l’ai amené. Il a amené sa carte la première, il a fait un vilain coupe gorge.

Amener, en termes de Marine, signifie, abaisser les voiles & les pavillons : & en ce sens il vient d’amena, qui est un mot bas-breton, signifiant la même chose, & se dit quand le plus fort oblige le plus foible de venir à lui, d’approcher de son bord pour le reconnoître, le visiter, & même le prendre, le confisquer, s’il y a lieu. Accedere. On dit aussi, amener les voiles, ou mettre bas ; pour dire, les baisser : c’est un signe de soumission, ou qu’on se rend. Amener ses huniers ou ses perroquets, c’est abaisser ces sortes de voiles. Sur la Méditerranée on dit Mayner. On dit aussi, amener une terre, un vaisseau ; pour dire, s’en approcher, ou se trouver vis-à-vis. Accedere.

☞ AMENÉ, ÉE. part. Il a les significations de son verbe. En termes de Marine, lorsqu’un hunier n’est pas aussi hissé qu’il pourroit l’être, on dit qu’il est amené.

Amené, est aussi quelquefois substantif : & on dit en termes de Juridiction Ecclésiastique, un amené sans scandale ; pour dire, un ordre d’amener un homme devant le Juge, sans bruit, sans lui faire affront. On a défendu les amenés sans scandale.

☞ AMÉNITÉ. s. f. Agrément. Amœnitas. Il se dit particulièrement d’un lieu, d’une situation agréable, d’un air doux & tempéré. L’aménité d’un lieu. L’aménité de l’air. Acad. Fr. Il est aussi très-usité parlant du style. Hérodote, dont les écrits ont paru aux yeux des anciens si remplis d’élégance & d’aménités. M. Charpentier. On l’emploie aussi figurément. Il y a de l’aménité. Il n’a nulle aménité dans l’humeur. Acad. Fr. Il porta à la Cour toute l’aménité & délicatesse de son esprit. Huet, en parlant de M. Patrix. Ce mot se trouve dans Montaigne. Edit. de Rouen 1641, p. 788 ; & dans Ch. Est. Dict.

AMENRIR. v. a. Vieux terme de Coutume, qui veut dire, diminuer, estropier. On dit aujourd’hui amoindrir pour amenrir, qu’on disoit autrefois. Minuere, imminuere, truncare, decurtare. On disoit aussi amenrissement pour diminution.

AMENTHÈS. s. m. C’étoit chez les Egyptiens, la même chose qu’Adès chez les Grecs, c’est-à-dire, un lieu souterrain, ou dans le centre de la terre, où toutes les âmes se rendoient. Il signifie, celui qui reçoit & qui donne, parce qu’on supposoit que ce goufre qui recevoit les ames, les rendoit de même, & qu’au sortir de-là, elles alloient habiter de nouveaux corps.

AMENUISEMENT. s. m. Ce mot se trouve dans Pomey, & dans Pasquier, & signifie l’action d’amenuiser. Extenuatio. Il n’est pas fort en usage. Mais il est nécessaire & ne peut être remplacé.

AMENUISER. v. a. Rendre plus menu. Tenuare, extenuare, minuere. ☞ On le dit généralement de toutes les parties d’un corps qu’on diminue de volume. Amenuiser une planche, lui ôter son épaisseur. Allégir a une signification plus étendue. Il se dit des grosses pièces comme des petites : amenuiser ne se dit que de ces dernières. On n’amenuise pas un arbre, on l’allégit. On allégit un corps considérable, en le diminuant sur toutes les faces ; on l’amenuise en le diminuant davantage par une seule face.

AMENUISÉ, ÉE. part. Tenuatus, extenuatus.

AMER, ÈRE. adj. L’r se prononce. Qui a une saveur très-rude & désagréable à la langue, tel que le fiel des animaux, l’aloès, l’absinthe. Amarus, acerbus.

☞ C’est la seconde des sept faveurs primitives. Un corps amer est composé de molécules irrégulières, couvertes d’inégalités & mal cuites. On dit avoir la bouche amère ; pour dire, sentir un goût amer à la bouche. Le mot amer vient du latin amarus, qui est dérivé de l’hébreu מרר, marar, être amer, & מרה, mara, amer, amertume.

Amer, se dit figurément en Morale, pour marquer la qualité des choses, & désigne une impression vive, forte, désagréable. Une douleur amère, c’est-à-dire, vive & profonde. Des larmes amères, qu’une telle douleur fait couler. Plaintes amères, reproches amers, raillerie amère. Plaintes aigres, reproches durs, raillerie piquante.

