Page:Dickens - Nicolas Nickleby, trad. Lorain, 1885, tome 1.djvu/378

Cette page a été validée par deux contributeurs.

excuse à faire valoir auprès d’elle : c’étaient ses bonnes intentions, auxquelles il la suppliait de croire avec confiance.

« Mais, continua-t-il, quand je vois, d’un côté, tant de beauté, tant de charmes, et, de l’autre, tant d’ardeur, tant de dévouement, je… Ah ! pardonnez-moi, madame, c’est sans intention que j’y revenais encore. Voyons, Pyke, parlons d’autre chose.

— Nous avons promis, dit Pyke, à sir Mulberry et à lord Frédérick, de venir ce matin nous informer si vous n’aviez pas pris un rhume hier au soir.

— Pas le moins du monde, répondit Mme Nickleby. Veuillez bien remercier Sa Seigneurie et sir Mulberry de leur exquise politesse ; mais je n’ai point attrapé de rhume, et c’est d’autant plus singulier que j’y suis en effet sujette, très sujette. J’en ai gagné un, un jour, je crois que c’était en 1817. Voyons, quatre et cinq font neuf… oui, c’était bien en 1817. J’ai cru que je n’en guérirais jamais ; mais sérieusement, là, j’ai bien cru que je n’en guérirais jamais. Et, en effet, je n’ai pu m’en débarrasser qu’à l’aide d’un remède dont vous n’avez peut-être jamais entendu parler, monsieur Pluck. Vous prenez quatre litres d’eau presque bouillante, avec une livre de sel gris, douze sous de son première qualité, et vous y tenez la tête… qu’est-ce que je dis donc, la tête ?… les pieds pendant vingt minutes, tous les soirs au moment de vous coucher. C’est une recette très extraordinaire, n’est-ce pas ? J’en ai fait usage, pour la première fois, le lendemain de Noël, et, pas plus tard qu’à la mi-avril, mon rhume était parti. Vraiment, quand on y pense, cela tient du prodige, car je l’avais déjà depuis le commencement de septembre.

— Mais c’était une abominable calamité, dit M. Pyke.

— Parfaitement horrible, s’écria M. Pluck.

— Heureusement que nous avons la consolation d’apprendre que Mme Nickleby s’en est bien remise, n’est-ce pas, Pluck ? dit M. Pyke.

— C’est là la circonstance qui donne au récit un si palpitant intérêt, répliqua M. Pluck.

— Mais à propos, dit Pyke, comme se rappelant tout à coup quelque chose qu’il avait oublié, il ne faut pas que le plaisir de cet entretien nous fasse perdre de vue notre mission ; nous sommes venus en mission, madame Nickleby.

— En mission ! s’écria la bonne dame, qui vit aussitôt se présenter à son esprit, sous les plus vives couleurs, une demande en mariage pour Catherine.

— De la part de sir Mulberry, reprit Pyke. Vous devez vous ennuyer ici, toute seule ?