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sieur, qui l’exige. » Là-dessus M. Folair s’arrêta d’un air composé, plongea la main dans le chapeau déjà décrit, en tira un petit morceau de papier gris plié avec soin, le développa, y prit une lettre à laquelle il avait servi d’enveloppe pour la tenir plus propre, et la passa à Nicolas en disant : « Ayez la bonté de lire cela, monsieur. »

Nicolas n’en revenait pas. Cependant il prit la lettre, rompit le cachet, tout en suivant des yeux M. Folair qui, fronçant le sourcil et plissant le coin de sa bouche pour plus de dignité, restait assis sans bouger les yeux obstinément fixés sur le plafond. La lettre était adressée à Johnson Esq… tout court, par l’intermédiaire de Auguste Folair, et l’étonnement de Nicolas alla toujours croissant, quand il la trouva conçue en ces termes laconiques :

« M. Lenville présente ses très-humbles respects à M. Johnson et le prie d’avoir l’obligeance de lui faire savoir à quelle heure il lui sera plus commode, demain matin, de venir le trouver au théâtre pour se faire tirer le nez par M. Lenville en présence de la compagnie.

« M. Lenville recommande à M. Johnson de ne pas négliger de lui donner un rendez-vous, parce qu’il a invité deux ou trois artistes de ses amis à assister à la cérémonie, et qu’il ne peut pas absolument se dispenser de leur donner ce plaisir.

« Portsmouth, mardi soir, etc. »

Tout indigné qu’il était de cette impertinence, il trouvait cependant ce cartel si absurde, qu’il fut obligé de se mordre les lèvres et de relire la lettre deux ou trois fois avant de pouvoir reprendre la gravité et le sérieux nécessaires pour s’adresser au commissionnaire de son ennemi, dont les yeux n’avaient pas un seul moment perdu de vue le plafond, et dont l’expression n’avait pas varié davantage.

« Connaissez-vous, monsieur, lui demanda-t-il à la fin, le contenu de cette lettre ?

— Oui, répondit M. Folair en se détournant pour le regarder et en reportant avec soin ses yeux vers le plafond.

— En ce cas, je vous trouve bien hardi de me l’apporter, monsieur, dit Nicolas en la déchirant en mille morceaux qu’il jeta à la tête du messager. Vous n’avez donc pas eu peur de vous faire jeter du haut en bas des escaliers à coups de pied dans le derrière ? »

M. Folair tourna la tête (cette tête qui venait de recevoir de