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j’en suis sûr, car elle est restée seule toute la journée, et l’homme dont elle a peur ne rentrera guère avant le jour. Venez avec moi ; vite. »

Noé fut debout en un clin d’œil sans dire un mot, car l’activité du juif l’avait gagné. Ils sortirent sans bruit de la maison, franchirent rapidement un dédale de rues et arrivèrent enfin à la porte d’une taverne que Noé reconnut pour être celle où il avait couché le soir de son arrivée à Londres.

Il était onze heures passées et la porte était fermée ; le juif siffla légèrement et elle roula doucement sur ses gonds ; ils entrèrent sans bruit et la porte se referma derrière eux.

Fagin et le jeune juif qui leur avait ouvert, osant à peine murmurer une parole, montrèrent du doigt à Noé une petite lucarne et lui firent signe de grimper jusque-là et d’observer la personne qui se trouvait dans la pièce voisine.

« Est-ce là la femme en question ? » demanda-t-il d’une voix si basse qu’on pouvait à peine l’entendre.

Le juif fit signe que oui.

« Je ne vois pas bien sa figure, dit tout bas Noé ; elle a les yeux fixés à terre et la chandelle est derrière elle.

— Ne bougez pas, » murmura Fagin ; il fit un signe à Barney qui disparut et se montra bientôt dans la pièce voisine. Sous prétexte de moucher la chandelle, il la posa devant la jeune fille à laquelle il adressa quelques mots pour lui faire lever la tête.

« Je la vois maintenant, dit l’espion.

— La voyez-vous bien ? demanda le juif.

— Je la reconnaîtrais entre mille. »

Noé quitta la lucarne, la porte s’ouvrit et la jeune fille sortit. Fagin fit retirer Noé derrière un vitrage garni de rideaux, et ils retinrent leur respiration au moment où Nancy passa à quelques pieds de leur cachette, et sortit par la porte par laquelle ils étaient entrés.

« Psit ! fit Barney qui tenait la porte ; voici le moment. »

Noé échangea un regard avec Fagin et s’élança dehors.

« À gauche, lui dit tout bas Barney. Prenez le trottoir de l’autre côté de la rue, et attention ! » Noé obéit, et, à la lueur du gaz, il aperçut la jeune fille en marche à quelque distance devant lui ; il n’avança qu’autant qu’il jugea prudent de le faire, et se tint de l’autre côté de la rue pour mieux observer les mouvements de Nancy. À plusieurs reprises elle regarda autour d’elle avec inquiétude ; une fois même elle s’arrêta pour lais-