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fallait voir les dames sangloter de toutes parts ; et quand il se cacha derrière un rideau dans l’obscurité, et que le mauvais parent porta des coups de son épée partout, excepté à l’endroit où on voyait parfaitement passer ses jambes, c’est alors qu’un frisson d’inquiétude et de crainte électrisa l’assemblée. Son port, sa taille, sa démarche, son air, tout ce qu’il disait, tout ce qu’il faisait était accueilli avec la même faveur. Il y avait une salve d’applaudissements à la fin de toutes ses tirades, et, lorsque, en dernier lieu, dans la scène de la pompe et des cuviers Mme Grudden alluma les feux du Bengale, et que tous les acteurs de la troupe qui n’avaient pas de rôle à jouer dans la scène vinrent se former en groupes ou se précipiter dans toutes les directions, non pas que cela fût nécessaire à l’action, mais seulement pour augmenter l’effet du tableau final, alors l’auditoire qui, pendant ce temps-là, s’était accru considérablement, s’abandonna à des transports d’enthousiasme tels que les murs de cette enceinte n’en avaient pas entendu depuis bien des années.

Bref, le succès de la pièce nouvelle et celui du nouvel acteur furent complets tous les deux, et quand on rappela, à la fin de la pièce, Mlle Snevellicci, ce fut Nicolas qui eut l’honneur de l’amener sur la scène et de partager avec elle les applaudissements.


CHAPITRE XXV.

Concernant une demoiselle qui vient de Londres rejoindre la compagnie avec un vieil amateur qu’elle traîne à sa suite : cérémonie touchante qui s’ensuit.

Comme la pièce nouvelle était décidément un succès, elle fut annoncée pour tous les soirs de spectacle jusqu’à nouvel ordre, et l’on réduisit de trois à deux les jours de relâche par semaine. Nicolas toucha des témoignages plus solides encore de la faveur publique, car, dès le samedi suivant, il empochait, par l’intermédiaire de l’infatigable Mme Grudden, la somme de trente-sept francs cinquante. Cette rémunération, qui n’était pas à dédaigner, n’était rien encore en comparaison de l’honneur et de la réputation qui s’attachèrent à sa personne. M. Curdle lui fit hommage d’une brochure de sa façon, dédiée au théâtre, avec un autographe de sa main (trésor inestimable déjà par lui-même),