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ACH

ACHEIROPOËTE. adj. Pris substantivement. Nom Grec, formé de l’α privatif, de χεὶρ, la main, & de ποίητις, fait de ποιῶ, faire, signifie, qui n’est pas fait avec la main. On désigne par ce mot un portrait de Notre-Seigneur qui se voit à Rome dans l’église de S. Jean de Latran, & qui, à ce que l’on dit, ayant été ébauché par S. Luc, fut achevé par les Anges, & ne fut point fait de main d’homme.

ACHÉLOÉ. s. f. C’est le nom d’une des Harpies, à qui on donne pour sœurs Alope & Ocypéte.

ACHÉLOUS. s. m. Fleuve célèbre dans l’Antiquité, Achéloüs. Il a sa source dans le mont Pinde, en Thessalie. Il séparoit l’Acarnanie de l’Étolie, & déchargeoit ses eaux dans le Sinus Maliacus, aujourd’hui golfe de Ziton. Achéloüs, selon les Poëtes, étoit fils de l’Océan & de la Terre, ou de Thétis ; & selon d’autres, du Soleil & de la Terre. Il eut un démêlé avec Hercule au sujet de Déjanire, fille d’Œnéus, Roi de Calydonie. Hercule vainquit Achéloüs, qui fut obligé de se cacher dans ses eaux. Dans ce combat Achéloüs sentant qu’il n’étoit pas de la force d’Hercule, se changea en serpent, puis en taureau. Hercule lui rompit ou lui coupa une corne ; & Achéloüs dans la suite, pour retirer sa corne des mains du vainqueur, lui donna en échange celle d’Amalthée.

Étienne de Bysance dit que ce fleuve s’appelait d’abord Thoas, & qu’ensuite il fut nommé Achéloüs, du nom d'Achéloüs, à son retour de Thessalie avec Alcmaon. La fable confond ce fleuve avec Achéloüs, & dit qu’il avoit, comme Prothée, le don de prendre telle forme qu’il vouloit.

ACHEM ou ACHIM. Achemum, Acemum. Nom d’une ville & d’un royaume qui occupe la partie septentrionale de l’île de Sumatra. Achem est le plus grand royaume de l’île de Sumatra, éloignée d’environ douze lieues de la terre ferme où est Malaca. Bouh. M. Corneille écrit dans un endroit Achen, & dans un autre Achen, & le P. Bouhours Achen. J’ai vû des relations qui écrivoient toujours de même.

ACHÉMENIDE. s. m. plus souvent au pl. Achœmenides. Achœmenides, Achœmenidæ. C’est un nom Patronimique, qui signifie, un homme descendu d’Achœmenes, père de Cambyse, & grand père d’un Cyrus, différent du grand Cyrus, homme de la famille royale de ces anciens Perses. Pline & Solin ont prétendu que c’étoit un nom de peuple. Ils se sont trompés ; c’est un nom de famille. Xerxès dit dans Hérodote, Livre vii. Chap. ii. qu’il est fils de Darius, fils d’Hystaspe, fils d’Arsames, fils d’Ariamnes, fils de Theispes Cyrus, fils de Cambyse, fils d’Achœmenes. C’est de là qu’on appelle les Rois Perses Achœmenidas, ainsi que le dit Hérodote, Liv. i. Ch. cxxv. Les Poëtes étendent encore la signification de ce nom ; & comme ils appellent Æneadæ, & Romulidæ, les Romains en général, ils appellent de même les Perses Achœmenides, & ils disent Achœmenien ; pour dire Persan.

☞ ACHEMENIS. s. f. Plante dont Pline fait mention, à laquelle la fable attribuoit la vertu de jeter la terreur dans les armées.

Achemens. s. m. pl. Terme de Blason, se dit des lambrequins découpés ou chaperons, qui enveloppent le calque & l’écu. Fluentes circa scutum & galeam laciniæ. Ils font découpés d’étoffe & ornés de perles, & de broderie ; parce qu’en vieux François on appeloit achêmes toutes sortes d’ornemens, & particulièrement ceux des femmes ; comme coiffes, guimpes, atours, chaînes, anneaux, &c.

ACHEMINEMENT. s. m. Il ne se dit point dans le propre. Disposition à une chose, préparation qui en fait espérer le succès. Gradus, via. Le mépris des grandeurs de ce monde est un acheminement à la perfection. Le gain de la bataille fait un acheminement à la paix. Sar. Un premier pas si heureux fut un acheminement à une plus grande fortune. M. Scud.

