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tenir compagnie que pour l’assister dans les soins du ménage, se précipita dans la chambre avec tous les symptômes d’une agitation inaccoutumée, lui annonçant qu’il y avait deux messieurs qui attendaient dans le corridor la permission de monter la voir.

« Bonté divine ! crie Mme Nickleby ajustant à la hâte son tour et son bonnet, si c’étaient… Quel ennui ! les faire attendre si longtemps dans le corridor. Mais allez donc, stupide que vous êtes, et priez-les de monter. »

Pendant que la bonne allait exécuter cette commission, Mme Nickleby se dépêcha de fourrer dans un buffet tous les vestiges de son déjeuner. Elle n’eut après cela que le temps bien juste de s’asseoir et de composer son visage, avant que les deux visiteurs, qui lui étaient parfaitement inconnus, se fussent présentés devant elle.

« Comment vous portez-vous ? dit un de ces messieurs, appuyant très fort sur le dernier mot de sa question.

Comment vous portez-vous ? » dit l’autre monsieur, qui, pour varier ce salut uniforme, aima mieux appuyer sur le premier mot.

Mme Nickleby fit la révérence ; sourit, fit une seconde révérence, et remarqua en même temps, en se frottant les mains, qu’elle n’avait pas… réellement… l’honneur de…

« De nous connaître, dit le premier. C’est nous qui avons à nous en plaindre, madame Nickleby. N’est-ce pas nous qui avons à nous en plaindre, Pyke ?

— C’est nous, Pluck, sans aucun doute, répondit l’autre.

— Nous en avons souvent exprimé le regret, je crois. Qu’en dites-vous, Pyke ?

— Bien souvent, Pluck, répondit son partner.

— Heureusement qu’aujourd’hui, dit le premier interlocuteur, nous goûtons ce bonheur après lequel nous avons tant de fois langui et soupiré. Voyons, Pyke, avons-nous ou n’avons-nous pas langui et soupiré après ce bonheur ?

— Vous me faites là une question inutile, Pluck ; vous savez bien ce qui en est, dit Pyke d’un ton de reproche.

— Vous l’entendez, madame, dit M. Pluck se retournant vers elle, vous entendez le témoignage irrécusable de mon ami Pyke ? À propos, cela me rappelle que, dans une société civilisée, on ne doit pas s’affranchir des formes de la politesse. Permettez-moi de vous présenter Pyke, madame Nickleby. »

M. Pyke, la main sur le cœur, s’inclina aussi bas qu’il le put.

« À présent, dit M. Pluck, faut-il que je me présente moi--