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de plume et une pendule hebdomadaire, qui depuis dix-huit ans au moins n’avait pas marché, et dont une aiguille avait été arrachée pour servir de cure-dent. Daniel Quilp enfonça son chapeau sur ses sourcils, grimpa sur le bureau qui offrait une surface plane, y étendit sa petite personne, et s’y établit pour dormir, en homme qui n’en était pas à son apprentissage, comptant bien réparer son insomnie de la veille par une sieste longue et solide.

Si le sommeil fut profond, il ne dura pas longtemps ; car au bout d’un quart d’heure à peine, le jeune homme ouvrit la porte et avança sa tête qui ressemblait à un paquet d’étoupe mal peignée. Quilp avait le sommeil léger ; il s’éveilla aussitôt.

« Il y a là quelqu’un pour vous, dit le jeune homme.

— Qui ?

— Je ne sais pas.

— Demandez le nom, chien que vous êtes ! » dit Quilp saisissant le léger morceau de bois dont nous avons parlé et le lançant avec une telle dextérité, que le jeune homme n’eut que le temps de disparaître pour l’éviter.

Peu soucieux d’affronter de nouveau de pareils projectiles, le garçon envoya prudemment à sa place la personne même qui avait été la cause du réveil de Quilp. À sa vue, celui-ci s’écria :

« Quoi ! c’est vous, Nelly !

— Oui, » dit la jeune fille, ne sachant si elle devait entrer ou se retirer ; car le nain venait de se soulever, et avec ses cheveux pendant en désordre et le mouchoir jaune dont sa tête était couverte, il faisait peur à voir. « Ce n’est que moi, monsieur.

— Venez, dit Quilp sans quitter son lit de camp. Venez ; mettez-vous là ; veuillez regarder au dehors ; n’y a-t-il pas là un garçon qui marche sur la tête ?

— Non, monsieur. Il est sur ses pieds.

— Vous en êtes bien certaine ? C’est bien. À présent, venez et fermez la porte. Vous avez une commission pour moi, Nelly ? »

L’enfant lui présenta une lettre dont M. Quilp se disposa à prendre connaissance sans changer de position, si ce n’est pour se mettre un peu sur le côté et appuyer son menton sur sa main.