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que des doutes s’étaient élevés, qu’on allait procéder à une enquête, et que peut-être après cela il obtiendrait un verdict de libération. Le soir venu, on l’avait fait entrer dans une salle où plusieurs gentlemen étaient réunis. Parmi ceux-ci se trouvait au premier rang son bon maître qui s’avança et le prit par la main. Kit apprit alors que son innocence était reconnue, et qu’il était renvoyé de la plainte. Il ne put distinguer la personne qui lui parlait, mais il se tourna du côté d’où partait la voix, et en essayant de répondre il tomba évanoui.

On le rappela à lui-même ; on lui dit de se contenir et de supporter en homme la prospérité. Quelqu’un ajouta qu’il devait penser à sa pauvre mère. Ah ! c’était parce qu’il pensait tant à elle, que cette heureuse nouvelle l’avait anéanti. On l’entoura, on lui dit que la vérité s’était fait jour ; que partout, en ville comme au dehors, la sympathie avait éclaté pour son malheur. Ce n’était pas là ce qui le touchait ; sa pensée ne s’étendait pas au delà de la maison. Barbe avait-elle eu connaissance de tout ce qui s’était passé ? Qu’avait-elle dit ? Que lui avait-on dit ? Il n’avait pas d’autre parole.

On lui fit boire un peu de vin. On lui adressa quelques mots affectueux jusqu’à ce qu’il fût remis ; alors il put entendre distinctement et remercier ses protecteurs.

Il était libre de partir. M. Garland émit l’avis d’emmener Kit, maintenant qu’il se sentait beaucoup mieux. Les gentlemen l’entourèrent et lui pressèrent les mains. Il leur exprima toute sa reconnaissance pour l’intérêt qu’ils lui avaient témoigné et pour les bonnes promesses qu’ils lui faisaient ; mais cette fois encore il fut impuissant à parler, et il lui eût été bien difficile de marcher s’il ne se fût appuyé sur le bras de son maître.

Comme on traversait les sombres couloirs, on rencontra quelques employés de la prison qui attendaient Kit pour le féliciter dans leur rude langage sur sa mise en liberté. Le lecteur de journal était de ce nombre : mais ses compliments, loin de partir du cœur, avaient quelque chose de morose. Il semblait considérer Kit comme un intrus, comme un intrigant qui, sous de faux prétextes, avait obtenu son admission dans la prison et joui d’un privilège auquel il n’avait pas droit.

« C’est, pensait-il, un excellent jeune homme ; mais il n’avait pas affaire ici, et le plus tôt qu’il en sortira sera le mieux. »

La dernière porte se ferma derrière Kit et ses amis. Ils avaient