Page:Dickens - Les Papiers posthumes du Pickwick Club, Hachette, 1893, tome 1.djvu/132

Cette page a été validée par deux contributeurs.

ce… Oh ! vous voilà donc, Sam ! Pourquoi ne répondiez-vous pas ?

— Ça serait-y gentil de répondre avant que vous eussiez fini de parler ? répliqua Sam un peu brusquement.

— Tenez, cirez ces souliers pour le no 17, sur-le-champ, et portez-les à la salle à manger particulière, no 5, au rez-de-chaussée. Ayant ainsi parlé, l’aubergiste jeta dans la cour des souliers de femme, et s’éloigna en trottinant.

No 5, dit Sam en ramassant les souliers et tirant un morceau de craie de sa poche, pour noter leur destination sous la semelle : Souliers de femme et salle à manger particulière, je parie bien qu’elle n’est pas venue en charrette, celle-là !

— Elle est venue de bonne heure ce matin, cria la servante, qui était encore appuyée sur la balustrade de la galerie, dans un fiacre, avec un gentleman, et c’est lui qui demande ses bottes, que vous feriez mieux de lui donner : voilà l’histoire.

— Pourquoi ne m’avez-vous pas dit ça d’abord ? s’écria Sam avec une grande indignation, en choisissant les bottes en question parmi toutes celles qui étaient devant lui. Je croyais que c’était une de nos pratiques à trois pence. Salle à manger particulière ! et une lady encore ! S’il y a dans sa peau un peu du véritable gentleman, il me vaudra au moins un shilling par jour, sans compter les commissions. »

Stimulé par cette réflexion consolante, M. Samuel brossa avec tant de bonne volonté, qu’au bout de peu de minutes, il avait donné aux souliers et aux bottes un luisant qui aurait rempli de jalousie l’âme de l’aimable M. Warren ; car, au Blanc-Cerf, on employait le cirage de MM. Day et Martin.

Arrivé à la porte du no 5, Sam frappa respectueusement.

« Entrez ! » répondit une voix d’homme.

Sam fit son plus beau salut, et parut en présence d’une dame et d’un gentleman qui étaient en train de déjeuner. Ayant officieusement déposé les bottes de droite et de gauche aux pieds respectifs du gentleman, et les souliers de droite et de gauche à ceux de la dame, il se retira vers la porte.

« Garçon ! dit le gentleman.

— Monsieur ! répondit Sam en fermant la porte et tenant la main sur le bouton de la serrure.

— Connaissez-vous… comment cela s’appelle-t-il ? Doctors Commons ?

— Oui, monsieur.

— Où est-ce ?