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des lèvres, sir Mulberry ne s’en gêna pas pour rire franchement, et Pyke et Pluck rirent tous deux aux éclats.

« Mais où donc est mon beau-frère, monsieur Mulberry ? demanda Mme Nickleby ; je serais ici déplacée s’il n’y venait pas : j’espère qu’il ne tardera pas.

— Pyke, » demanda sir Mulberry, tirant de sa poche son cure-dent et se dandinant renversé dans son fauteuil, comme s’il ne voulait pas se donner la peine d’inventer une réponse mensongère à cette question : « où est Ralph Nickleby ?

— Pluck, dit Pyke singeant le baronnet et passant le mensonge à son ami ; où est Ralph Nickleby ? »

M. Pluck allait répliquer par quelque réponse évasive, lorsque le bruit causé par l’entrée d’une société particulière dans la loge voisine parut attirer l’attention de ces quatre messieurs qui échangèrent des mines très significatives. Et quand les nouveaux spectateurs entamèrent ensemble une conversation, sir Mulberry eut tout à coup l’air d’y prêter une oreille très attentive, et supplia les autres de ne pas souffler un mot, pas un mot.

« Pourquoi donc ? dit Mme Nickleby ; qu’est-ce qu’il y a ?

— Chut ! répliqua sir Mulberry en lui posant la main sur le bras. Lord Frédérick, est-ce que vous ne reconnaissez pas le son de cette voix ?

— Le diable m’emporte si je ne l’ai pas prise pour celle de Mlle Nickleby.

— Comment, milord ? cria Mme Nickleby en avançant la tête devant la draperie ; mais, en effet, Catherine ! c’est bien ma chère Catherine.

— Quoi ! c’est vous ! vous ici, maman ! Est-il possible ?

— Si c’est possible ? Vous voyez.

— Mais qui… qui donc, au nom du ciel, avez-vous là avec vous, maman ? dit Catherine se retirant en arrière à la vue d’un homme qui lui souriait et lui envoyait des baisers.

— Qui donc voulez-vous que ce soit, ma chère ? répondit Mme Nickleby se penchant du côté de Mme Wititterly et élevant un peu la voix pour mieux se faire entendre de cette dame. Je suis avec M. Pyke, M. Pluck, sir Mulberry Hawk et lord Frédérick Verisopht.

— Dieu du ciel ! se dit Catherine ; comment peut-elle se trouver en pareille société ! »

Cette pensée traversa son esprit comme un éclair, et en même temps, au milieu de cette surprise rapide, le souvenir de ce qui s’était passé au grand dîner de Ralph vint l’assaillir avec tant