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minée, comme si elle n’avait pas entendu un mot de la conversation.

« Fagin, dit Sikes, rompant tout à coup le silence, me reviendra-t-il cinquante souverains hors part, si nous en venons à bout du dehors ?

— Oui, dit le juif, comme s’il sortait subitement d’un rêve prolongé.

— Est-ce dit ? demanda Sikes.

— Oui, oui, mon cher, » reprit le juif en serrant la main de Sikes.

Ses yeux étincelaient, et tous les muscles de son visage trahissaient l’émotion que lui causait cette demande.

« Dans ce cas, dit Sikes, en repoussant la main du juif avec dédain, ça se fera quand vous voudrez. L’avant-dernière nuit, nous avons escaladé, Tobie et moi, le mur du jardin, et sondé les volets et les battants de la porte. La maison est barricadée la nuit comme une prison ; mais il y a un endroit que nous pouvons briser sans bruit.

— Où donc, Guillaume ? demanda le juif avec empressement.

— Vous savez, dit tout bas Sikes, quand on a traversé la pelouse…

— Oui, oui, dit le juif, en avançant la tête et en ouvrant de grands yeux.

— Hum ! fit Sikes, s’arrêtant court sur un léger signe de tête de la jeune fille, qui lui faisait remarquer l’expression de figure du juif. Que vous importe de savoir où c’est ? Vous ne pouvez rien faire sans moi, je le sais ; mais il est bon d’être toujours sur ses gardes quand on a affaire à vous.

— Comme vous voudrez, mon cher, comme vous voudrez, répondit le juif en se mordant les lèvres. Et il n’y a besoin de personne autre que de vous et de Tobie ?

— Non, dit Sikes : il ne faut que nous deux, avec un vilebrequin et un enfant ; le premier, nous l’avons : à vous de nous trouver le second.

— Un enfant ! s’écria le juif ; oh ! alors, il faut s’introduire par un panneau, hein ?

— Encore une fois, que vous importe ? répliqua Sikes, il me faut un enfant, et qui ne soit pas gros. Dieu ! ajouta-t-il après un instant de réflexion ; si j’avais seulement le petit garçon de Ned, le ramoneur !… il l’empêchait tout exprès de grandir, et le louait à l’occasion ; mais le père s’est fait pincer, et alors la société des jeunes délinquants arrive, enlève l’enfant à un