☞ On le dit dans le même sens pour douloureux. Il est bien amer à un pere de voir ses enfans révoltés contre lui.

Amer. s. m. L’amer & le doux sont des qualités contraires.

On dit, prendre les amers ; pour dire, prendre des bouillons faits d’herbes amères. Acad. Fr. ☞ Les amers augmentent le ressort des fibres relâchées des organes de la digestion, corrigent le sang & les humeurs.

Amer, signifie aussi le fiel des animaux. Fel. L’amer de bœuf est propre à ôter les taches des habits. On ne sauroit manger de cette carpe, on en a crevé l’amer.

AMERADE. s. m. Ameras, adis. C’est un terme de dignité, & le nom d’un Officier chez les Sarrazins. Les Amerades étoient ce que sont en Europe les Gouverneurs de province. Ce mot est la même chose qu’Emir, & vient du même verbe אמר amar, dire, commander.

AMÈREMENT. adv. D’une manière amère, il ne se dit qu’au figuré pour douloureusement. Acerbè. Saint Pierre pleura amèrement sa faute. Alexandre voyant le corps de Darius, pleura amèrement. Vaug.

☞ AMERGO, ou MERCO. Ville d’Afrique, en Barbarie, au Royaume de Fez, dans la province de Habat, à trois lieues de Beni-Tudi. Elle étoit autrefois considérable. Ce n’est plus qu’une grande habitation, peuplée de Tisserans.

AMÉRICAIN, AINE. adj. & s. Habitant de l’Amérique, qui est d’Amérique, qui appartient à l’Amérique. Grotius & Hornius ont fait des livres de l’origine des nations Américaines, dans lesquels ils montrent que les Américains sont des habitans de l’ancien monde, qui ont pénétré jusque-là, ou par mer, ou peut-être par terre. Grotius croit que les Américains du nord sont venus de Norwége par le Groënland ; que ceux du Jucatan sont des Ethiopiens ; que ceux du Pérou sont partis de l’Inde & de la Chine ; que ceux qui sont au midi jusqu’au détroit de Magellan, y sont passés de l’Orient par les terres Australes. Outre cela si de la Norwége on a pu passer dans le nord de l’Amérique on l’a pu aussi de la Tartarie ; & il y a d’autant plus d’apparence à cela, que l’on assure que la langue des Américains du nord a beaucoup de rapport à la langue tartare. Hornbeck, qui examine la même matière dans sa VIII & sa IX Dissertation de la conservation des Indiens & des Gentils, dit, que l’on trouve des preuves manifestes que les peuples du Mexique, du Pérou & du Brésil, sont originairement Scythes & Tartares. Pour les îles de l’Amérique, il ne doute point que la plûpart n’aient été peuplées par les Phéniciens & les Cartaginois. Il ne doute pas non plus, que dans le temps que les Saxons envahirent & ravagerent la grande Bretagne, & que les Sarrasins s’emparerent de l’Espagne, plusieurs Bretons & Espagnols fuyans les cruautés de leurs vainqueurs, ne se soient jetés chacun de leur côté dans l’Amérique. Enfin, il est très-croyable que l’aventure d’Alonso Sanchez est arrivée à plusieurs autres, & que bien des navires, ou Européens, ou Africains, ont été jetés par la tempête, ou emportés par les courans sur les côtes d’Amérique, & n’en sont pas revenus comme lui. Voy. le P. de Acosta, Jésuite, Liv. I de l’Histoire des Indes, chap. 16 & suiv. Il croit que les Américains sont venus là par terre. Voy. encore le P. Alfonse d’Ouaglie, Hist. du Chili, Liv. III, chap. i. Maffée, dans le II Livre de son Histoire des Indes, décrit assez au long l’Amérique. Il y a plusieurs histoires de l’Amérique, dont voici les principales. Antonio de Remosal, Hist. gener. de las Indias Occid. Juan de Torquemada, Monarch. Indiar. Herréra, Nov. Orb. sive Descr. Ind. Occid. & Histor. de las Indias Occidentales Décades IV. elle a été traduite par N. de la Coste, & imprimée à Paris en 1660. Bernard de Vergas, Descript. de las Indias. Cerolamo Benzoni, Hist. del mundo Nuovo. Jean de Léri, Hist. de l’Amé-