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— Bien obligé, ma chère ; je suis tout à fait bien où je suis. »

À cette réponse Mme Weller fondit en larmes.

« Qu’est-ce qu’il y a, maman ? lui demanda Sam.

— Oh ! Samuel, répliqua-t-elle, votre père me rend bien malheureuse ! il n’est donc sensible à rien ?

— Entendez-vous cela ? dit Sam. Madame demande si vous n’êtes sensible à rien.

— Bien obligé de sa politesse, Sammy. Je pense que je serais très-sensible au don d’une pipe de sa part. Puis-je en avoir une, mon garçon ? »

En entendant ces mots, Mme Weller redoubla ses pleurs, et M. Stiggins poussa un gémissement.

« Ohé ! voilà l’infortuné gentleman qui est retombé, dit Sam en se retournant. Où ça vous fait-il mal, monsieur ?

— Au même endroit, jeune homme, au même endroit.

— Où cela peut-il être, monsieur ? demanda Sam, avec une grande simplicité extérieure.

« Dans mon sein, jeune homme. » répondit M. Stiggins, en appuyant son parapluie sur son gilet.

À cette réponse touchante, Mme Weller incapable de contenir son émotion, sanglota encore plus bruyamment, en affirmant que l’homme au nez rouge était un saint.

« Maman, dit Sam, j’ai peur que ce gentleman, avec le tic dans sa physolomie, ne soit un peu altéré par le mélancolique spectacle qu’il a sous les yeux. C’est-il le cas, maman ? »

La digne lady regarda M. Stiggins pour avoir une réponse, et celui-ci, avec de nombreux roulements d’yeux, serra son gosier de sa main droite, et imita l’acte d’avaler, pour exprimer qu’il avait soif.

« Samuel, dit Mme Weller d’une voix dolente, je crains en vérité que ces émotions ne l’aient altéré.

— Qu’est-ce que vous buvez ordinairement, monsieur ? demanda Sam.

— Oh ! mon cher jeune ami, toutes les boissons ne sont que vanités !

— Ce n’est que trop vrai, ce n’est que trop vrai ! murmura Mme Weller, avec un gémissement et un signe de tête approbatif.

— Eh bien ! je le crois, dit Sam ; mais quelle est votre vanité particulière, monsieur ? Quelle vanité aimez-vous le mieux ?