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enfant, mais ils se retournèrent vers le cimetière avec un soupir.






CHAPITRE XVI.


Dès le matin, Nelly fut levée de bonne heure : après s’être acquittée d’abord des soins du ménage, après avoir tout apprêté pour le maître d’école, bien assurément contre le désir de cet excellent homme, car il eût voulu lui épargner cette peine, elle détacha d’un clou enfoncé près de la cheminée un petit trousseau de clefs que le vieux bachelier lui avait solennellement remis la veille, et elle sortit seule pour aller visiter l’église.

Le ciel était serein et brillant, l’air transparent, parfumé de la fraîche senteur des feuilles récemment tombées, et vivifiant pour les sens. Le cours d’eau voisin étincelait et coulait avec un murmure mélodieux ; la rosée scintillait sur les tertres verts, comme des larmes versées sur les morts par les esprits bienfaisants.

Quelques jeunes enfants, aux figures épanouies, jouaient à cache-cache parmi les tombes. Ils avaient avec eux un petit poupon qu’ils avaient posé tout endormi sur la sépulture d’un enfant dans un lit de feuilles sèches. Cette sépulture était toute récente ; peut-être en ce lieu gisait une petite créature qui, douce et patiente dans sa maladie, s’était souvent mise là sur son séant pour regarder ces heureux joueurs, avant de se reposer tout à fait à la même place.

Nelly s’arrêta près de la troupe mutine et demanda à l’un des enfants :

« De qui est-ce là le tombeau ?

— Ce n’est pas un tombeau, répondit celui-ci ; c’est un jardin… le jardin de mon frère. Il est plus vert que les autres jardins, et les oiseaux l’aiment bien, parce que mon frère avait l’habitude de donner à manger aux oiseaux. »

Tout en parlant, l’enfant considérait Nelly avec un sourire. Il s’agenouilla, s’étendit un moment en appuyant sa joue contre le gazon, puis se releva et s’enfuit gaiement en quelques bonds rapides.