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AGN

des monnoies réelles, comme ont été autrefois en France les deniers d’or à l’agnel, & les moutons d’or à la grande ou petite laine… Ce nom d’agneau fait voir que la monnoie étoit marquée dès ce temps-là. Boizard. M. Pelletier de Rouen a fait une Dissertation sur cette monnoie. Elle est dans les Mémoires de Trévoux, au mois de Mai 1704, dans laquelle il montre que c’étoit une monnoie des Chaldéens, & quelle étoit marquée d’un côté d’un agneau, & de l’autre d’un sagittaire, ou archer, ou d’un arc, ou d’un carquois plein de flèches. Hortinger, de Num. Orient, p. 100, prouve aussi que c’étoit une monnoie. 1o Par l’endroit des Actes, VII, 16, que nous avons déjà cité. 2o Par le commerce que faisoit Jacob. 3o Par l’ancienne coutume de presque tous les peuples, de donner à l’argent, à la monnoie, le nom des animaux qu’on y gravoit ; témoins les bœufs d’Athènes & de Rome, les loups d’Argos, les chevaux de Céphalène & de Thessalie, &c. 4o Par le consentement unanime des Hébreux, qui disent que ces Késita sont une espèce de monnoie. 5o Par l’usage de cette monnoie, que l’on trouve encore dans le Thalmud : il devoit ajouter, & parmi les Arabes. Ce sentiment est le plus commun ; c’est celui de Waserus, de Antiq. Hebr. Num. L II, C. 15, p. 89. De Drusius, in Gen. XXXIII, 19. Du P. de la Haye, Bibl.Max. & de Grotius sur le même endroit de l’Ecriture ; de R. David Kimhhi, Libr. Rad. & du Miclol Jophi, in Gen. XXXIII, 19, de Villalpandus & de beaucoup d’autres. Il n’y a pas jusqu’à M. Sperlingius, qui, dans sa Dissertation, de Nummis non cusis, chap. 13, soutient que c’étoit une monnoie d’or, quoiqu’il prétende qu’elle n’étoit point marquée.

AGNELER. v. n. Qui se dit de la brebis quand elle met bas. Agnum parere. Cette brebis n’a pas encore agnelé.

AGNELET. s. m. Diminutif d’agneau, pour signifier un petit agneau. Agnellus. On le dit peu.

Ce que voyant mon bon-homme de pere,
Voulut gager à Jacques son compere,
Contre un veau gras deux agnelets bessons,
Que quelque jour je ferois des chansons. Marot.

M. le Blanc, dans ses tables du prix & du poids des monnoies, appelle quelquefois Agnelet, ce qu’il appelle d’autres fois Agnel, c’est-à-dire, une monnoie d’or fin à la taille de 59 ½ au marc valant 20 sous, sous Philippe le Bel, Louis Huttin, & Philippe le Long.

AGNELINE. adj. f. Les laines agnelines sont celles qui proviennent des agneaux.

AGNELINS. s. m. pl. Terme de Mégisserie. Peaux d’agneaux que préparent les Mégissiers, en les passant d’un côté, & en laissant la laine de l’autre.

Agnelins. Ce sont aussi les laines des agneaux ou jeunes moutons, qui n’ont pas encore été tondus, qu’on lève de dessus les peaux, qui proviennent des abattis des Bouchers & des Rôtisseurs.

AGNÈS. s. f. Agnes. Nom de femme. La belle Agnès. Nom que l’on donna à Agnès Sorel, Maîtresse de Charles VII. On voit à Bourges la tour de la belle Agnès.

Belle-Agnès est aussi un terme de Fleuriste. C’est un ancien œillet marqué de peu de violet sur un blanc passable : il creve facilement, mais il grene bien.

Agnès. On donne aussi ce nom à une jeune fille qui n’a aucun usage du monde, qui est encore très-innocente. C’est une Agnès qui sort du couvent. Cette fille fait l’Agnès.

☞ Dans tous ces mots le g se prononce mouillé comme dans agneau.

AGNO, ou GLANIO. Rivière du royaume de Naples. Glanius. Elle a sa source aux confins de la Principauté Ultérieure, traverse la terre de Labour, forme le lac Patria, & peu après se jette dans le golfe de Gaëte. On la nomme aussi Patria.

AGNOËTES. Voyez Agnoïtes.

