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— Quels sont ces papiers ? demanda M. Pickwick en voyant l’avoué déposer sur la table une liasse attachée avec de la ficelle rouge.

— Les papiers de Bardell et Pickwick, » répliqua Perker en dénouant la ficelle avec ses dents.

Le philosophe fit grincer les pieds de sa chaise sur le carreau, se renversa sur le dossier, croisa ses bras et regarda son avoué avec un air sévère, si tant est que M. Pickwick pût prendre un air sévère.

« Vous n’aimez pas à entendre parler de cette affaire ? poursuivit le petit homme, toujours occupé de son nœud.

— Non, en vérité.

— J’en suis fâché, car ce sera le sujet de notre conversation, et…

— Perker, interrompit précipitamment M. Pickwick, j’aimerais beaucoup mieux que ce sujet ne fût jamais mentionné entre nous.

— Bah ! bah ! mon cher monsieur, répliqua l’avoué en défaisant sa liasse et en regardant son client du coin de l’œil ; il est nécessaire que nous en parlions. Je suis venu ici exprès pour cela. Êtes-vous prêt à entendre ce que j’ai à vous dire, mon cher monsieur ? Ne vous pressez pas : si vous n’êtes pas encore disposé, je puis attendre. J’ai apporté un journal, je serai à vos ordres quand vous voudrez. Voilà. En parlant ainsi, le petit homme croisa ses jambes, et parut commencer à lire le Times avec beaucoup de tranquillité et d’application.

— Allons, dit M. Pickwick avec un soupir, qui pourtant se termina en un sourire ; dites tout ce que vous voudrez. C’est encore la vieille rengaine, je suppose ?

— Avec une différence, mon cher monsieur, répliqua Perker en fermant soigneusement le journal et en le remettant dans sa poche. Mme  Bardell, la demanderesse, est dans ces murs, monsieur.

— Je le sais.

— Très-bien, et vous savez comment elle est venue, je suppose ? Je veux dire pour quelle cause et à la requête de qui ?

— Oui !… c’est-à-dire que j’ai entendu la version de Sam à ce sujet, répondit M. Pickwick avec une indifférence affectée.

— Je suis persuadé que la version de Sam était parfaitement correcte. Eh bien ! maintenant, mon cher monsieur, voici la première question que j’aie à vous adresser. Cette femme doit-elle rester ici ?