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inexpérience m’amènent à cette conclusion : que, si la franchise en paroles est rare dans cette partie du monde, la franchise en action y est plus rare encore. Si mon langage vous choque, monsieur, j’espère que ma conduite, quand vous me connaîtrez, me fera trouver grâce à vos yeux. »

M. Witherden parut un peu déconcerté par la tournure que le vieux gentleman donnait à la conversation. Quant à Kit, il regardait l’étranger avec ébahissement et la bouche ouverte, se demandant quelle sorte de discours il allait lui adresser à lui, lorsqu’il parlait si librement, si franchement à un notaire. Ce fut cependant sans dureté, mais avec une sorte de vivacité et d’irritabilité nerveuse que l’étranger, s’étant tourné vers Kit, lui dit :

« Si vous pensez, mon garçon, que je poursuis ces recherches dans un autre but que de trouver et de servir ceux que je désire rencontrer, vous me faites injure, et vous vous faites illusion. Ne vous y trompez donc pas, mais fiez-vous à moi. Le fait est, messieurs, ajouta l’étranger, se tournant vers le notaire et son clerc, que je me trouve dans une position pénible et inattendue. Je me vois tout à coup arrêté, paralysé dans l’exécution de mes projets par un mystère que je ne puis pénétrer. Tous les efforts que j’ai faits à cet égard n’ont servi qu’à le rendre plus obscur et plus sombre ; j’ose à peine travailler ouvertement à en poursuivre l’explication, de peur que ceux que je recherche avec anxiété ne fuient encore plus loin de moi. Je puis vous assurer que, si vous me prêtez assistance, vous n’aurez pas lieu de le regretter, surtout si vous saviez combien j’ai besoin de votre concours, et de quel poids il me délivrerait. »

Dans cette confidence, il y avait un ton de simplicité qui provoqua une prompte réponse du brave notaire. Il s’empressa de dire, avec non moins de franchise, que l’étranger ne s’était pas trompé dans ses espérances, et que, pour sa part, s’il pouvait lui être utile, il était tout à son service.

Kit subit alors un interrogatoire, et fut longuement questionné par l’inconnu sur son ancien maître et sa petite-fille, sur leur genre de vie solitaire, leurs habitudes de retraite et de stricte réclusion. Toutes ces questions et toutes les réponses portèrent sur les sorties nocturnes du vieillard, sur l’existence isolée de l’enfant pendant ces heures d’absence, sur la maladie du grand-père et sa guérison, sur la prise de possession de la maison