Et comme les Hébreux divisoient le monde en Hébreux & Nations, les Arabes & les Turcs le divisent en Arabes, ou Turcs, & en Agémoglans. 2o du nom Arabe עלאם qui veut dire, Enfant. Ainsi Agémonglan signifie, un enfant barbare, qui n’est pas Turc ; ou comme l’on pourroit dire en notre langue, un enfant gentil ; parce que ces Agémoglans sont les enfans de tribut que le Grand-Seigneur leve de trois ans en trois ans sur les Chrétiens qu’il souffre dans ses états.
Quelques-uns disent Azamoglans. Les Janissaires sont tirés des enfans de tribut appelés par les Turcs Azamoglans. Des Commissaires les vont prendre de gré ou de force, jusques dans les maisons des Chrétiens, ou de trois qu’ils trouvent, ils en enlèvent un, s’adressant toujours à ceux qui leur semblent les plus beaux & les plus adroits. On les amene incontinent à Constantinople, ou à Gallipoli. La ils sont premièrement circoncis ; puis on les instruit dans la Religion Mahométane, & on leur donne des maîtres qui prennent soin de leur enseigner la langue turque, & de les dresser aux exercices de la guerre, jusqu’à ce qu’ils soient en âge de porter les armes. S’il arrive qu’ils n’y soient point jugés propres, on les emploie à servir dans le Sérail, aux actions les plus viles, comme par exemple, aux cuisines, aux écuries, aux jardins, &c. Mais quelque petit que soit cet emploi, s’ils s’en acquittent comme il faut, souvent de ces emplois les plus vils, ils sont élevés aux plus hautes dignités de la Porte du Sérail. Dan. M. d’Herbelot dit qu’Azamolan est la prononciation vulgaire. Quoiqu’il en soit, ce n’est pas la plus vraie & la plus conforme à l’origine de ce nom, comme il paroît par ce que nous avons dit. Nicolaï, qui en parle assez en détail dans ses Navigations & Pérégrinations orientales, L. III, Ch. 1 & 2, écrit aussi Azamoglan ; il dit même quelque part Azamoglan, ou Jamoglan. Il dit qu’on ne les leve que de quatre ans en quatre ans ; qu’il y a deux cens Commissaires pour les lever ; que les Azamoglans rustiques n’ont de gages que de deux à trois aspres par jour ; qu’ils sont vêtus & chauffés deux fois l’an de gros drap bleu, portant en tête un haut bonnet jaune en forme de pain de sucre, & sont sous un Capitaine appelé Agiender-Agassi, qui a de gages trente aspres par jour, & est habillé aux dépens du Grand-Seigneur.
AGEN. Agenno, Agenum Nitiobricum, Aginum, Aginnum, Ageducum, à ce que l’on prétend dans Achilles Statius, & Agredicum, dans l’Itinéraire d’Antonin. Ville épiscopale de Guyenne sur la Garonne, Agen est une très-ancienne ville. Je ne voudrois pas cependant lui donner pour fondateur, comme ont fait quelques Auteurs, ni Agénor fils d’Anténor, qui selon Virgile bâtit Padoue ; ni Agénor petit-fils d’Ajax le Télamonien, ni même Agénides Ephore de Lacédémone, parce que cela n’est fondé que sur la seule ressemblance du nom. Les restes des Antiquités qui se trouvent autour d’Agen montrent que c’étoit autrefois une ville considérable.
AGENCE. s. f. Emploi de celui qui fait les affaires d’autrui. Rerum administratio. Il ne se dit que des gens qui sont chargés des affaires des Princes, ou de quelque corps illustre, comme du Clergé, d’une province, &c. Chez les Princes de l’Empire on brigue les Agences. A la Cour de France, l’Agence générale du Clergé est fort recherchée.
AGENCEMENT. s. m. Ajustement, arrangement ; l’ordre & la disposition où les choses se trouvent, & qui leur donne plus ou moins d’agrément. Compositio, Dispositio, Ordinatio. L’agencement des os a quelque chose de surprenant. Il se dit aussi au figuré, de l’ordre, & de la manière dont les choses & les mots sont disposés dans un discours, mais en ce sens il est vieux. Je me charge du soin de l’agencement. Rien ne relève tant l’éclat d’une histoire, que l’agencement des choses & des paroles.
