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NICOLAS NICKLEBY.

Comme Smike n’allait pas plus mal, et que la secousse qu’il avait récemment éprouvée expliquait suffisamment ses souffrances, Nicolas avait la consolante espérance qu’il se rétablirait bientôt. Sa sœur et sa mère la partageaient. Smike, objet de leur commune sollicitude, ne semblait point abattu, et répondait journellement qu’il se trouvait mieux que la veille. Leurs craintes ne tardèrent donc pas à se dissiper.

Mais bien des changements s’étaient opérés, et il importe préalablement d’en instruire le lecteur.

Si les frères Cheeryble, trouvant Nicolas digne de toute leur confiance, lui donnaient chaque jour de nouvelles preuves d’affection, ils n’avaient pas moins de prévenance pour les siens. Divers petits présents faits à madame Nickleby, et toujours choisis parmi les objets qui lui étaient le plus nécessaires, contribuaient à l’embellissement de leur demeure. Le petit écrin de Catherine se garnissait ; et, si M. Charles et M. Edwin ne venaient pas tous les dimanches, Tim Linkinwater entrait souvent pour se reposer après ses promenades du soir, et, par un hasard étrange, les courses de M. Frank Cheeryble le conduisaient du côté de la maison au moins trois fois par semaine.

Un matin, un coup frappé à la porte annonça la visite de miss la Creevy. Madame Nickleby oublia tout pour l’interroger sur l’omnibus d’où elle descendait, lui demandant si elle avait eu tel ou tel conducteur, si elle avait retrouvé le parasol qu’elle avait laissé dans la voiture la semaine dernière, et, en dernier lieu, si elle avait aperçu Nicolas.

— Non, répondit miss la Creevy ; mais j’ai vu ce cher M. Linkinwater. — Je parierais, dit madame Nickleby, qu’il faisait sa promenade du soir et se disposait à venir se reposer ici avant de retourner à la Cité. — Je le crois, d’autant plus que le jeune M. Cheeryble était avec lui. — Ce n’est pas là, dit Catherine, une raison pour que M. Linkinwater vienne ici. — Je crois le contraire, ma chère, dit miss la Creevy en regardant fixement Catherine, car un jeune homme comme M. Frank n’est pas très-grand marcheur, et j’observe qu’en général il se sent fatigué et a besoin de beaucoup de repos quand il est arrivé jusqu’ici. Mais où est mon ami ? Est-ce qu’il s’est encore sauvé ? — Oui, où est M. Smike ? dit madame Nickleby ; il était ici tout à l’heure.

Après une légère enquête, la bonne dame découvrit, à son grand étonnement, que Smike était allé se coucher.

— Eh bien ! dit madame Nickleby, c’est un être bien étrange. Mercredi dernier…