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de ſes parties les plus intéreſſantes, pour les raiſons preſſantes mentionnées ci-après.

« Dans toute ſociété humaine, » dit le célèbre Marquis Beccaria, « Il y a une force qui tend continuellement à conférer à une partie le haut du pouvoir & du bonheur, & à réduire l’autre au dernier degré de foibleſſe & de miſère. L’intention des bonnes loix eſt de s’oppoſer à cette force, & de répandre leur influence également & univerſellement. »

Des chefs incités par cette force pernicieuſe, & des ſujets animés par le juſte déſir de lui oppoſer de bonnes loix, ont occaſionné cette immenſe diverſité d’évènemens dont les hiſtoires de tant de nations ſont remplies. Toutes ces hiſtoires démontrent la vérité de cette ſimple poſition, que d’exiſter au gré d’un ſeul homme, ou de quelques-uns, eſt une ſource de miſère pour tous.

Ce fut ſur ce principe comme ſur un fondement ſolide que les Anglais éleverent ſi fermement l’édifice de leur gouvernement qu’il a réſiſté au tems, à la tyrannie, à la tradition, & aux guerres inteſtines & étrangeres, pendant pluſieurs ſiécles. Et comme un Auteur illuſtre & un de vos compatriotes[1] cité ci-après, obſerve, « Ils donnerent au peuple de leurs Colonies la forme de leur gouvernement propre : & ce gouvernement portant avec lui la proſpérité, on a vu ſe former de grands peuples dans les forêts même qu’ils furent envoyés habiter. »

Dans cette forme le premier & le principal

  1. Le Baron de Monteſquieu, dans l’Eſprit des Loix. Liv. 19. Chap. 27.