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De là, ils passèrent dans une cour, après avoir franchi plusieurs lourdes portes à chacune desquelles se trouvait un geôlier ; ils montèrent quelques marches et arrivèrent dans un corridor le long duquel on voyait une rangée de portes massives. Le geôlier leur fit signe de s’arrêter, et frappa à une des cellules avec son trousseau de clefs ; les deux gardiens du juif, après un court entretien à voix basse, sortirent dans le corridor en s’étirant les membres, satisfaits d’avoir un moment de répit, et firent signe aux visiteurs de suivre le geôlier dans la cellule.

Le condamné était assis sur son lit et se balançait à droite et à gauche, moins semblable à un homme qu’à une bête féroce ; il était évidemment absorbé par le souvenir de sa vie passée, car il continua à marmotter des paroles incohérentes, sans paraître s’apercevoir de la présence des nouveaux venus, qu’il prenait sans doute pour des personnages imaginaires qui jouaient un rôle dans sa vision.

« Bravo ! Charlot, disait-il… c’est un coup de maître… et Olivier donc… ah ! ah ! ah !… et Olivier donc… le voilà devenu un monsieur… Menez coucher cet enfant. »

Le geôlier prit la main d’Olivier, lui dit tout bas de n’avoir pas peur, et continua à regarder sans parler.

« Menez-le coucher, dit le juif, m’entendez-vous ? il a été… la cause indirecte de tout ceci… ça me vaudra de l’argent d’en faire un voleur… Guillaume, coupe la gorge à Bolter… ne t’inquiète pas de la jeune fille… coupe la gorge à Bolter… enfonce tant que tu pourras… scie-lui la tête.

— Fagin ! dit le geôlier.

— Me voici, dit le juif, en reprenant aussitôt l’air attentif qu’il avait gardé pendant son procès ; je suis un vieillard, milord, un pauvre vieillard.

— Voici, dit le geôlier en lui posant la main sur la poitrine pour le faire asseoir, voici quelqu’un qui veut vous voir et vous faire quelques questions, je suppose. Fagin ! Fagin ! êtes-vous un homme ?

— Je ne le serai plus longtemps, dit le juif en levant la tête avec une expression de rage et de terreur. Malédiction sur eux tous ! Quel droit ont-ils de m’envoyer à la boucherie ? »

Comme il disait ces mots, il aperçut Olivier et M. Brownlow, et se reculant jusqu’au bout du banc, il demanda ce qu’ils faisaient là.

« Du calme, Fagin, dit le geôlier en le maintenant sur le