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veau cette scène sous un jour si comique qu’il ne put continuer, et retomba à terre, en se tenant les côtes à force de rire.

« Que va dire Fagin ? demanda le Matois, profitant d’un moment où Bates reprenait haleine.

— Quoi ? dit Charlot.

— Oui, quoi ? fit le Matois.

— Eh bien ! qu’est-ce qu’il peut dire ? demanda Charlot en coupant court à son accès de gaieté ; car le ton du Matois était sérieux. Qu’est-ce qu’il peut dire ? »

M. Dawkins, pour toute réponse, se mit à siffler, ôta son chapeau et secoua la tête en se grattant l’oreille.

« Qu’est-ce que tu veux dire par là ? demanda Charlot.

— Tra deri dera ; bah ! va-t’en voir s’ils viennent, » dit le Matois en ricanant.

C’était une explication, mais peu satisfaisante ; aussi maître Bates renouvela-t-il sa question :

« Qu’est-ce que ça signifie ? »

Le Matois ne répondit pas, mais remit son chapeau, releva sous ses bras les longues basques de son habit, se gonfla la joue avec la langue, se pinça le bout du nez à plusieurs reprises, puis tournant les talons, s’élança dans la cour. Maître Bates le suivit d’un air pensif. Quelques instants après cette conversation, le facétieux vieillard prêtait l’oreille en entendant le bruit de leurs pas dans le vieil escalier. Il était assis près du feu en face d’un pot d’étain, tenant d’une main un cervelas et un petit pain, de l’autre un couteau. Un affreux sourire passa sur son visage blême, quand il se retourna pour écouter, penchant l’oreille vers la porte, et roulant ses yeux farouches sous ses sourcils roux.

« Qu’est-ce que c’est ? dit-il en changeant de visage. Ils ne sont que deux ! leur serait-il arrivé quelque chose ? Attention ! »

Les pas se rapprochèrent et se firent bientôt entendre sur le palier. La porte s’ouvrit lentement ; le Matois et Charlot Bates entrèrent et la fermèrent derrière eux.