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— Non ! non ! merci, répliqua vivement le pickwickien désarçonné.

— Qu’en pensez-vous, M. Pickwick ? dit Bob Sawyer. »

Le philosophe était indigné ! Il fit un signe à Sam Weller, en disant d’une voix sévère :

« Ôtez-lui ses patins.

— Les ôter ? mais je ne fais que commencer, représente M. Winkle, d’un ton de remontrance.

— Ôtez-lui ses patins, répéta M. Pickwick avec fermeté. »

On ne pouvait résister à un ordre donné de cette manière. M. Winkle permit silencieusement à Sam de l’exécuter.

« Levez-le, » dit M. Pickwick.

Sam aida M. Winkle à se relever.

M. Pickwick s’éloigna de quelques pas, et ayant fait signe à son jeune ami de s’approcher, fixa sur lui un regard pénétrant et prononça d’un ton peu élevé, mais distinct et emphatique, ces paroles remarquables :

« Vous êtes un imposteur, monsieur.

— Un quoi ? demanda M. Winkle en tressaillant.

— Un imposteur, monsieur. Et je parlerai plus clairement si vous le désirez : un blagueur, monsieur. »

Ayant laissé tomber ces mots d’une lèvre dédaigneuse, le philosophe tourna lentement sur ses talons, et rejoignit la société.

Pendant que M. Pickwick exprimait l’opinion ci-dessus rapportée, Sam et le gros joufflu avaient réuni leurs efforts pour établir une glissade, et s’exerçaient d’une manière très-brillante. Sam, en particulier, exécutait cette admirable et romantique figure que l’on appelle vulgairement cogner à la porte du savetier, et qui consiste à glisser sur un pied, tandis que de l’autre on frappe de temps en temps la glace d’un coup redoublé.

La glissade était longue et luisante, et comme M. Pickwick se sentait à moitié gelé d’être resté si longtemps tranquille, il y avait dans ce mouvement quelque chose qui semblait l’attirer.

« Voilà un joli exercice, et qui doit bien réchauffer, n’est-ce pas ? dit-il à M. Wardle.

— Oui, ma foi ! répondit celui-ci, qui était tout essouffle d’avoir converti ses jambes en une paire de compas infatigable pour tracer sur la glace mille figures géométriques. Glissez-vous ?