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s’ils avaient pu seulement le voir tel qu’il était alors au fond de sa cellule.

Pendant toute la soirée, de petits groupes de deux ou trois personnes vinrent à chaque instant, à la porte de la prison, demander d’un air inquiet si l’on avait reçu avis d’une commutation de peine ; on leur répondait que non, et ils se hâtaient d’aller faire part de cette bonne nouvelle aux gens qui stationnaient en foule dans la rue ; on se montrait la porte par où sortirait le condamné, l’endroit où s’élèverait la potence. Vers minuit, la foule s’écoula comme à regret, et peu à peu la rue redevint déserte et silencieuse.

On avait fait évacuer les abords de Newgate, et disposé quelques solides barrières peintes en noir, pour contenir la foule sur laquelle on comptait, quand M. Brownlow, accompagné d’Olivier, se présenta au guichet de la prison, et exhiba un permis de pénétrer jusqu’au condamné, signé d’un des shériffs : on le fit entrer sur-le-champ.

« Est-ce que ce jeune monsieur vient avec vous ? demanda à M. Brownlow l’homme chargé de les conduire à la cellule du juif ; ce n’est pas un spectacle à montrer à un enfant, monsieur.

— Aussi ne venons-nous pas par curiosité, mon ami, répondit M. Brownlow ; si je tiens à être introduit près du criminel, c’est à cause de cet enfant, qui l’a connu dans le temps qu’il poursuivait avec succès la carrière de ses forfaits. J’ai cru qu’il était bon de le lui faire voir en ce moment, dût-il en éprouver quelque peine et quelque frayeur. »

M. Brownlow avait dit ces quelques mots assez bas pour qu’Olivier ne pût les entendre. L’homme porta la main à son chapeau, et, regardant les deux visiteurs avec une certaine curiosité, ouvrit une porte en face de celle par laquelle ils étaient entrés, et les conduisit jusqu’aux cellules par des couloirs sombres et tortueux.

« C’est par ici, dit-il en s’arrêtant dans un endroit obscur où deux ouvriers étaient en train de faire en silence quelques préparatifs ; c’est par ici qu’il doit passer. Vous pouvez voir d’ici la porte par laquelle il doit sortir. »

Il leur fit traverser une cuisine pavée, garnie de la batterie de cuivre nécessaire pour préparer la nourriture des prisonniers, et leur montra du doigt une porte. Près de là était, en haut, une grille ouverte où l’on entendait des voix et des coups de marteaux : on était en train de monter l’échafaud.