ACHEMINER. v. a. On disoit autrefois acheminer quelqu’un, le mettre dans son chemin. Aliquem in viam deducere. Aujourd’hui on ne le dit au propre qu’avec le pronom personnel. Se mettre en chemin. In viam se dare, contendere, tendere, pergere. Iter instituere, intendere. Ces voyageurs se sont enfin acheminés. Il s’achemina vers la Cappadoce. Vaug. Il s’achemina par les déserts, pour surprendre l’ennemi à l’improviste. Ablanc. Les Croisés s’acheminoient gais & gaillards à l’entreprise de la guerre sainte, comme assurés d’acquérir le paradis. Pasq.

Acheminer. v. a. se dit figurément en parlant des affaires, des entreprises, pour signifier les avancer, les mettre en bon train, en état de pouvoir réussir. Le gain d’une bataille peut acheminer la paix. Mon Avocat a bien acheminé mon affaire, il l’a mise en bon train. Perducere, procurare, administrare.

☞ Je trouve dans le grand Vocabulaire acheminer son entreprise jusqu’à la fin. Les termes d’acheminer & de fin paroissent pas faits pour aller ensemble. On achemine une affaire, une entreprise ; c’est-à-dire, qu’on la met en bon train ; on en prépare le succès ; & on la conduit jusqu’à la fin, on la finit, on la termine, mais acheminer jusqu’à la fin présente des idées non-seulement in-cohérentes, mais même qui s’excluent l’une & l’autre.

☞ Au reste, quoique le Dict. de l’Acad. ne dise rien de l’usage de ce mot, je ne crois pas qu’il puisse entrer dans le style noble.

Acheminer un cheval. Terme de Manège. Accoutumer un poulain à aller droit devant lui. Voy. Acheminé.

ACHEMINÉ, ÉE. part.

On appelle en termes de Manège, un cheval acheminé, celui qui est accoutumé à aller droit devant lui, qui connoit la bride, & répond aux éperons ; qui est dégourdi, & rompu. Aptus, idoneus. Ces mots se tirent du primitif chemin.

ACHENOIS, ou ACHEMOIS, OISE. s. m. & f. Qui est d’Achem ou Achen. M. Corneille, dans l’endroit où il écrit Achin, dit Achinois ; mais le P. Bouhours, dans la Vie de S. François Xavier, dit Achénois. Le P. Prémare Jésuite, dans une relation fort ingénieuse & fort bien écrite, qui parut en 1701, dit aussi Achénois. On n’eut point d’autres nouvelles à Malaca de l’armée des Achénois, que celles qu’elle y apporta elle-même. Bouh. Les Achénois sont fort superstitieux à l’égard de se laver & de se purifier pour leurs souillures, ce qui fait qu’ils aiment à demeurer auprès de quelque ruisseau. T. Corn.

ACHERNER. Terme d’Astronomie. C’est le nom d’une étoile fixe de la première grandeur dans Eridanus, & dont la longitude est de 10 d. 31. min. & la latitude de 56. d.

ACHÉRON. s. m. Acheron, Acheros. C’est le nom de plusieurs fleuves. On en met un dans l’Epire, nommé aujourd’hui Verlichi nigro, ou Vanas, que Ptolomée appelle Acheron, & Tite-Live Acheros. Strabon en met un dans l’Epire, contrée du Péloponèse, & un autre dans le pays des Brutiens en Italie ; c’est-à-dire, dans la Calabre, que Barrius, dans sa Calabre, prétend être celui qu’on nomme aujourd’hui Campaniano. Il se déchargeoit dans la mer à Butrinto dans le Sinus Ambracius, Auguste ayant conduit une Colonie à Butrinto, fit un pont de mille pieds de long sur l’embouchure de l’Achéron. Tout le monde admiroit cet ouvrage, dit Pline, Liv. iv. C. i. Nous en avons une médaille. August. Butr. La tête d’Auguste nue : au revers P. Pompon. Un pont, Voyez M. Vaillant, Méd. des Emper. T. I. p. 19. Strabon met un autre fleuve Achéron en Bithynie, proche d’Héraclée, &c. Mais le plus fameux de ce nom est celui que les Poëtes comptent parmi les fleuves de l’enfer : si cependant il est différent de l’Achéron de l’Epire, car on prétend que les anciens ont mis l’enfer en Epire, parce que les premiers Epirotes travailloient aux mines qu’ils trouvèrent dans leur pays, & y faisoient périr beaucoup d’esclaves.

Achéron, est aussi quelquefois un Dieu qui nâquit de Cérès dans l’île de Crète, & qui ne pouvant soutenir la lumière du jour, se retira aux enfers, & y devint un fleuve infernal, Voyez Bocace, L. 3. de la Généal. des Dieux, C. 4. Rudbecks, qui dans son Atlantique, attribue à la Suéde tout ce que les anciens ont dit de quelque pays que ce soit, prétend que l’Achéron, l’enfer, les champs élisées, sont la Suéde, & soutient que la manière dont on rendoit anciennement la justice