AGNOÏTES, ou AGNOËTES. C’est le nom qu’on a donné à d’anciens hérétiques, qui nioient que Jesus-Christ eût connu le jour du dernier jugement. Eulogius, Patriarche d’Alexandrie, attribua cette hérésie à quelques solitaires du voisinage de Jérusalem, qui produisoient là-dessus plusieurs passages du nouveau-Testament, & entre autres celui du chap. 13. de S. Marc, v. 32. Quant à ce jour & à cette heure-là, personne n’en a connoissance, non pas même les Anges qui sont dans le Ciel, ni le Fils, mais le Pere seul. Ces paroles qui se trouvent dans tous les exemplaires Grecs du nouveau Testament, semblent d’abord appuyer le sentiment des Agnoïtes. Mais Jesus-Christ vouloit seulement faire connoître à ses Apôtres, en parlant de la sorte, que c’étoit inutilement qu’ils lui faisoient des questions sur le jour du jugement dernier, parce que cela ne regardoit point sa qualité de Messie, mais le Pere seul. Comme les Ariens opposoient ce passage de S. Marc aux Orthodoxes, les anciens Docteurs de l’Eglise l’ont expliqué de différentes manières : quelques-uns d’eux ont cru que Jesus-Christ ne parloit pas de sa nature divine en ce lieu-là, mais seulement de sa nature humaine. Le sens le plus simple est celui qu’on vient de rapporter, & qui est de M. Simon dans sa note sur cet endroit. Il faut consulter sur ces Agnoïtes, Photius dans sa Bibliothèque, sect. 230. L’Auteur de cette hérésie a été un certain Thémistius, qui se faisoit nommer Calonymus. Voyez le même Photius, sect. 108. de sa Biblioth. La plûpart des Théologiens ont parlé de ces Agnoïtes. Consultez aussi du Cange dans son Glossaire grec sur le mot Ἀγνοήτα. On a encore appellé de ce nom d’autres hérétiques, dont le chef fut Théophrone de Cappadoce, qui s’étoit joint aux Eunomiens, qui le rejeterent, parce qu’il prétendoit que Dieu ne connoissoit pas tout, & qu’il acquéroit des connoissances.

☞ Ce mot est tiré d’un mot grec qui signifie ignorant.

AGNON. Ville ancienne de Sicile. Margantium. Elle étoit sur la rivière de Jaretta, entre la ville des Léontins & Catane. On en voit encore quelques restes.

AGNONE. Ville du royaume de Naples, dans l’Abruzze ultérieure. Quelques-uns la nomment Anglone.

AGNUS DEI. s. m. ou simplement Agnus. C’est le nom qu’on donne à une espèce de pâte ou cire bénite par le Pape, sur laquelle est imprimée la figure d’un agneau. Cerea agni cœlestis effigies. Le Pape bénit de sept ans en sept ans les Agnus Dei avec le S. Chrême, & leur distribution appartient à la charge du maître de sa garde-robe. Les Cardinaux les reçoivent avec grande révérence dans leurs mitres. Les Feuillans ont droit de paîtrir ceux qu’on fait de pâte.

Cette cérémonie vient d’une ancienne coutume de l’Eglise. On prenoit une certaine partie du cierge de Pâque qu’on avoit béni le Samedi Saint, & après la communion on la distribuoit au Peuple pour en faire des parfums dans leurs maisons, & dans leurs champs & leurs vignes, afin d’en chasser les démons, & les préserver des tempêtes & des orages, comme témoigne le P. Sirmond. A Rome l’Archidiacre bénissoit de la cire arrosée d’huile, & mettoit dessus l’empreinte de la figure d’un agneau pour la distribuer au peuple. Ce qui a fait que depuis, les Papes en ont fait des consécrations plus solennelles. Voyez Amalarius, Auteur du IXe Siècle, dans son ouvrage des Offices ecclésiastiques. Alphonse Ciccarelli a fait un Traité de l’origine de la bénédiction & des vertus de l’Agnus Dei, dont le P. Labbe fait mention en sa Bibliothèque.

Anciennement on donnoit l’Agnus Dei au nouveau baptisé, à la place de la robe blanche qu’il quittoit, afin d’avoir par-là un symbole qui l’avertît continuellement de la sainteté de vie à laquelle il étoit obligé, & de la nécessité où il étoit d’imiter l’agneau de Dieu dans sa douceur, son humilité, & son innocence. Cet Agnus Dei étoit blanc & paîtri de la cire du cierge Paschal, béni par le Pape, & on le portoit au col.

☞ On donne le même nom à de petites images de piété, ornées de broderie, faites pour les enfans.

☞ On prononce ces mots à la Françoise, c’est-à-dire, en ne faisant du g & de l’n, qu’un n mouillée, comme dans besogne.

Nous appelons aussi vulgairement Agnus Dei, cette partie de la Messe où le Prêtre se frappant la poitrine,