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Le style de cette réponse, aussi bien que la voix de celui qui parlait, n’étaient pas inconnus à Olivier ; mais il était impossible, dans l’obscurité, de voir quel était cet interlocuteur.

« Éclaire-nous, dit Sikes ; autrement nous allons nous casser le cou ou marcher sur les pattes du chien, et, alors, gare aux jambes, je ne vous dis que ça.

— Attendez un instant et vous aurez de la lumière, » répondit la voix. On entendit les pas de quelqu’un qui s’éloignait, et au bout d’une minute on vit paraître le sieur Jack Dawkins, autrement dit le rusé Matois, tenant une chandelle fichée dans un bâton fendu.

Le jeune filou ne s’arrêta pas à renouer connaissance avec Olivier autrement que par une grimace, et fit signe aux visiteurs de le suivre au bas de l’escalier ; ils traversèrent une cuisine où l’on ne voyait que les quatre murs, et ouvrant la porte d’une pièce basse et humide, qui donnait sur une petite cour fangeuse, ils furent accueillis par de grands éclats de rire.

« Oh ! la bonne tête ! s’écria maître Charles Bates, en riant à se tenir les côtes. Le voilà ! ah ! le voilà ! regardez-le donc, Fagin : mais voyez donc la mine qu’il fait ! c’est trop fort ! En voilà une bonne farce ! Je n’en puis plus ; il y a de quoi mourir de rire. Tenez-moi, ou j’étouffe ! »

La gaieté de maître Bates n’eut plus de bornes ; il se laissa tomber tout de son long sur le plancher, agitant convulsivement ses jambes, et pendant cinq minutes il ne put modérer ses transports. Enfin il se remit sur pied, saisit la chandelle que tenait le Matois, et s’approchant d’Olivier, il l’examina des pieds à la tête, tandis que le juif, ôtant son bonnet, saluait respectueusement et à plusieurs reprises l’enfant abasourdi ; quant au Matois, sournois comme il l’était, et peu enclin à rire dès qu’il avait l’occasion d’exercer ses talents, il fouillait les poches d’Olivier avec un soin minutieux.

« Voyez donc, Fagin, comme il est attifé ! dit Charlot en approchant tellement la lumière du vêtement neuf d’Olivier, qu’il faillit l’enflammer ; regardez-moi ça. Drap numéro un, et quelle coupe de muscadin ! oh ! c’est trop drôle ! Et des livres, encore ; mais, Fagin, c’est un monsieur tout craché.

— Charmé de vous voir en si bon état, mon cher, dit le juif en saluant ironiquement Olivier jusqu’à terre ; le Matois vous donnera un autre vêtement, mon cher, de crainte que vous