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mon cher monsieur, quelles nouvelles de votre affaire ? Eh ? vous avez entendu parler de nos amis de Freeman’s Court ? Ils ne se sont pas endormis ; je sais cela. Ah ! ce sont des gaillards bien madrés, bien madrés, en vérité. »

En concluant cet éloge, M. Perker prit une prise de tabac emphatique, comme un tribut à la madrerie de MM. Dodson et Fogg.

« Ce sont de fameux coquins ! dit M. Pickwick.

— Oui, oui, reprit le petit homme. C’est une affaire d’opinion, comme vous savez, et nous ne disputerons pas sur des mots. Il est tout simple que vous ne considériez pas ces choses là d’un point de vue professionnel. Du reste, nous avons fait tout ce qui était nécessaire. J’ai retenu maître Snubbin.

— Est-ce un habile avocat ? demanda M. Pickwick.

— Habile ! Bon Dieu, quelle question m’adressez-vous là, mon cher monsieur ; mais maître Snubbin est à la tête de sa profession. Il a trois fois plus d’affaires que les meilleurs avocats : il est engagé dans tous les procès de ce genre. Il ne faut pas répéter cela au dehors, mais nous disons, entre nous, qu’il mène le tribunal par le bout du nez. »

Le petit homme prit une autre prise de tabac, en faisant cette communication à M. Pickwick, et l’accompagna d’un geste mystérieux.

« Ils ont envoyé des citations à mes trois amis, dit le philosophe.

— Ah ! naturellement ; ce sont des témoins importants : ils vous ont vu dans une situation délicate.

— Mais ce n’est pas ma faute s’il lui a plu de se trouver mal ! Elle s’est jetée elle-même dans mes bras.

— C’est très-probable, mon cher monsieur ; très-probable et très-naturel. Rien n’est plus naturel, mon cher monsieur ; mais qu’est-ce qui le prouvera ? »

M. Pickwick passa à un autre sujet, car la question de M. Perker l’avait un peu démonté. « Ils ont également cité mon domestique, dit-il.

— Sam ? »

M. Pickwick répliqua affirmativement :

« Naturellement, mon cher monsieur ; naturellement. Je le savais d’avance ; j’aurais pu vous le dire, il y a un mois. Voyez-vous, mon cher monsieur, si vous voulez faire vos affaires vous-même, après les avoir confiées à votre avoué, il faut en subir les conséquences. »