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un salut affectueux. Plusieurs qui étaient venus d’une distance de trois à quatre milles, lui apportaient leur modeste présent ; et les plus pauvres, les plus infimes avaient au moins pour elle des vœux sortis du cœur.

Elle avait voué une tendresse toute particulière aux jeunes enfants qu’elle avait vus pour la première fois jouant dans le cimetière. L’un d’eux, celui qui avait parlé de son frère, était son petit favori, son ami ; souvent, à l’église, il se tenait assis auprès d’elle, ou bien il montait avec elle jusqu’au sommet de la tour. Il était heureux de la soutenir, ou de s’imaginer du moins qu’il lui prêtait appui, et bientôt ils devinrent inséparables.

Il advint qu’un jour, comme Nelly était seule, dans le vieux cimetière, occupée à lire, le jeune garçon y accourut, les yeux pleins de larmes, et après l’avoir tenue un moment à quelque distance de lui en la contemplant fixement, jeta avec une ardeur passionnée ses petits bras autour du cou de sa jeune amie.

« Qu’est-ce donc ? dit Nelly cherchant à le calmer. Qu’y-a-t-il ?

— Elle n’en est pas encore un ! … s’écria l’enfant l’embrassant plus étroitement encore. Non, non ! … Elle n’en est pas un ! … »

Elle le regarda avec surprise, et lui débarrassant le front des cheveux qui le couvraient, elle demanda en l’embrassant au petit homme ce qu’il voulait dire.

« Chère Nell, s’écria-t-il, il ne faut pas que vous en soyez un ! … Nous ne les revoyons plus. Jamais ils ne viennent jouer avec nous, jamais ils ne viennent nous parler. Restez telle que vous êtes. Vous êtes bien mieux comme ça.

— Je ne vous comprends pas… Expliquez-vous.

— Eh bien, ils disent, reprit le petit garçon en la regardant en face, ils disent que vous serez un ange avant que les oiseaux aient recommencé à chanter. Mais vous ne le voulez pas, n’est-il pas vrai ? Nell, ne nous quittez pas, quoique le ciel soit bien brillant. Ne nous quittez pas ! … »

Nelly baissa la tête, et couvrit son visage de ses mains.

« C’est bon, c’est bon, elle ne veut pas ! s’écria le petit garçon, se réjouissant à travers ses larmes. N’est-ce pas que vous n’irez pas au ciel ? Vous savez combien ça nous ferait de peine. Chère Nell, dites-moi que vous resterez avec nous. Oh ! je vous en prie, je vous en prie, dites-moi que vous le voulez ! »