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nouveaux ornements, sous l’averse de petits morceaux de papier que Nicolas venait de faire pleuvoir sur elle), regarda Nicolas, et, toujours avec la même dignité imperturbable, répondit par ce simple mot :

« Non !

— En ce cas, dit Nicolas en lui prenant son grand chapeau, qu’il fit sauter du côté de la porte, je vous conseille, monsieur, de suivre cette partie intéressante de votre vêtement, si vous ne voulez pas vous exposer à une cruelle déception, avant qu’il soit seulement deux secondes.

— Dites donc, Johnson, s’écria M. Folair, perdant en un moment toute sa dignité, pas de ces bêtises-là ; vous savez bien qu’on ne plaisante pas avec la garde-robe des gens.

— Détalez, reprit Nicolas ; il faut que vous soyez bien impudent pour vous être chargé d’un tel message, polisson que vous êtes.

— Allons, allons, dit M. Folair déroulant son cache-nez et se défaisant petit à petit de cet agrément. Là ! en voilà bien assez.

— Assez ! cria Nicolas en s’avançant vers lui ; allons, filez, monsieur.

— Allons ! allons ! écoutez-moi donc, disait M. Folair en agitant ses mains pour lui faire signe de se calmer ; ce n’était pas sérieux ; je ne m’en suis chargé que pour rire.

— Eh ! bien, quand vous voudrez rire une autre fois, vous ferez bien d’y faire plus d’attention, dit Nicolas, ou on pourrait vous montrer que c’est une plaisanterie qui n’est pas sans danger, que de venir proposer à un homme de lui tirer le nez. Et le cartel, dites-moi, est-il aussi pour rire ?

— Non, non, c’est bien ce qu’il y a de plus plaisant : il est très sérieux, au contraire, et c’est une affaire d’honneur. »

Nicolas ne put s’empêcher de rire en voyant devant lui cet original, si bien fait en tout temps pour mettre plutôt en gaieté qu’en colère, mais plus risible alors que jamais, un genou en terre pour ramasser son chapeau, son vieux chapeau rond, et simulant la plus vive inquiétude pour le duvet de son couvre-chef compromis peut-être dans cette chute, le brosser diligemment avec sa manche, quoiqu’il sût bien que sa coiffure était chauve depuis plusieurs mois.

« Allons ! monsieur, dit Nicolas riant malgré lui. Ayez la bonté de vous expliquer.

— Eh bien ! je vais vous dire comment c’est venu, dit M. Folair prenant une chaise avec le plus grand sang-froid. Depuis votre entrée dans la troupe, Lenville n’a plus joué que les se-