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jours je me le figurais, ce cher petit, à côté de mes autres enfants qui sont morts ! J’étais encore jeune alors ! »

Pendant ce temps-là, tantôt elle s’éloignait d’Olivier pour mesurer de combien il avait grandi, tantôt elle le serrait contre son sein, lui passant avec amour les mains dans les cheveux, riant et pleurant tour à tour, penchée sur son épaule.

M. Brownlow, laissant Mme Bedwin et Olivier causer à loisir, passa dans une autre pièce, et là il apprit de Rose tous les détails relatifs à son entrevue avec Nancy, détails qui lui causèrent une grande surprise en même temps qu’une grande inquiétude. Rose expliqua pourquoi, au premier abord, elle n’avait pas voulu confier le secret à M. Losberne ; M. Brownlow jugea qu’elle avait agi avec prudence, et résolut sur-le-champ d’avoir un entretien sérieux avec le digne docteur à ce sujet. Voulant mettre ce dessein à exécution le plus tôt possible, il décida qu’il se rendrait à l’hôtel pendant la matinée et que Mme Maylie serait informée avec précaution de tout ce qui se serait passé. Ces préliminaires arrangés, Rose et Olivier retournèrent à la maison.

Rose ne s’était nullement exagéré la colère probable du bon docteur : car l’histoire de Nancy venait à peine de lui être exposée, qu’il proféra des menaces terribles et des imprécations. Il jura qu’elle ne risquait rien et qu’il l’abandonnerait aux recherches combinées de MM. Blathers et Duff ; puis il mit son chapeau pour aller chercher immédiatement l’assistance de ces dignes personnages. Il est probable que, dans sa première explosion, il aurait mis son projet à exécution, sans réfléchir un seul instant aux conséquences, s’il n’avait pas été retenu, d’abord par le poignet de M. Brownlow, aussi fort et aussi irascible que lui, et, en second lieu, par une série d’arguments et de raisonnements destinés à lui faire abandonner une pareille folie.

« Alors, que diable voulez-vous que nous fassions ? dit l’impétueux docteur quand ils eurent rejoint les deux dames. À moins que nous n’employions notre temps à voter des remerciements à cette bande de voleurs et de voleuses et à les prier de vouloir bien accepter chacun cent livres sterling ou tout ce que vous voudrez, comme une petite marque de notre estime et une très faible preuve de notre reconnaissance pour leur bienveillance à l’égard d’Olivier !

— Non, non, je ne dis pas cela, répliqua M. Brownlow en riant ; mais il nous faut agir avec douceur et prudence.