Agencement. Terme de Peinture. ☞ C’est l’enchaînement des groupes dans une composition. C’est aussi la liaison des figures d’un même groupe. Agencement & arrangement sont des mots à peu près synonymes. Agencement des parties : agencement des plis : un bel agencement. Dict. de Peint. et d’Archit.
☞ Agencement, en Jurisprudence. Ce terme est usité à Bourdeaux, pour signifier un avantage, en cas de survie, que les futurs conjoints peuvent se faire par contrat de mariage, & qui a quelque rapport à ce que nous appelons préciput en pays coutumier.
AGENCER. v. a. Ranger, ajuster, mettre les choses dans l’ordre où elles doivent être, les disposer d’une certaine manière qui les rende agréables. Componere, disponere, ordinare. Agencer la mariée. Vous avez bien agencé votre cabinet. Il vieillit en ce sens. On dit aussi agencer les couleurs d’une harangue. Ablanc. Agencer les choses à notre air. Id. Je lui promets de fournir le soin d’agencer ses lauriers. Voit. Il vient du vieux mot Gent, qui signifioit poli, & qu’on nomme maintenant Gentil.
Agencer, se dit aussi avec le pronom personnel, & signifie, s’approprier, s’ajuster, Ornare se, comere, pectere.
On a beau s’agencer & faire les doux yeux ;
Quand on est bien paré, on est toujours bien mieux. Regn.
Le mot de s’agencer a encore un autre sens, où il semble être un peu plus en usage ; & c’est lorsqu’il signifie, se mettre, se placer, se ranger, s’accommoder d’une certaine manière. Calanus paré de ses magnifiques habits, se coucha tout de son long sur le bucher, s’agençant le plus honnêtement qu’il lui fut possible. Vaug. Dans toutes ses acceptions il n’est que du style familier.
AGENCÉ, ÉE. part.
AGENDA. s. m. Tablette, ou mémoire où les Marchands écrivent ce qu’ils ont à faire durant le jour, pour s’en souvenir. Pugillaria. Cet homme a tant d’affaires, qu’il auroit besoin d’un agenda in-folio. Ecrivez cela sur votre agenda. Agenda garni d’or.
Attendez que je voie un peu notre Agenda,
Pour savoir en tel cas ce qu’il faut que je fasse.
Ce mot, qui n’entre que dans le discours familier, est purement latin. Agenda. Les choses qu’il faut faire, du verbe ago. Il signifioit autrefois dans l’église, l’Office du jour, ou de la fête, & le nombre des messes & des mortuaires qu’on avoit à dire. On appelle aussi Agenda, les livres de baptêmes, & ceux qui se lisoient dans le chapitre. On l’a dit ensuite des affaires du royaume, & enfin de celles des particuliers. Du Cange.
AGENDE. s. f. Nom en usage chez les Chartreux. Agenda. Les Chartreux donnent differens nom aux suffrages qu’ils disent pour les défunts ; comme Monachat, Agende, & Tricénaire. L’Agende est l’office des morts à neuf leçons. P. Helyot, T. VII, p. 394.
AGENOIS. s. m. Agenensis Ager. L’Agenois est un pays dans la Guyenne, avec titre de Comté, dont Agen est la capitale. Il y a l’Agenois deçà le Lot, & l’Agenois de-là le Lot. On croit que c’est le pays des anciens Nitiobriges, peuples considérables parmi les Gaulois. Nitiobriges.
AGENOIS, OISE. s. m. & f. adj. Qui est d’Agen, ou qui appartient à Agen. Agennensis.
AGÉNORIE. s. f. Terme de Mythologie. Nom d’une divinité payene. Agenoria. On la nommoit autrement Strenua. C’étoit la Déesse de l’industrie & de la vaillance.
Ce mot vient d’ἀγήνωρ Virilis, strenuus, d’où vient que les Latins l’appeloient Strenua. Ἀγηνόρια. Virilitas, strenuitas. Les Romains l’invoquoient pour avoir du courage. On lui opposoit Vacuna, Déesse de la Paresse.
AGENOUILLER, S’AGENOUILLER. v. réciproque. Se mettre à genoux. Cenua submittere, Flectere,